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Moi et les Autres Petites Personnes on vourdrait savoir pourquoi on n'est pas dans le livre de Perrine Rouillon - petite chronique !

Publié le 07 octobre 2016 par 7bd @7BD
Couverture de Moi et les Autres Petites Personnes on vourdrait savoir pourquoi on n'est pas dans le livre de Perrine Rouillon Titre: Moi et les autres petites personnes on voudrait savoir pourquoi on n'est pas dans le livre Auteurs : Perrine Rouillon (scénario et dessin) Editeur : Editions Thierry Marchaisse Année : 2016 Pages : 176 Résumé : La petite personne prend vie sous nos yeux et interpelle son créateur, ou plutôt sa créatrice, l'auteure Perrine Rouillon, qui va échanger avec elle. Va venir se greffer à la discussion au fur et à mesure des pages une galerie de personnages secondaires autant physiques, comme l'amoureux, que métaphysiques, comme la mort ou la vie, voire abstrait, comme le point final ! Et tout ce petit monde a beaucoup de choses à se dire, et par la même occasion à nous dire... Mon avis : Perrine Rouillon nous offre de courte histoires, certaines durant le temps d'une question et d'autres prenant quelques dessins, voire même quelques pages. Et j'ai trouvé très agréable de plonger dans cette univers épuré où l'auteure, par moments, arrive même à jouer habilement avec la page, cette fameuse « méta-case » comme aimait à l'appeler Will Eisner. Cette BD m'a offert de beaux moments et quelques questionnements. Oui, j'ai écrit BD. En effet, ce recueil est présentée comme relevant de l'« Ecriture Dessinée ». A mes yeux, on reste dans la BD. Peut-être que l'appellation Ecriture Dessinée comme celle de Roman Graphique trouve son origine dans les fines nuances du marketing. En effet, la BD ayant été pendant de longues décennies associée à l'univers des enfants, quand les histoires s'adressant à des publics plus mûrs arrivèrent, il fallut bien les démarquer pour que le dit public puisse dire fièrement « Je lis des Romans graphiques » et non « Je lis de la BD », sous le rire des ignorants qui concluaient en disant « ouah, l'autre, il lit des petits miquets ». Et comme dire « Je lis des BD pour adultes » prend tout de suite une connotation « oh, l'autre, il lit des BD interdites aux moins de dix-huit ans », sont alors arrivés les dénominations de Romans Graphiques, récits complets, BD historiques et autres.
A mes yeux, l'œuvre de Perrine Rouillon correspond tout à fait à une BD, à savoir une suite de dessins qu'on parcourt à son rythme et dont la lecture complète fait ressortir le sens (même si parfois ce sens est l'absence de sens). Le choix de ne pas mettre de cases, de phylactères, n'en fait pas moins une BD. L'utilisation de l'espace de la page dans la narration n'en fait pas moins une BD. Et le format livre n'en fait pas moins une BD. Quant au sujet, peu importe, ce n'est pas lui qui va nous aider à trancher ce débat, puisque une œuvre artistique peut traiter de tout, qu'elle soit film, peinture, sculpture ou... BD ! Et penchons-nous donc sur le sujet, de quoi nous parle cette petite personne ? Sorte d'Eve créée par un démiurge en mal d'inspiration, la petite personne se cherche, partage ses questionnements avec l'auteur, tente de marquer son indépendance, développe sa volonté, et comme tout être humain lâché dans un monde vide de sens, elle veut – ou pas, selon les moments – trouver un sens à tout ça. En fait, cette petite personne pourrait être un reflet de l'humanité ramené à une ligne froissée. Une humanité qui aurait la possibilité d'échanger directement avec son créateur, enfin, sa créatrice dans ce cas, pour avoir les réponse à ses questions. Et le souci, d'où naît l'humour, c'est que les questions de la petite personne, ses exigences, bousculent sa créatrice jusqu'à ses derniers retranchements ! Imaginez que Dieu nous réponde et qu'il hésite, cherche ses mots, ne soit pas sûr d'avoir bien fait. En fait, imaginez que Dieu soit beaucoup plus humain que divin, et vous comprendrez les affres traversées par la Petite Personne ! Heureusement, la distanciation imposée par le style de Perrine Rouillon permet d'apporter cette dose d'humour, à la frontière de l'absurde, qui empêche ces histoires de basculer dans la philosophie sérieuse et prise de tête – passez-moi l'expression. En tant que lecteur, je ris, je m'interroge sur certaines histoires, parfois sans trouver de réponses ou de sens, je trouve des idées lumineuses de finesses, en fait, je pense en m'amusant. Ce qui aurait probablement déplu à Platon. Mais Platon n'est plus, alors que la Petite personne, elle, est bien vivante. Euh... Enfin, tout est relatif ! Page extraite de Moi et les Autres Petites Personnes on vourdrait savoir pourquoi on n'est pas dans le livre de Perrine Rouillon La Petite Personne a bien des exigences ! Et cette petite Personne nous apparaît bien vivante grâce à ses paroles et ses réflexions, mais aussi par son apparence. Bien que ressemblant de prime abord à un quelconque gribouillis, l'œil repère vite l'être dans la Petite Personne. Et cet enchevêtrement de lignes prend vie, s'assoit, boude, croise les bras, s'attrape la jambe et devient tout à fait compréhensible par le lecteur. Au bout d'un moment, on pourrait presque dire qu'on discerne sa petite moue ! L'épure repose sur l'inexistence d'autre chose sur la page que la Petite Personne et éventuellement ses compagnons de jeu, ou de vie. Pas de décors, pas de case, pas de couleur. Juste les interventions de l'auteure dans une police différente de celle des personnages. Et les personnages secondaires sont eux aussi esquissés, comme des ébauches, et pourtant bien lisibles – ou perceptibles, puisque la petite personne en vient même à regretter d'être lisible, tel un mot ! - Les histoires occupent souvent le recto d'une page, tandis que le verso reste vierge. Mais Perrine Rouillon s'autorise même à jouer avec cette règle qu'elle semble installer tranquillement, de page en page. Et tout d'un coup, de temps en temps, sur le verso, apparaît... une Petite Personne ! Le jeu est difficile et le challenge élevé ! Pour ma part, beaucoup d'histoires m'ont surprise et touchée, d'autres m'ont laissé perplexe mais je suis gré à Perrine Rouillon d'avoir exploré son idée et surtout d'avoir gardé le cap jusqu'à la fin de l'histoire. Maintenir sa petite personne en état de surprendre pendant tout un recueil n'est pas gageure évidente. Et l'introduction de personnages secondaires aide parfois à éviter que la machine ne s'essouffle. Surtout quand le caractère de ces personnages se révèle savoureux et leurs remarques fort amusantes. Notons que ce n'est pas là le coup, d'essai de Perrine Rouillon. Il faut remonter à 1995 pour découvrir « La Petite Personne », aux éditions 813, premier opus mettant en scène cette écriture incarnée, ce personnage d'encre et de sang, ce fichu petit caractère qui tourmentera sa créatrice pendant les années suivantes jusqu'en 2016, où paraît l'ouvrage dont je vous ai parlé ici. Ne voyez pas ce livre comme une expérience unique, mais bien comme le développement de la pensée d'une auteure, qui, au fil des ans, prend du poids, ou plutôt devrais-je dire, prend de l'encre pour nous délivrer son propos. Mais voici venu le temps de conclure. Personnellement, je maintiens que c'est bien une BD qui se cache derrière ce terme d '« Ecriture Dessinée » - mais peut-être qu'il faut simplement voir Ecriture Dessinée comme étant l'état-civil de la Petite Personne, nom : Dessinée, prénom : Ecriture et là, cette classification qui n'en est plus une prend tout son sens -, une BD inventive, touchante, visant souvent juste même si parfois la cible est manquée de peu. Et c'est une belle œuvre que nous offre Perrine Rouillon, errant loin des sentiers battus, titillant notre réflexion et le tout sans compromis. Une œuvre qui se place logiquement dans la continuité de son grand œuvre, mélange alchimique où ce petit Golem d'encre et de papier se retourne non pas contre mais vers son créateur. Alors rendez-vous donc chez votre libraire pour allez jeter un œil et voir si vous aurez envie de partager quelques moments avec ces Petites Personnes, qui, malgré les apparences d'un titre trompeur, sont bien dans le livre ! Zéda rencontre La Petite Personne... Moi et les Autres Petites Personnes on vourdrait savoir pourquoi on n'est pas dans le livre de Perrine Rouillon - petite chronique ! David
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