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A la croisée des brides, de Françoise Matthey

Publié le 16 novembre 2016 par Francisrichard @francisrichard
A la croisée des brides, de Françoise Matthey

Il y a désormais une autre manière de dire que l'on est à un tournant de sa vie. On peut en effet dire, pour peu que l'on en vienne à vivre dans la familiarité des chevaux et dans un pays qui ne cesse d'adhérer depuis des siècles à [leur] loi, que l'on est A la croisée des brides.

A cette croisée singulière, et poétique, se trouvent une jument et un pays, l'une habitant l'autre, l'une se mêlant à l'autre, au point que, sous la plume de Françoise Matthey, le vocabulaire qui précise l'une enrichit celui de l'autre et lui donne à voir des perspectives cavalières. 

La poétesse parle ainsi, au détour de ses poèmes, d'une ruade de bourrasques qui étourdit ses pas, de chevaucher la lune, de longes feutrées de son histoire outrageusement malmenée, d'apprivoiser le hennissement des troubles, de congédier les étriers familiers de l'enfance...

Le recueil est bien le témoignage d'une rencontre, celle apaisante de la poétesse avec une jument et un pays: elle peut toucher l'une de sa main tremblante, sans l'émouvoir, et se laisser ensemencer lentement par l'autre, découvrir le second en se mettant en selle sur la première:

L'humble complicité du pas qui suggère

et de l'aube qui éclaire

a suffi

à délier l'allant

Mais la poétesse n'est pas seule à se retrouver à la croisée des brides. Une fillette arrivée depuis les frontières australes rencontre à son tour la jument vers laquelle elle a dirigé son pas osé, et nul ne devina son émoi ni même son sourire peut-être lorsqu'elle [la] vit:

Gardienne d'un secret chuchoté entre lèvres et naseaux

l'allégresse triompha

Oubliée la brûlure des pierres

la danse des exils

Il s'agit en quelque sorte de la transmission d'une joie immanente, qui étonne et dont la jument au regard noisette fait bénéficier la fillette, après en avoir abondé la poétesse. Rien ne les sépare désormais l'une et l'autre et le programme de leur relation est dès lors tout écrit:

A l'orée des lisières qui engagent

apprendre encore et encore

comprendre peut-être

offrir

aimer surtout

Nul amour n'amoindrit

Francis Richard

A la croisée des brides, Françoise Matthey, 52 pages L'Aire


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