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Le jour où Sarkozy et Hollande sont partis (491ème semaine politique)

Publié le 01 octobre 2016 par Juan

Le jour où Sarkozy et Hollande sont partis (491ème semaine politique)  

Vendredi, les deux hommes se sont envolés dans le même avion, un Falcon, petit habitacle, proximité forcée, et tutoiement de rigueur. Ils partaient à destination d'Israël pour les funérailles de Shimon Perès. Et s'ils ne revenaient pas ? Pour quelque 80% des sondés de toutes les enquêtes d'opinion depuis un an, ce serait sans doute la meilleure des nouvelles de l'automne.

Désaveu... à deux
Entre 70 et 80% des sondés ne veulent pas d'une qualification de Sarkozy ou de Hollande pour la prochaine élection présidentielle française. Les deux hommes représentent la fin d'une époque, l'épuisement d'une démocratie.
Chacun à sa manière, Hollande et Sarkozy incarnent l'échec politique de cette dernière décennie.
François Hollande est le chirurgien-dentiste du navire PS. En deux décennies, dont un quinquennat à l'Elysée, il a dévitalisé le Parti Socialiste comme un dentiste le ferait avec une dent avariée. On attend qu'elle tombe. Il faudra sans doute qu'on l'arrache. Le PS risque la PASOKisation, c'est-à-dire une disparition politique et électorale rapide comme son ancien parti-frère en Grèce disparu l'année dernière.
On dénombrerait entre 1 et 3% de Français "très satisfaits" de Hollande d'après les sondages. C'est très faible en comparaison des scores de son rival de 2012.  Trop faible pour convaincre un plus large cercle une fois venu le temps du combat électoral. Chez ces ultra-fans, l'argument du complot général contre Hollande revient en force.
La campagne de dénigrement systématique par le biais de sondages sans fiabilité sert à entretenir la fable d'un @fhollande impopulaire. — Julien Norpois (@JNorpois) 29 septembre 2016
Ses proches confient aux chroniqueurs de cette fin de mandat qu'il conditionne "désormais" son éventuelle nouvelle candidature à une "baisse durable du chômage." Avec 52 000 demandeurs d’emplois supplémentaires en août pour la catégorie A (les sans-emplois), on se demande quand Hollande pourra constater une amélioration "durable" sur le terrain de l'emploi. Si sa candidature est réellement "conditionnée" à cela, abrégeons ce faux suspense: la candidature de François Hollande n'est pas tenable. 
Elle serait ridicule.
Autour de François Hollande, on se prépare à cette alternative. François Hollande, comme Nicolas Sarkozy, est mal entouré. Voici Manuel Valls qui organise un dîner de réflexion sur son éventuelle candidature en 2017. Emmanuel Macron, le jeune félon, débat dans les colonnes de Marianne avec Jean-François Kahn. Arnaud Montebourg cherche son destin. Pierre Moscovici a les mollets qui enflent comme une
Cette semaine, ses ministres font assaut de déclarations en tous genres pour "prouver" combien le dernier projet de budget est exemplaire d'un quinquennat réussi. Najat Vallaud-Belkacem peut se réjouit d'avoir satisfait la promesse de renfort des effectifs de l'Education nationale (+60 000 postes). Audrey Azoulay, à la Culture, se félicite d'un budget en hausse de 5%. Michel Sapin joue l'autosatisfaction à plein malgré des hypothèses de croissance déjà contestées. Marisol Touraine crie sa victoire sur le trou de la Sécu.
Après sa leçon de démocratie dans un discours réussi mais inconsistant avec son propre quinquennat voici 3 semaines, voici Hollande qui peaufine sa seconde intervention de pré-campagne. Cette fois-ci, elle viserait Alain Juppé, et serait axée sur les sujets sociaux. On rappellera à l'impétrant, par avance, quelques éléments de son propre bilan: sa funeste réforme sarkozyste des retraites, l'accord ANI transposé en loi, la loi travail trop douce pour le Medef, le gel des retraites, le quasi-gel des minima-sociaux. 
Reconnaissons à Hollande d'avoir anticipé le retour de la droite aux affaires: sa politique de l'offre - une massive et inédite baisse de charges sur le travail pour les entreprises - n'a servi à rien pour l'emploi ou le pouvoir d'achat. Un récent bilan du Comité de Suivi du CICE devrait achever de convaincre les indécis: "50.000 à 100.000 emplois créés ou sauvegardés" entre 2013 et 2014, soit "entre 200.000 à 400.000 euros par emploi créé et par an". En d'autres termes, grâce à François Hollande, nous savons que les programmes de Sarkozy, Juppé, Fillon, Le Maire et les autres sont économiquement absurdes et socialement injustes. 
Merci, donc, François.
La reconstruction de la gauche passe par l'élimination du passé.
Une élimination qu'il faut définitive.
Sarkozy, la fin ?
Il avait peaufiné son retour, trouvé les arguments-choc qui raviraient les médias ("nos ancêtres les Gaulois") et ramèneraient l'agenda politique sur lui (le climato-scepticisme) . Et patatras !
Sarkozy encaisse mal la publication cette semaine d'un ouvrage-confidence de son ancien très proche conseiller Patrick Buisson, "la cause du peuple, L'histoire interdite de la présidence Sarkozy." Sans rire ! Le livre fait des dégâts. Et pour cause, quand Buisson rapporte des propos, ce n'est pas du souvenir, mais de l'enregistrement sur bande.
"Si j'ai tout enregistré, c'est donc que ce que je dis est vrai" Patrick Buisson.

En 2014, Buisson est évacué du premier cercle sarkozyste quand le Canard Enchaîné et le Point révèlent qu'il enregistrait clandestinement ses conversations à l'Elysée. L'ancien rédacteur en chef de Minute, l'instigateur de cette radicalisation extrême-droitière de Sarkozy et de quelques autres comme Laurent Wauquiez, est également pris dans un autre scandale, qui lui a valu une mise en examen et une instruction toujours en cours: quand il était conseiller à l'Elysée, il facturait la République de sondages en tous genres, 1,5 millions d'euros pour 2007/2008; sondages dont certains étaient ensuite remis à quelques médias complaisants qui n'en révélaient pas l'origine. Aujourd'hui, Buisson déballe sa malle. La vengeance est aussi froide que l'homme. Sous sa plume, on entend Sarkozy déclarer partager des "valeurs communes" avec le Front national; traiter Chirac de "corrompu", Fillon de "pauvre type".
Les sarkozystes se rassurent en fustigeant l'homme qui était hier adoubé. Même Laurent Wauquiez, ancien chouchou de Buisson jusqu'il y a quelques mois, prend vite ses distances.
Mercredi, Bernard Squarcini, un autre proche de Nicolas Sarkozy, l'ancien patron du renseignement intérieur (sic!) termine quarante-huit de garde à vue par une mise en examen pour pour "violation du secret de l’enquête","trafic d’influence", "détournement de fonds publics", "faux en écriture publique et usage", "recel de violation du secret de l’instruction" et "atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l’autorité publique". Rien que ça ! La Justice enquête sur ses activités depuis 2012 et son retour dans le privé.
Et si Nicolas Sarkozy avait un problème d'entourage ?
Jeudi, quelque 3 millions de téléspectateurs regardent Envoyé Spécial sur France 2. L'un des derniers magazines télévisuels d'investigation d'un PAF décimé par la censure dévoile son enquête sur l'affaire Bygmalion. Elle est accablante. Elle contredit d'abord le mensonge effronté de Sarkozy sur la même chaîne quelques semaines auparavant: non, il n'a pas été lavé de tout soupçon ni même jugé sur son rôle dans cette affaire. Elle confirme ensuite, factures et témoignages des prestataires de la campagne pharaonique de Sarkozy en 2012 à l'appui, que Sarkozy a bien dépensé 18 millions de plus que le plafond légal autorisé. Enfin, elle ajoute une autre révélation: la fraude a été bien plus importante encore que les seules fausses facturations de Bygmalion. Avec quelques détails croustillants, comme ces 47 000 euros de maquillage ou les 86 000 euros de composition musicale sous-déclarés dans les comptes de campagne.
Au final, ce sont près de 50 millions d'euros qui aurait été dépensés par l'équipe Sarkozy pour sa réélection ratée.
Et ce n'est pas tout: les soupçons de financement occulte par la Libye de Kadhafi, révélés par Mediapart en 2010, se confirment avec la découverte du carnet d'un dignitaire libyen.
"Il y a un problème avec le service public mais on verra plus tard", Roger Karoutchi, ancien ministre de Sarkozy.
"Ça suffit !" Sur l'estrade de l'un de ses meetings, cette fois-ci à Chevilly, Sarkozy martèle une trentaine de fois un "ça suffit!" qui sonne évidemment à double sens.
Oui, ça suffit. Le premier tour de la primaire de droite se déroule le 20 novembre. L'hypothèse d'une élimination de Sarkozy fait trembler la Hollandie. Imaginez donc ! Certains s'imaginent encore dans les couloirs de l'Elysée que tout n'est pas perdu pour François Hollande si Sarkozy l'emporte sur Juppé. Mais l'inverse condamnerait les espoirs du président sortant.
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Ni Hollande ni Sarkozy ne correspondent plus à rien de majoritaire dans ce pays. Le premier a vidé le Parti Socialiste de l'intérieur. Le second a décroché la droite gouvernementale de la République. Pourtant, grâce au découragement d'une majorité du pays et un mode de scrutin majoritaire obsolète, c'est bien ce duel de premier tour que l'on nous promet.
.@NicolasSarkozy sera à #Toulouse le 5/10 à 14h pour dédicacer son livre, #ToutPourLaFrance ! Nous vous attendons nombreux ! pic.twitter.com/q7Y0950YAC — Laurence Arribagé (@LArribage) 29 septembre 2016

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