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Nicolas Darrot, l’apprenti sorcier

Publié le 02 septembre 2016 par Pantalaskas @chapeau_noir

Règne Analogue

A la Maison rouge à Paris Nicolas Darrot révèle une nouvelle fois ses penchants naturels pour une expérimentation suspecte en direction du vivant ou plutôt d’un vivant indéterminé dont on ne sait plus s’il s’agit du règne animal métamorphosé par l’apport de prothèses improbables ou d’un monde de la machine bouleversé au terme d’on ne sait trop quelle métempsychose par l’intrusion du vivant.

Dronecast Nicolas Darot

Dronecast Nicolas Darot

Sans y voir un mouvement concerté, on peut cependant observer que d’autres artistes de la même génération se livrent eux aussi à ces exercices coupables en perturbant nos repères : Anthony Duchêne propose des chimères inquiétantes, résultat d’une hybridation singulière entre le végétal et l’animal. Arnaud Cohen ramasse les cadavres encore frais d’animaux écrasés sur la route … pour les inclure dans ses sculptures en attendant qu’une nouvelle forme de vie se manifeste. L’usage de restes d’animaux par Benoit Huot pour les intégrer dans un cérémonial post-mortem joue également sur cette frontière.
C’est dire combien le travail de Nicolas Darrot participe d’une fascination pour cette perturbation du vivant qui donne « naissance » si l’on peut dire à un bestiaire indécis, résultat troublant de ce protocole proche d’une sorcellerie inavouée.
Si bien que la démarche d’un artiste se trouve elle même interpellée par ces pratiques inédites, propulsant la proposition artistique dans un univers là aussi indéterminé. Avec cette science qui n’en est pas une, sommes-nous proche de l’ « Encyclopédie critique en farce » décrite au sujet des entreprises illuminées de Bouvard et Pécuchet de Flaubert ?  Faut-il y voir la réponse des artistes aux avancées technologiques qui aujourd’hui savent produire une robotique si proche d’un comportement animal ?

Dronecast Nicolas Darot

Dronecast Nicolas Darot

Dronecast

C’est, me semble-t-il, cette interrogation sur la vocation même de l’artiste qui devient la question centrale de cette production singulière. Formé aux Beaux-Arts Nicolas Darrot s’est intéressé à l’électronique, aux effets spéciaux du cinéma, au point de devenir lui-même un personnage hybride fait de ce composé instable : artiste, entomologiste, roboticien, voire marionnettiste. A la Maison Rouge c’est une Galerie de l’évolution d’un nouveau genre qui nous est proposée avec la série des « Dronecast », « insectes guerriers, à mi-chemin entre le jouet et l’arme de guerre, (qui) rappellent les machines volantes de l’artiste belge Panamarenko ».
Peut-être faut-il chercher encore dans d’autres directions pour tenter de cerner ce que  le terme d’artiste signifie lorsqu’il se livre à un tel exercice ? Depuis le « Beau comme la rencontre d’un parapluie et d’une machine à coudre sur une table de dissection » de Lautréamont jusqu’aux super-héros hommes-machines issus des bandes dessinées contemporaines, le rêve d’une création surhumaine perdure au risque pour l’artiste de jouer à l’apprenti-sorcier incapable de contrôler ses propres créatures. De nos jours les drones guerriers n’ont rien d’illusoires et interviennent au quotidien dans les conflits du temps. L’artiste jouerait-il avec le feu en suggérant possibles ces « Dronecast » devenus dévastateurs si leur vie mécanique ou non participait à la stratégie délirante d’un nouveau Docteur Folamour ?

Photos: Nicolas Darrot

Nicolas Darrot
Règne Analogue Du 8 juillet au 18 septembre 2016
La maison rouge
10 boulevard de la Bastille
75012 Paris

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