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Les réseaux sociaux cartographient la smart city

Publié le 13 mai 2016 par Pnordey @latelier

Mine d’or data, les interactions sur les réseaux sociaux se cartographient pour développer les services de la métropole. Focus sur ce nouvel outil qui met le citoyen 2.0 au cœur des transformations des smart city.

Précieux outils de la métropole, les réseaux sociaux ? Ils sont en passe de le devenir. Véritable mine d’or en termes de données – chacun a déjà tweeté au moins une fois avec le hashtag de sa ville – encore faut-il pouvoir repérer, traiter et analyser la masse d’informations diffusée chaque jour par les e-citoyens.

C’est là qu’intervient la cartographie par publications géolocalisées. Des start-ups américaines et une française s’y sont mis. Le principe ? Repérer, à l’aide d’un thésaurus de hashtags, mots clés et synonymes, les publications évoquant un sujet particulier en temps réel. Les données GPS des publications sont collectées, et servent à délimiter des contours géographiques autour de ce thème.

Twitter, mine d’or d’open data

ChattyMaps est, par exemple, une carte des endroits les plus silencieux d’une ville en fonction de tweets détectés en live comme bruyants ou paisibles (indication de musique dans la rue, utilisation du mot “calme” pour parler d’un quartier…) À l’inverse, l’Université de Rochester a pointé (virtuellement) du doigt les spots les plus festifs de New-York grâce aux tweets parlant d’alcool ou écrits sous son influence (eux-mêmes repérés en fonction des tweets précédents, de l’utilisation de termes comme “saoul”, d’éventuelles coquilles, etc).  À une époque, la start-up Tweetographer avait pour ambition de servir de live-agenda grâce aux commentaires des twittos sur leurs activités dans la ville.

Les réseaux sociaux cartographient la smart city

La cartographie par les réseaux sociaux selon LightStream

La cartographie semble plutôt se passer sur Twitter pour le moment, pour une raison simple : l’accessibilité des données ; les comptes Facebook et Instagram par exemple, étant plus généralement privés. Franck Ernewein, à la tête de la start-up montpelliéraine LightStream qui cartographie grâce aux réseaux sociaux, explique : « la géolocalisation est « souvent » donnée par l’utilisateur, dans environ 10 % des cas ».  Quand elle ne l’est pas, elle est trouvable sur le profil de l’utilisateur ou par la textualisation via le scan de ses publications. Le mot correspondant à une donnée géographique est alors transformé en coordonnée GPS que l’on peut afficher sur une carte.

Avec 300 millions d’utilisateurs Twitter, 400 millions sur Instagram et 1,5 milliard de profils Facebook sans compter les autres plateformes moins connues ou professionnelles, les réseaux sociaux sont une véritable mine d’or data pour les marques, mais aussi les villes et leurs citoyens. Comment cette nouvelle cartographie transforme la smart-city ?

Une multiplicité d’applications pour la smart-city et les autorités

La cartographie pour la métropole commence par un simple tracking de tout ce qu’il se dit sur les réseaux sociaux, en temps réel, à propos d’un endroit. Elle permet de faire ressortir les tendances, de relever un sujet dont les e-citoyens parlent subitement, mais également de palper l’image d’une ville ou d’un quartier véhiculée sur la toile. Grâce à la géolocalisation, un découpage très précis peut se réaliser autour de quartiers précis et ainsi observer les différences au sein même d’une ville. Où parle-t-on de quoi ? Où parle-t-on le plus de tel sujet ? Pour la ville, l’intérêt est de s’en servir pour ajuster l’accès à l’information ou la communication vers un public ciblé. Franck Ernewein donne l’exemple des élections régionales « Montpellier a pu se rendre compte qu’un quartier était totalement déconnecté des élections, ou qu’un candidat particulier était fortement évoqué à certains endroits, beaucoup moins à d’autres »

Les réseaux sociaux cartographient la smart city

L’urbanisme y trouve aussi son intérêt. Le tracking est un service de remontée d’informations comme les autres, avec l’avantage de se dérouler en temps réel. Il est, d’une part, utile à flux constant par exemple pour « repérer un trottoir esquinté, un abribus cassé ». Début 2015, le chercheur espagnol Enrique Ferias-Martinez s’était penché sur le sujet et expliquait que les réseaux sociaux permettaient notamment une meilleure prise en compte de la vie nocturne dans la ville, souvent décrite sur la toile, et qui pose des questions de bruit, de nettoyage et de sécurité. D’autre part, la notion de temps réel se révèle utile en cas de crise. Lors d’une catastrophe naturelle comme une inondation, se servir des messages et photos postés sur les réseaux sociaux pour prioriser la prise en charge est une fonctionnalité intéressante pour les services municipaux.

Enfin, les autorités pourraient également se servir du tracking pour repérer voire prédire les délits ou réagir à des alertes. À Chicago, le test a déjà été réalisé pour prévenir la criminalité : une étude avait montré que les tweets avaient été utiles pour 19 types de crimes sur 25. Autre exemple d’utilisation : en cas d’alerte majeure (les alertes enlèvements ?), comme lors des attentats du 13 novembre à Paris où LightStream a extrait un tracking du hashtag #PortesOuvertes dont le lien a été fortement relayé sur la toile.

Le tracking vers la cartographie, c’est utiliser intelligemment la donnée du e-citoyen qui finalement (re)devient acteur de sa ville IRL.

Le citoyen 2.0, acteur malgré lui

« Ce type de cartographie permet au citoyen d’explorer la ville différemment » explique Franck Ernewein.

Différemment, car l’outil de la start-up est public et ouvert à tous pour chercher de l’information sur un sujet. Ce tracking permet d’avoir un point de vue thématique global, et non plus limité à son cadre social personnel « l’internaute a pour habitude d’analyser le contenu de son entourage (amis, followers), mais il y a un énorme bruit géographiquement autour de lui qui peut être difficile à palper. » Et c’est là que réside la différence avec une simple recherche de hashtag sur Twitter : les réseaux sociaux restent, même au niveau de la recherche, users centric dans les résultats donnés.

Les réseaux sociaux cartographient la smart city

Agrégateur, le tracking cartographié peut sortir les restaurants commentés positivement ou tous les avis sur un festival en temps réel et ainsi servir d’agenda sorties ou de Yelp social. La data individuelle devient d’intérêt général en permettant au e-citoyen de co-constuire sa ville. Cela peut remplacer les études et enquêtes d’opinion de la ville, et plus largement, celles des commerces et des marques. L’avantage par rapport, aux sites d’avis et aux sondages classiques ? Les e-citoyens n’ont pas à s’inscrire sur une plateforme, y rentrer des codes et s’y montrer actifs. La smart city ne vient pas le chercher mais le trouve et se met à son écoute. « Ça n’est pas non plus un système fermé fait pour la ville par la ville. On interconnecte simplement les données déjà disponibles avec un espace territorial. » ajoute Franck Ernewein. Rendu actif « malgré lui », le citoyen 2.0 peut cependant tout à fait choisir de ne pas l’être en protégeant ses données.

Des limites intrinsèques aux réseaux sociaux

Quel impact apporte la cartographie par les réseaux sociaux sur la société ? “Les gens vont prendre conscience de l’activité sur les réseaux sociaux et des opinions générales de manière géographique. Les choses sont parfois un peu faussées par des médias qui ne retranscrivent qu’une part de l’information. Là, on a une donnée factuelle exposée au grand public pour qu’il puisse voir ce qu’il se passe dans toutes les dimensions sociales disponibles”.

Les réseaux sociaux rapprocheraient-ils les citoyens contrairement au reproche qui leur est souvent fait de sédentariser ? C’est une certitude selon LightStream : « L’intérêt est de voir les utilisateurs en temps réel qui interagissent pas loin de nous. Les réseaux sociaux ont donné l’opportunité de communiquer avec des gens à l’autre bout de la planète, mais ont oublié de donner l’opportunité de communiquer avec les gens proches de nous »

Des limites résident cependant dans cette innovation : les e-citoyens ne représenteront toujours qu’une partie des citoyens en général, laissant de côté une part de l’opinion. De plus, les start-ups n’ont évidemment accès qu’aux données rendues publiques, laissant également de côté une fange des citoyens 2.0. D’autres limites sont intrinsèques aux réseaux sociaux qui peuvent présenter des dérives. « LightStream et les acteurs de la cartographie sont vecteurs des informations des médias sociaux pour le meilleur, comme pour le pire ».


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