Magazine Culture

Carnet de voyage ii

Par Apolline Mariotte @ApollineAM

AU PAYS DES KHMERS

IV

L’atelier

Nous nous sommes liés d’amitié avec Monsieur tuk tuk et celui-ci, plus qu’un chauffeur, est devenu un guide.

Un jour, il nous proposa d’aller voir une ferme d’élevage de vers à soie. À bord de son tuk tuk, nous nous enfonçons dans la campagne, là où la circulation se fait plus rare. Après trois quarts d’heure de route, il s’engage sur un chemin, ralentit puis coupe le moteur.

Nous pénétrons dans la ferme, accolée à un champ de mûriers. Des femmes assises à même le sol trient des tas de feuilles dans de grands paniers ronds et plats. En nous approchant, nous distinguons dans ces feuilles des milliers de vers en plein repas. En fait, ce sont eux qu’elles trient. Il y en a de plus ou moins gros, selon leur nombre de semaines de vie.

Lorsque les vers ont atteint l’âge requis, les femmes les disposent dans d’autres paniers ronds et plats, dans lesquels des arceaux leur donnent une prise pour s’accrocher. Là, ils commencent leur cocon en s’entourant du fil qu’ils fabriquent avec leur salive. Lorsque les cocons sont bien gros, et avant que les vers ne se transforment en papillons – car alors, ils perceraient leur cocon pour s’envoler, cassant ainsi le précieux fil – ils sont exposés au soleil et livrés à une mort par dessèchement.

Nous entrons dans l’atelier, pièce la plus fascinante de la ferme. Le bruit des navettes tapant chaque extrémité des métiers en bois emplit l’endroit. Assises derrière les machines, les femmes tissent la soie. Pas moins de cent cocons sont nécessaires à l’obtention d’un fil de la bonne épaisseur et les tisserandes en tirent cent mètres de soie sauvage – plus chaude – pour trois cents mètres de soie fine – plus qualitative. Ensuite, le fil, naturellement jaune, est blanchi au bicarbonate pour être teinté. Le tissage peut commencer. C’est alors que nous fîmes une découverte stupéfiante. Alors que nous pensions que pour dessiner un motif sur un tissu il fallait par exemple un fil vert, un fil rouge et un fil bleu, nous apprenons que les motifs sont dessinés sur le fil lors de la teinture et qu’un même fil est vert, puis rouge, puis bleu, le motif prenant forme au fur et à mesure du tissage. Quel travail. Et gare à celle qui mélange ses bobines.

La jolie étole que nous leur achetons en partant a demandé quatre jours de travail à l’une de ces femmes.

À suivre.


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