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À toutes les Faïza….

Publié le 09 octobre 2016 par Particommuniste34200

wp-1476049213119.jpegElle s’appelle Faïza1. Elle a de beaux yeux noirs en amande, bordés de khôl. En la regardant, on pourrait se croire dans un conte des mille et une nuits….

Mariée à un français d’origine marocaine

, Faïza arrive en France en 2002, où elle a envie de vivre en femme libre. Mais pas de chance : son mari est alcoolique… Il a des sautes d’humeur, perd son travail, la bat.

Alors Faïza, pétrie de honte se sauve, obtient le divorce et perd en rompant son mariage le titre de séjour obtenu comme conjointe de français.

2004…2005…2006… C’est la galère.

D’hébergement d’urgence en logement précaire, ballottée d’un foyer charitable à un autre au gré de la tolérance du chef de famille, elle peine à conserver son beau sourire.

Les petits boulots, même mal payés se font de plus en plus rares au fil du temps qui passe.

D’année en année, les demandes de régularisation sont déposées sans succès auprès de la Préfecture qui lui refuse obstinément le droit au séjour, malgré les longues années passées à Sète auprès de sa sœur qui y réside.

2007…2008…2009…Le temps s’écoule, la galère encore et les procédures…. Faïza est toujours sans papiers.

C’est alors qu’elle fait une jolie rencontre: le monsieur n’est plus très jeune, c’est vrai, mais il est gentil. Elle est douce et bonne cuisinière. Ils décident d’officialiser leur union et les bans sont publiés. Hélas Faïza n’a décidément pas de chance : le futur époux succombe à un infarctus quatre jours avant de conduire sa promise devant Monsieur le Maire !

Pendant quelques mois pourtant, la vie avait enfin semblé sourire à Faïza …

2010… 2011… 2012… 2013… Voilà qu’un « ami » propose de rendre service à Faïza : « Si tu veux, je peux t’aider, on se marie et tu pourras avoir des papiers ».

Plus de dix ans passés à demander une régularisation qu’on ne lui accorde pas, dix ans de désespoir, une vie qui n’en est pas une : la proposition est tentante et Faïza n’y résiste pas longtemps. Elle possède quelques économies amassées jour après jour, et ne trouve pas grand chose à objecter aux demandes de compensation financière qui lui sont faites par cet homme (mais en est-ce vraiment un?…) qui profite si lâchement de son désarroi.

Il ne reste bientôt plus rien du maigre pécule de Faïza lorsque, est-ce un hasard, le couple est convoqué par la Police pour suspicion de mariage blanc 2.

Là, tout va très vite : l’ex futur marié est évacué par une porte, tandis qu’on fait sortir Faïza par une autre, munie d’une décision d’expulsion du territoire en bonne et dûe forme vers un pays qu’elle a quitté il y a plus de dix ans.

La sanction pour elle est immédiate et aucun procès verbal de sa déposition ne lui sera remis.

Le faux ami quant à lui a disparu dans la nature, sans être inquiété le moins du monde.

Nous avons accompagné Faïza à l’aéroport, en silence, et nous avons attendu avec elle l’heure de l’embarquement.

Un dernier geste du bras levé, un dernier baiser envoyé de sa main, et Faïza a disparu dans la file des voyageurs, escortée par un policier ému.
Il y a quelques jours, Faïza est morte.

On l’a trouvée dans son lit au petit matin, dans la maison de son frère qui l’avait recueillie à son retour au pays.
Elle s’appelait Faïza. Elle avait de beaux yeux noirs en amande, bordés de khôl.

JL



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