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Joaquin phoenix - interview - her

Par Aelezig

Source : Studio Ciné Live - Mars 2014

Dans Her, de Spike Jonze, il incarne un homme qui tombe amoureux de la voix d'un programme informatique ultramoderne. Une interprétation magnifique de douceur dans un film dont il nous raconte la genèse, tout en revenant sur son parcours de comédien.

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Comment Spike Jonze vous a-t-il présenté ce projet fou ?

La première fois, il m'a juste indiqué qu'il y serait question d'une messagerie vocale.Cela a éveillé ma curiosité et j'ai dévoré son scénario mais le flou ne s'est guère évaporé. Chaque question que je me posais en amenait une autre, puis une autre. C'était vertigineux, mais cela ne m'a pas gêné. Car quand je choisis un film, je n'ai pas besoin de comprendre son scénario, juste de ressentir une histoire pour avoir envie de l'incarner. En cela, j'ai changé. Avant, j'avais besoin d'avoir des réponses pour me décider à me lancer. Aujourd'hui, j'essaie toujours d'être dans l'instant présent et de ne pas me projeter dans un futur que je m'efforcerais à tout prix de maîtriser. Je m'abandonnne et me laisse porter par les idées de mon metteur en scène et de tous ses collaborateurs.

Qu'est-ce qui fait la singularité de Spike Jonze à vos yeux ?

Il possède tout ce qui fait, selon moi, un grand réalisateur. Il est dans la vie. Il est sensible à la musique et au rythme. Il sait saisir l'émotion et le comportement humain pour provoquer des sensations inédites chez les spectateurs. Certains réalisateurs sont de grands techniciens, mais manquent de sensibilité. D'autres possèdent cette sensibilité mais sont de piètres techniciens. Spike, lui, maîtrise les deux domaines. Sur un plateau, on dirait un enfant découvrant des cadeaux de Noël. Et sa ténacité est sans faille. Il multiplie les prises à l'infini et sait, par son enthousiasme, repousser les limites des acteurs.

Comment cela s'est-il passé sur le plateau de Her ? Qui entendiez-vous lorsque vous jouiez ?

Samantha Morton, puisque Spike l'avait choisie au départ pour la voix du programme informatique. [Avant de la remplacer par celle de Scarlett Johansson lors du montage, son timbre de voix ne correspondant pas à ce qu'il attendait, NDLR]. Elle se situait dans une pièce à côté du plateau, de manière à ce que je ne la voie jamais. Et on a vraiment développé cette histoire entre nos personnages à deux. Puis, j'ai donc réenregistré mes dialogues avec Scarlett, en modifiant certains par rapport à l'intonation de sa voix. Ce fut une expérience unique ! Et quand ells n'étaient pas là, c'est Spike qui me donnait la réplique. Et là, ça devenait impossible ! Car je jouais en réaction à ce que j'entendais et la voix de Spike est bien moins inspirante que celles de Samantha ou de Scarlett !

Qu'est-ce qui a changé dans votre manière d'envisager le métier depuis vos débuts ?

Aujourd'hui, je ne vois plus les autres comédiens comme des concurrents, car il n'y a qu'une personne que j'ai envie de défier à chaque rôle : moi. J'essaie donc de me disperser le moins possible et de rester concentré sur mon travail. Mais plus on tourne, plus on doit faire des interviews et analyser son jeu... et plus on risque de perdre la spontanéité, clé essentielle de tout.

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Avoir tourné I'm not there, ce vrai-faux documentaire sur le vrai-faux arrêt de votre carrière sous la direction de Casey Afllex a changé les choses ?

C'est la première fois que je me suis retrouvé à devoir jouer sans filet, avec une seule prise à chaque fois. Sous pression permanente. Mais le plus dur fut sans doute pour moi d'aller, à la demande de Casey, surfer sur les réseaux sociaux pour découvrir la réaction des gens tout au long de cette aventure. Je ne lis jamais les commentaires sur mon travail. Je n'ai pas assez confiance en moi pour m'y confronter.  Qu'ils soient mauvais ou bons. Car ces dernier vont forcément me pousser à ne plus varier mon jeu pour en rester à ce qui m'a valu des louanges. D'ailleurs, selon moi, il ne faut jamais penser au public sur un plateau. On ne joue pas pour quelqu'un mais avec ses partenaires.

Depuis The yards, votre carrière est émaillée de rendez-vous singuleirs avec celui qui a fait de vous son acteur fétiche : James Gray. Comment tout cela s'est-il déclenché ?

Quoique totalement dissemblables physiquement et intellectuellement, on s'est d'emblée compris. La première fois où je l'ai rencontré, je n'avais aucune idée de qui il était, je n'avais pas vu Little Odessa. Donc, ce sont le scénario de The yards, et surtout notre conversation, qui m'ont poussé à accepter son film. Je n'avais jamais entendu parler quelqu'un aussi bien des acteurs. Avant lui, je jouais sans me poser de question. James m'a appris à penser en permanence à servir au mieux l'histoire et à me détacher de mon interprétation. A chacune de nos collaborations, impossible pour moi de tricher ou de me reposer sur mes acquis : il le voit tout de suite. Et puis tourner avec lui permet de se retrouver face à des partenaires d'exception. Comme Marion Cotillard dans The immigrant. Je l'avais surnommé le "cyborg" car rien ne lui échappait et ne lui paraissait impossible au niveau du jeu. Elle m'a époustouflé.


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