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Les objets connectés ne remplaceront pas les médecins !

Publié le 24 mai 2016 par Pnordey @latelier

Les Français voient d’un bon œil les innovations du domaine de la santé, et cela passe par l’IoT. Surveiller sa condition médicale est une priorité pour le citoyen, mais l’objet connecté ne remplacera pas le médecin : au contraire, il pourrait rapprocher patients et praticiens.

Rechercher sur Google ses symptômes, chercher un médecin sur doctolib ou remplir un quizz pour s’auto-diagnostiquer : la santé est déjà ancrée dans les pratiques numériques des Français. Il est donc naturel que ce domaine soit plébiscité par les citoyens en ce qui concerne les objets connectés. Ils sont en effet 64 % à penser que l’IoT doit se concentrer en priorité sur les innovations médicales, selon une récente étude Opinion Way.

Aujourd’hui, les objets connectés de l’e-health chez les particuliers « concernent deux types de public : les malades chroniques et les bien-portants » explique Paul Lecerf, chef de produits chez un spécialiste du domaine, Bewell-Visiomed Group, rencontré lors des #DISTREE ConnectDays. Le bien-portant cherche à rester en bonne santé tandis que le malade chronique, une personne diabétique par exemple, surveille ses indicateurs de façon autonome et autogère sa maladie. Les deux s’évitant des rendez-vous médicaux dédiés au simple monitoring. Et c’est là tout l’intérêt de l’objet connecté : loin de remplacer le praticien, il laisse davantage de place à la médecine et à l’échange.

Le monitoring, une première forme de traitement ?

En effet, l’avantage évident de ce type d’outil de e-santé est la possibilité pour certains malades chroniques (atteints de diabète ou d’hypertension par exemple) d’adapter, seuls, leur médication ou activités à partir des constantes qu’ils auront observées. Par la mesure, l’objet connecté engendre donc une première forme de traitement et peut tendre par exemple vers la resorbation d’un taux de sucre ou d’une tension trop élevés. Le patient gagne donc en indépendance et en confort, car les examens et tests sont limités et ne sont nécessaires qu’en cas de données “anormales”.

Il en va de même pour ce qui du rappel de prise d’un médicament. Celui-ci améliore le traitement du patient et réduit le nombre d’hospitalisations dues à un mauvais suivi d’une ordonnance. Un test en Californie a montré que les messages de rappel engendraient des améliorations de 16 à 33 % de l’état de santé des patients, selon la catégorie de maladie et le nombre de médicaments à prendre chaque jour. Et donc moins d’hospitalisations, soit des économies de plusieurs milliers de dollars par patient.

Les objets connectés ne remplaceront pas les médecins !

Un exemple très concret de l’aide que l’IoT peut apporter au soin est l’innovation de Franz Bozsak : le « stent » connecté. Un stent est un dispositif métallique qui maintient les artères ouvertes dans le traitement de certaines maladies. Son suivi est essentiel pour l’adaptation du traitement, mais particulièrement fastidieux. Le stent connecté de Instent permet un suivi non-invasif du patient puisqu’il lui évite des opérations chirurgicales habituellement nécessaires.

En surveillant lui-même ses constantes, le patient désengorge donc les cabinets médicaux surchargés : des économies de temps et d’argent pour tout le monde. Il peut agir lui-même pour tendre vers une meilleure nuit de sommeil et une alimentation plus saine. En se rendant moins souvent chez le médecin, quand c’est le cas, le temps est davantage consacré au dialogue sur la pathologie, puisque les mesures sont déjà réalisées.

Davantage de place à la relation humaine ?

« Quand vous prenez l’avion, il y a toujours un pilote dans le cockpit, même s’il utilise le pilotage automatique. L’IoT de la santé, c’est le même principe : il est le pilotage automatique du médecin » illustre Paul Lecerf. 73 % des Français sont d’accord pour dire que les objets connectés favorisent un meilleur échange en consultation, selon une étude Ifop. « L’IoT entend réhumaniser la relation entre le patient et le médecin. C’est une opportunité de les rapprocher » continue Paul Lecerf. Car selon lui, aucune technologie ne remplacera le médecin « Il détiendra toujours l’expérience et l’intuition que la machine n’a pas et qui peut sauver des vies. Il faut aussi quelqu’un qui prend la main en cas de défaillance. »

L’objet connecté serait donc un assistant, passerelle entre patients et praticiens. Cet usage est déjà mis en œuvre dans les hôpitaux de Boston où les outils de check-in connectés transmettent leurs données aux dossiers médicaux en ligne. Ces documents sont alors accessibles par les deux acteurs. Une initiative applicable en France ? A priori, du côté des patients, aucun problème : ils sont 3 sur 4 (étude Ifop) à bien vouloir partager leurs données de santé avec des professionnels afin de bénéficier de conseils personnalisés.

« Il n’y a pas besoin de haute technologie : la vraie valeur ajoutée de l’objet connecté, c’est son applicatif, c’est-à-dire le service derrière. Les appareils de mesure électroniques existaient déjà avant, on y a juste ajouté du bluetooth finalement » explique Paul Lecerf. L’une des réflexion du #Distree ConnectDays s’est justement tournée vers le retour au bénéfice-service dans l’IoT. Vincent Guyot, fondateur du Web des objets, exprimait qu’on devrait « davantage penser « service » connecté plutôt qu’ « objet » » - et éviter l’effet gadget.

Les objets connectés ne remplaceront pas les médecins !

Une solution aux déserts médicaux ?

Est-ce que finalement, les objets connectés n’auraient pas pour bénéfice de relever l’un des défis santé de ce siècle : résoudre le problème des déserts médicaux ?

Peut-être. Selon Gilles Litman, Directeur Innovation et Perfoemances à Sanofi France interviewé en 2015 et 2016 par L’Atelier Numérique, « la santé mobile est une vraie tendance de fond, qui ne va que s’intensifier. Nous sommes convaincus de son potentiel pour la prise en charge du patient et l’efficience globale du personnel de santé ». Cette déclaration est illustrée par une étude médico-économique de la télémédecine menée par Sanofi France sur plusieurs centaines de patients.

Et les exemples pleuvent. La startup SpiroCall propose de son côté un service de test pulmonaire à distance qui ne nécessite qu’un téléphone, quelqu’il soit (de la cabine téléphonique publique au smartphone high tech). Et les valises de télémédecine ou télécabines médicales sont un autre exemple, qui montre comment en connectant simplement les outils de santé et leurs données, on peut relier patients et praticiens à distance.

Cependant, pour une adoption de l’IoT par les individus comme les professionnels, la co-construction des solutions est indispensable. « La collaboration avec les startup est utile d’un point de vue technologique, mais c’est d’abord avec les associations de patients et les médecins qu’il faut travailler. Nous devons partir de leurs besoins et usages, faire évaluer les applicatifs par eux, plutôt que de partir de notre propre vision » rappelait Gilles Litman.

Une seconde condition reste à remplir pour démocratiser l’usage des objets connectés de santé : la réglementation. Paul Lecerf prévient « Certaines marques commercialisent des produits non certifiés et il peut y avoir des données aberrantes. C’est très dangereux : quelques dixièmes de degrés peuvent changer la donne quand on prend la température d’un nourrisson ». Gilles Litman abondait également en ce sens en demandant carrément la création d’un label pour « favoriser des critères homogènes d’aval de ces applicatifs ».


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