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Critique Ciné : Ma Loute (2016)

Publié le 25 mai 2016 par Delromainzika @cabreakingnews

Ma Loute // De Bruno Dumont. Avec Fabrice Luchini, Juliette Binoche et Valeria Bruni Tedeschi.


Présenté en Compétition au Festival de Cannes 2016, le nouveau film de Bruno Dumont est une curiosité assez étonnante. J’avais à la fois hâte et peur de ce film, mais conseillé par un ami qui a vu sa Palme d’Or de Cannes 2016 et qui a vu l’un des meilleurs films de l’année, je me suis jeté dessus. Le résultat est assez étonnant, proche de ce que j’avais déjà beaucoup aimé dans P’tit Quinquin. Si je ne vais pas porter Ma Loute aux nues, il n’en reste pas moins un exemple de cinéma au style sensitif et particulier. Le style Dumont est toujours difficile à cerner mais j’aime beaucoup ce qu’il a fait dans sa carrière, utilisant le nord de la France comme un terrain de jeu. Lui, à qui l’on doit La vie de Jesus (1997) qui reste pour moi son meilleur avec L’humanité (1999) retrouve Juliette Binoche qu’il avait dirigé en 2013 pour Camille Claudel 1915. Pas son meilleur exercice mais une vision assez intéressante d’une femme dans un monde légèrement différent. Mais Ma Loute c’est un retour aux sources, celles qui ont vu naître notamment P’tit Quinquin mais transposé à 1910 et non pas à notre époque. Le style visuel reste très proche, les dialogues également. En somme, on pourrait dire que Bruno Dumont ne s’est pas foulé et a repris sa série pour le grand écran.

Eté 1910, Baie de la Slack dans le Nord de la France. De mystérieuses disparitions mettent en émoi la région. L'improbable inspecteur Machin et son sagace Malfoy (mal)mènent l'enquête. Ils se retrouvent bien malgré eux, au cœur d'une étrange et dévorante histoire d'amour entre Ma Loute, fils ainé d'une famille de pêcheurs aux mœurs bien particulières et Billie de la famille Van Peteghem, riches bourgeois lillois décadents.

P’tit Quinquin avait été présenté au Festival de Cannes 2014 dans la Quinzaine des Réalisateurs et un peu comme Ma Loute, le public n’a pas totalement adoré à un style particulier et original. Derrière une galerie de personnages aux antipodes de ce que l’on peut voir au cinéma actuel, Ma Loute fait partie de ces cinéastes qui ont de l’ambition et surtout qui ont un style très différent des autres. C’est ce que j’apprécie dans Ma Loute tant le film déboulonne tout sur son passage, passant d’un genre à un autre (du comique de situation, des bruitages incessants venant accentuer le rire dans des moments forts et dramatiques, la situation policière, familiale, etc.). Il se moque du Nord mais comme un bon ch’ti pourrait le faire et personne d’autre. Ma Loute joue donc dans le registre de la grande farce populaire, qui ne séduira forcément pas tout le monde mais qui a un style si particulier et si étonnant que l’on ne peut pas passer à côté. Derrière se cache quelque chose de tragique, celle de ces disparitions. Au premier abord on a envie de prendre tout cela avec fous rires (rien que l’inspecteur qui dans la première scène du film tombe et faire des roulades je pense que je vais m’en souvenir encore un bon bout de temps).

Le film compose alors avec cette galerie de personnages farfelus se moquant avec intelligence du nord de la France. On passe alors par toutes les âneries possibles et imaginables (notamment l’alcoolisme du personnage incarné par Fabrice Luchini qui donne d’ailleurs à ce dernier l’occasion de faire quelque chose de très différent, loin de ses rôles poètes qu’il accumule ces dernières années). Ce que ce film fait est donc étonnant même si parfois je trouve qu’il manque un peu d’entrain (notamment dans le creux de la vague). Mais ce que j’apprécie avant tout c’est le fait que Ma Loute ne s’arrête jamais à un problème et trouve toujours derrière une (bonne) solution. La mise en scène de Bruno Dumont, très légère apporte forcément un vrai plus à cet ensemble et en tant que spectateur, nous avons forcément envie de voir beaucoup plus de ce réalisateur frappadingue capable de tout. Il me rappelle un peu les cartoons ou même les films de Leslie Nielsen mais avec une vraie volonté tragicomique derrière que les films américains que je cite n’avaient pas.

Note : 8/10. En bref, une singularité étonnante.


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