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La justice sociale dans un discours à HEC

Publié le 06 juillet 2016 par Nicomak @Myriam_Nicomak

Le fameux discours du directeur général de Danone, devant les étudiants de HEC le 24 juin dernier a fait le buzz sur les réseaux sociaux. Le thème principal : la justice sociale.

Un discours sur la justice sociale

Emouvant et inspirant, le discours d’Emmanuel Faber commence par «Si vous attendez un discours de référence intellectuelle, vous allez être déçus». Il enchaîne ensuite avec une histoire personnelle concernant son frère qui souffrait de schizophrénie qui fut interné pour la première fois alors qu’Emmanuel était dans l’école de commerce prestigieuse HEC Paris. Il souligne que cet évènement l’a profondément marqué « Ma vie a basculé« . Il raconte ensuite ses différentes expériences auprès des plus pauvres des bidonvilles de Delhi, Bombay, Nairobi, Jakarta mais aussi d’Aubervilliers à coté de Paris et la « jungle de Calais » et affirme qu’il a « découvert que l’on pouvait vivre avec très peu de choses et être heureux. »

Debout devant des étudiants silencieux, en chemise et sans cravate ni montre de luxe, Emmanuel Faber partage ensuite sa vision de l’économie : «Après toutes ces décennies de croissance, l’enjeu de l’économie, l’enjeu de la globalisation, c’est la justice sociale. Sans justice sociale, il n’y aura plus d’économie». Ce rapport à l’argent est une question qui lui est souvent posée. Il est en effet souvent critiqué pour sa rémunération en hausse près de 30% sur un an, qui représentait 4,8 millions d’euros en 2015. Un article du magazine Capital détaille son « rapport coupable à l’argent » en faisant référence à ses vacances dans les Hautes-Alpes et affirme que « le patron allouerait la totalité de ses primes et bonus à des associations caritatives ». Il affirme dans une interview à La Croix qu’il gagne « trop d’argent ». Cette difficulté à trouver un équilibre entre les valeurs catholiques qui lui tiennent à coeur et la logique du marché a été exprimée lors d’un débat sur l’éthique en entreprise : «J’avance cahin-caha sur la ligne de crête vers celui que je veux être, en essayant de limiter les compromis et en excluant les compromissions». Pour lui, les trois « maladies » dangereuses pour les étudiants de HEC, et tous les commerciaux sont le pouvoir, l’argent et la gloire. Il nous donne quelques éclaircissement : « La gloire, oubliez-la, c’est une course sans fin qui va nulle part », « Ne soyez jamais esclaves de l’argent, restez libres », « Le pouvoir a du sens que dans un esprit de service ». Cette notion de service semble essentielle pour le DG de Danone qui a passé une semaine à deux reprises dans une maison pour mourants de Mère Teresa à Delhi puis, qui allait pendant deux ans, chaque vendredi midi dans un centre de soins palliatifs à Puteaux pour accompagner des malades.

Directeur général du groupe Danone depuis 2014

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Ce manager exigeant, infatigable et réputé pour sa dureté en affaires est nommé officiellement DG de Danone le 23 septembre 2014 lors d’un séminaire de rentrée des directeurs généraux du groupe et présente un discours solennel et personnel devant l’assemblée. Un participant se souvient d’avoir entendu un texte « dans lequel il a esquissé sa vision, son «espérance dans les hommes et les femmes de Danone», son «devoir d’utopie», son ambition de réconcilier «l’économique et le social» ». Un mail fut ensuite reçu par tous les employés « …Mon rôle premier sera d’encourager chacun à donner le meilleur de lui-même… ». Après 60 ans de gouvernance par Antoine puis Franck Riboud, c’est la première fois de son histoire que Danone sera dirigé par un non-membre de la famille Riboud. La réponse positive demanda a Emmanuel Faber une bonne dose de réflexion et quelques nuits blanches. Et pourtant, Frank confie au magazine Challenges « Nous avions la chance inouïe d’avoir le meilleur candidat dans la maison ». 

Dimension sociale au sein de Danone

Le changement intérieur de l’entreprise est l’ambition principale de Faber. Déjà alors directeur

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financier, Faber essaye de lier le business à la générosité et devient passionné du micro-crédit. Il décide alors de rencontrer Mohammed Yunus avant de le présenter à Franck Riboud. Une association est faite peu après avec Yunus pour créer une coentreprise au Bangladesh permettant l’accès aux plus pauvres à des yaourts fabriqués l’aide de fournisseurs locaux de lait. Cette initiative confirme le message social que Danone tente de faire passer. Antoine Riboud avait d’ailleurs affirmé dans un discours en 1972 qu’il « n’y a pas de richesse économique sans développement humain ». La dimension sociale est mise en pratique au sein du groupe, notamment avec un système de rémunération variable qui prend en compte trois critères : les résultats économiques, sociaux et sociétaux des managers.

Une conclusion pour chacun de nous à méditer

Pour finir son discours, Emmanuel Faber laisse une question aux étudiants « Qui est votre frère, votre petite soeur ? ». Il fait encore ici référence à son frère qui le connaissait si bien, qui lui laissait chaque jour un message vocal diffusant le bruit de la cascade de leur village pour lui rappeler d’où il venait : comme une façon de lui faire garder les pieds sur terre. Peut être une façon de ne jamais oublier de se laisser guider par les valeurs solidaires et humanistes qui sont ancrées en chacun de nous. En affirmant que la théorie de la main invisible n’existe pas, et que le monde n’a que des mains pour le changer, nos mains, Emmanuel Faber redonne de l’espoir dans la construction d’une économie plus solidaire.


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