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Comment bien gérer sa secte ?

Publié le 30 septembre 2016 par Edelit @TransacEDHEC

Comment bien gérer sa secte ?

Rares sont les secteurs qui s’épanouissent en temps de crise. Comme les fabricants de tabacs, les sectes font partie de ces exceptions qui parviennent à faire fructifier la morosité ambiante. Si toutes les sectes ne sont pas tournées vers la recherche du profit, des hommes comme Ron Hubbard ou Dieunedort Kamdem ont pondu de fascinantes machines spirituelles. Se remplir les poches de fric en remplissant des têtes de vide, voilà ce que permettent les sectes. L’équipe du Délit vous donne quelques clés pour vous lancer.

  

Bien choisir son terrain

     Il est crucial de bien choisir son point de départ pour une croissance rapide de votre culte. Une secte est une entreprise très particulière, qui s’épanouit dans la détresse ambiante. Si la plupart des entrepreneurs privilégient les zones économiques les plus dynamiques pour se lancer, il vous faudra prendre le contre-pied de cette tendance. La stagnation économique en Europe fait du continent une terre riche en opportunités pour les gourous en herbe. Eloignez-vous des pôles de compétitivité et soyez attentifs au chômage, à la pauvreté et la maladie : ce sont autant de facteurs qui favoriseront l’expansion de votre culte. De manière générale, plus une population est en détresse, plus elle constitue un terreau favorable à l’émergence de sectes. C’est d’ailleurs pour cela que la moitié Sud de l’Afrique foisonne de sectes en tous genres à l’Image de la Cathédrale de la Foi au Cameroun fondée il y a une dizaine d’année par Dieunedort Kamdem, un modèle de réussite sur lequel nous reviendrons.

S’inspirer des religions mais pas trop

    Une fois votre terrain de jeu choisi il est temps d’élaborer ce qui constituera l’essence de votre culte et ce qui le distinguera des autres hormis la volonté d’empocher un maximum d’argent sur le dos de vos fidèles. Pour cela il n’est pas nécessaire d’élaborer toute une mythologie ni d’inventer une histoire qui expliquerait l’univers de ses origines à nos jours. Il est plus efficace de partir d’une référence solide, présentez votre secte comme une nouvelle branche du christianisme, de l’islam ou de toute autre religion déjà bien implantée sur place. Vous pourrez alors vous reposer sur toute une base de personnes qui croient déjà en Dieu, il s’agit simplement de les persuader que leur foi a désormais un prix.

Néanmoins profiter de la crédibilité de religions séculaires ne suffit pas. Votre discours doit être adapté à vos proies. Insistez sur le côté communautaire et miraculeux de votre culte, vos victimes recherchent souvent de la compagnie et des solutions à leurs problèmes. Il est impératif d’inventer de nouveaux rituels, plus rock’n’roll que la messe du dimanche autrement personne ne vous prendra au sérieux. Il n’y a pas de limite au n’importe quoi dans ce domaine. Pour preuve, voilà à quoi ressemble une cérémonie de la Cathédrale de la Foi présidée par Dieunedort :

   https://www.youtube.com/watch?v=unSd1J9A74M

A première vue cette secte a l’air d’une sympathique boîte dans l’évènementiel à ceci près qu’elle chasse les clients les plus vulnérables. Ceux qui n’ont que la foi pour espérer, disposés à payer pour entendre un néo-prophète leur prescrire un miracle comme remède à leur misère.

Viser les faibles

    Il est maintenant temps de garnir les rangs de votre secte. Gardez en tête que vous êtes un vendeur de miracles, il faut donc viser prioritairement ceux qui sont à la fois suffisamment désespérés pour en avoir besoin et naïfs pour y croire. Une astuce consiste à monter parallèlement à votre culte une association fictive qui vous servira de tremplin de recrutement. Proposez-vous par exemple d’apporter un soutien psychologique aux malades dans les hôpitaux ou d’organiser des séances de méditations pour des patients en cure de désintoxication. Vous aurez ainsi accès à une audience particulièrement sensible au discours sectaire. Le démarchage personnalisé comme celui pratiqué par les témoins de Jéovah est une autre piste, l’important est de ne pas se présenter directement en tant que secte mais plutôt d’offrir aux personnes fragilisées une aide fictive qui ne sera en fait qu’un moyen de les manipuler.

Tirer le maximum des dons

    On en vient à l’étape la plus gratifiante pour un gourou. Vous avez fondé votre doctrine et recruté des adeptes, il est maintenant temps de profiter de vos efforts. Les dons des fidèles sont la source principale des revenus des sectes, le hic est qu’il doit reposer sur l’initiative spontanée du donneur pour être légal. Pour contourner la législation il faut donc inciter les fidèles par des contreparties. Le meilleur outil pour cela est de hiérarchiser vos fidèles, créer une véritable microsociété où les élites, ceux qui donnent le plus, sont récompensés de titres honorifiques ou responsabilités bidons. On peut citer comme exemple le gouvernement mondial des géniocrates , plus haute instance du mouvement raëlien qui, derrière ce nom pompeux, cache la crème des faibles d’esprits du culte. Pour intégrer ce gouvernement mondial qui ne gouverne rien d’autre que lui-même, le naïf doit être prêt à s’acquitter d’une dime s’élevant à 10% de ses revenus. Une méthode redoutable sur des personnes en manque de progrès social.

    Véritable impôt sous couvert d’offrandes, le don doit être central dans la pratique de votre culte. N’hésitez pas à lui donner un nom mystique comme « remerciement pour la lumière reçue » voire à menacer les radins en vous réappropriant la parole divine comme Dieunedort pour qui « si vous ne donnez pas 10% à Dieu, le Diable prendra 90% ».

Soigner son image de chef

    Pour vos fidèles, vous êtes en tant que gourou, une partie intégrante de la mythologie de votre secte, un modèle de réussite, celui dont il faut s’inspirer pour espérer améliorer sa vie de merde. Partant de là il ne faut pas hésiter à étaler la richesse que vous procure cette activité, une manière efficace d’accroître la frustration des suiveurs, le cœur de leur loyauté. Officialisez votre supériorité par un titre qui en jette. Dieunedort se présente ni plus ni moins comme le Général de Dieu, le croira qui veut mais ce qui est sûr c’est qu’il est bien à la tête d’une armée de 10 000 illuminés. La mégalomanie est un atout dans l’industrie sectaire.

Comment bien gérer sa secte ?

Monter la gamme de ses adeptes

    Après avoir recruté une masse conséquente de personnes en situation de précarité économique ou mentale qui formeront la couche basse de votre arnaque spirituelle, il est temps de s’entourer de cadres.

    En effet si vous avez l’ambition de dépasser le stade d’attroupement de marginaux il vous faut recruter des personnes plus à même d’évangéliser de nouveaux adeptes. Et ce n’est pas le ramassis de quarantenaires dépressifs au chômage recruté en premier lieu qui constituera des apôtres dignes de ce nom.

  Certaines professions en particuliers peuvent constituer de véritables atouts. Les professeurs, formateurs et autres conférenciers par exemple, de par l’aura qu’ils peuvent avoir sur leurs élèves, sont de véritables faire-valoir pour votre culte. Ils sont évidemment plus difficiles à convaincre mais le jeu en vaut la chandelle car si un docteur en histoire est capable de croire à vos conneries son diplôme apportera une certaine crédibilité à votre mythologie.

    De manière générale, toute personne exposée à des personnes immatures ou instables psychologiquement est à considérer. Un psychologue par exemple pourra garnir votre toute nouvelle école privée d’enfants en difficulté scolaire et du même coup les comptes de votre secte de l’argent de parents crédules.

Diversifier son arnaque

   Quand le gisement de débiles à portée de votre secte commence à se tarir, c’est qu’il est temps de proposer une offre marchande parallèlement aux dons comme relai de croissance à votre arnaque si bien partie. Pour ce faire, inutile de dépenser des millions en R&D, vendre des séances d’ « élévation de soi » ou des potions à base de plantes pour lutter contre le cancer suffiront amplement. Ce second axe de développement vise à extorquer de l’argent à tous ceux qui ne sont pas suffisamment cons pour croire en bloc à votre histoire de Paradis à 150/mois tout en étant assez désespérés pour penser qu’une crème au ginseng les soignera de leur tumeur du foie ou que des séances de méditation répétées sont à même de faire revenir leur ex-femme. De plus, il y a parmi vos fidèles une pléthore d’exclus du monde du travail qui ne demande qu’à se sentir utile. C’est une formidable opportunité pour votre secte qui pourra ainsi constituer une force de vente servile et bon marché.

    Les grandes entreprises doivent être des cibles prioritaires. La richesse des relations sociales qui y règne et le prestige qu’elles véhiculent donneront un coup de fouet à la propagation de vos idées. Pour les infiltrer, présentez votre secte comme une société de coaching ou toute autre activité qui vous permettra d’avoir un contact privilégié avec des salariés à la merci de votre propagande. C’est là que le recrutement des cadres supérieurs lors de l’étape précédente prend tout son sens. Ce sont eux qui pourront vendre les mérites de vos formations bidons aux dépens des véritables formateurs professionnels auprès de leur entreprise. Un jackpot pour votre secte qui y gagne à la fois de l’argent et une estrade pour son prosélytisme. C’est la méthode qu’a choisi d’employer la Scientologie via sa société de formation Landmark Education International qui propose des cours aux intitulés plus vagues les uns que les autres tel « expression et exploration de soi » qui ne sont que des façades cachant des rites d’initiation inspirés de la doctrine scientologue.

Se détendre…

Comment bien gérer sa secte ?

Enfin amusez-vous ! Gourou est un métier stressant qui demande beaucoup d’investissement, le tout entouré de cas sociaux qui n’arrêtent pas de vous demander pourquoi leur situation ne s’arrange pas. Néanmoins vous êtes le seul prestataire à n’offrir ni plus ni moins que le Paradis et cela comporte un certain nombre d’avantages. Il serait en effet regrettable de ne pas profiter de la masse d’illuminés qui vous suit pour vous divertir un peu. Faites leur faire des courses de roulades à poil dans le métro ou applaudir avec les pieds à la fin de chacune de vos phrases en leur expliquant que Dieu l’a voulu. Le septième ciel se mérite, à défaut d’y parvenir ces abrutis auront au moins réussi à égayer vos journées.


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