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Pouvoir d'achat: le noeud gordien moderne?

Publié le 18 juin 2008 par Gaellef
Avec une hausse des prix estimée à 3,2% en 2007 et une croissance revue à la baisse, les Français s'inquiètent de la chute de leur pouvoir d'achat et l'érigent en nouvelle priorité de l'agenda politique. Mais si tous s'accordent sur le constat, la question des moyens à mettre en oeuvre divise la classe politique...

"Donnez donnez moi/ Du pouvoir d'achat": le clip, diffusé sur internet, est réalisé par le groupe La Chanson du Dimanche et, en quelques semaines, la toile, séduite, reprend en coeur le refrain...Sur le net comme ailleurs, le pouvoir d'achat est au coeur des préoccupations. Pourtant, les chiffres font l'état d'une hausse de la capacité à consommer des Français d'environ 2,3% en 2007. Mais la hausse des prix de 3,2% et l'inflation qui progresse de 2,6% l'an dernier rendent  la hausse du pouvoir d'achat quasi-insensible. Les ménages ont le moral en berne, constatant l'amputation d'une partie  considérable de leur budget une fois déduites du revenu toutes les dépenses contraintes (logement, gaz...). Et le ressentiment est d'autant plus grand que Nicolas Sarkozy s'était érigé en  "candidat du pouvoir d'achat". Après un an de présidence, les Français lui rappellent ses promesses. Déjà malmené dans les sondages, Nicolas Sarkozy ne parvient pas à convaincre sur cette question qui apparait de plus en plus comme le défi majeur de la présidence. Parce que ce thème a ceci de particulier qu'il est fédérateur, touchant de large pans de la population, il est au centre de toutes les attentes et l'on voit se multiplier les revendications provenant de toutes les classes sociales ou presque: étudiants, salariés, fonctionnaires, retraités...Pour tout cela, un seul mot d'ordre: restituer la capacité à consommer. Mais avec le ralentissement de la croissance, le spectre de la stagflation pèse sur le redémarrage économique et N. Sarkozy  ne peut que constater "Les caisses sont vides". Il faut dire que la conjoncture économique ne joue pas en la faveur du gouvernement qui doit faire face à l'envolée des prix des matières premières, la flambée du pétrole et l'effondrement du dollar. Mais si la facture énergétique pèse lourd dans le budget des ménages, elle n'est pas la seule mise en cause et beaucoup imputent à l'Europe et à la BCE une part des responsabilités dans la flambée des prix. A quelques jours de la présidence française de l'Union Européenne, l'enjeu est de taille pour N. Sarkozy.

"Je rendrai aux Français le pouvoir d'achat"
Il s'agit d'abord pour le gouvernement de mesurer l'évolution réelle du pouvoir d'achat et pour cela de fonder un nouvel indice qui surveillerait la progression des dépenses contraintes. Mais face à la grogne générale, l'urgence semble être dans la réforme et le pouvoir d'achat devient le fer de lance de la politique du gouvernement. Pour Nicolas Sarkozy, l'alternative est simple: "Je rendrai aux Français le pouvoir d'achat en obtenant soit la baisse des prix, soit la maitrise de la hausse".
La baisse des prix tout d'abord. Puisque François Fillon exclu la TVA sociale pour relancer le pouvoir d'achat, cela semble devoir passer par des mesures encourageant la concurrence et relançant la compétitivité. La loi de modernisation de l'économie présentée par Christine Lagarde, ministre de l'économie propose de faciliter l'implantation du hard discount en zones urbaines. Pour relancer le pouvoir d'achat, le gouvernement compte aussi sur les effets différés de la loi TEPA, pour le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat. Et en particulier sur le surplus de revenus dégagé grâce à l'exonération des heures supplémentaires. Mais l'opposition pointe du doigt l'inefficacité de la loi TEPA et conteste l'analyse faite par le gouvernement de sa mesure phare. La nouvelle proposition du gouvernement de financer le RSA -revenu de solidarité active- via le rédéploiement d'une partie du coût de la prime pour l'emploi, cristallise les critiques de l'opposition. L'autre stratégie du gouvernement consiste en la relance de l'emploi pour soutenir la consommation. Mais là encore, les mesures d'incitation au travail sont largement mises en cause. Les propositions se multiplient, venant de tous les courants politiques et "le pouvoir d'achat est à la mode" selon un diagnostique de François Fressoz.

Une redéfinition des clivages politiques

Les sollicitudes affluent de toutes parts et tous tentent de se placer sur le créneau de la défense du pouvoir d'achat parce qu'il s'agit désormais de la préoccupation majeure des Français. D'où la difficulté d'y répondre: comment parvenir au consensus et surtout, avec quels fonds? Nicolas Sarkozy insiste sur sa vision à long terme de la problématique économique devenue un enjeu politique et ce malgré les prévisions pessimistes du gouvernement quant à l'évolution du pouvoir d'achat en 2008. Mais les syndicats contestent l'analyse présidentielle et citent en exemple le recul des prestations familiales, la question du déremboursement des lunettes ou la polémique sur la carte famille nombreuses, vécues comme autant d'atteintes à un budget déjà sérieusement entamé par quelques postes de dépenses comme l'énergie ou l'alimentation. C'est d'ailleurs autours de ce mot d'ordre qu'ont défilé ensemble les syndicats au premier mai, preuve supplémentaire de l'importance que revêt le problème dans la classe politique et sociale. Le pouvoir d'achat, véritable épine dans le pied du gouvernement, constitue le défi de la présidence Sarkozy. Nouveau point central de redéfinition des stratégies autours duquel se répartissent les clivages politiques, la résolution de ce problème tant économique que social, pourrait revenir à trancher un noeud gordien qui empoisonne actuellement tout le système politique.

Gaëlle F.

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