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Que ceux qui ne peuvent pas mourir lèvent la main – #1

Par Artemissia Gold @SongeD1NuitDete

C’est avec plaisir (et beaucoup d’appréhension :p) que je vous présente le premier chapitre de Que ceux qui ne peuvent pas mourir lèvent la main. Vous pourrez retrouver les aventures de Gabriel et Rose tous les mardis. Bonne lecture!

Que ceux qui ne peuvent pas mourir lèvent la mainRésumé :

1887

Que faire d’une insupportable adolescente de 16 ans quand on est un immortel chargé d’éliminer des créatures maléfiques pour le compte d’une Confrérie secrète ? En épargnant la vie de Rose, Gabriel a enfreint les règles de la Saint- Vehme et celle-ci ne plaisante pas avec les entorses à son règlement. Contraint d’entraîner la jeune fille sur l’une de ses enquêtes, l’immortel va devoir découvrir quelle créature sévit aux abords d’un village isolé de Bretagne, mais aussi garder un œil sur son intrépide protégée devenue la cible de la redoutable Confrérie.

CHAPITRE 1
Paris – 1887

Depuis qu’elle était au service de Gabriel Voltz, Rose avait appris une chose essentielle, voire vitale : sortir à la nuit tombée dans Paris était la plus mauvaise idée qui soit. En s’engouffrant dans le boyau sombre et étroit du passage du Pont-neuf, la jeune fille maudit à voix haute son insupportable employeur qui l’obligeait à emprunter ce genre de coupe-gorge à minuit. Les quelques malheureux becs de gaz  parvenaient à peine à éclairer les vitrines des boutiques de part et d’autre du passage long d’une cinquantaine de mètres. La moindre ombre, le plus petit bruit suspect la faisaient accélérer malgré les semelles usées de ses bottines qui glissaient sur les dalles irrégulières et humides. A plusieurs reprises, elle manqua de se rompre les chevilles. A bout de souffle d’avoir remonté en courant la rue du Pont Neuf, elle se refusa toutefois à ralentir le pas. Au dessus de sa tête, la pluie frappait la verrière opaque. Ce martèlement lugubre lui arrachait des frissons et Rose accueillit avec un soulagement certain les rires gras qui provenaient de l’extrémité du passage. Quelques gentilshommes, vêtus de haut-de-forme et de capes sombres, convergeaient le long de la rue Mazarine vers  une seule et même adresse. A l’heure où le théâtre, l’opéra ou autres soirées mondaines prenaient fin, ces messieurs – fidèles à leurs rendez-vous hebdomadaires plus qu’à leurs épouses – avaient délaissé ces dernières pour d’autres plaisirs que leur fournissait Madame Constance, maquerelle autoritaire de La Fleur Blanche.

L’entrée de l’établissement se faisait par un large porche ouvert. Au fond d’une cour fermée, un attroupement s’était constitué devant la porte gardée par un garde chiourme imposant attifé d’une livrée rouge, assortie à la porte dont il protégeait farouchement l’accès. Rose risqua le bout du nez sous le porche et étira le cou pour observer les lieux. Une grimace fronça son nez mutin. L’envie de rebrousser chemin la prit de nouveau. Si le mystérieux visiteur qui avait fait irruption une heure plus tôt à la demeure pour requérir un entretien urgent avec Monsieur Voltz ne lui avait pas fichu une trouille monumentale, elle l’aurait sans doute fait. Mais l’homme, un ecclésiastique à la mine patibulaire, avait l’air aussi patient que compatissant. Sommée de lui ramener son maître dans l’heure, l’adolescente n’avait eu d’autre choix que d’affronter les ruelles sombres et peu avenantes qui conduisaient à La Fleur Blanche. Rose respira profondément les effluves traînantes de parfum mêlées à l’humidité de la cour qui parvenaient jusqu’à elle pour se donner du courage. Elle bomba son maigre torse, tira sur le jupon de sa robe et tenta de remettre un minimum d’ordre dans ses boucles rousses, sans cesse décoiffées, dissimulées sous la capuche de sa cape trempée. Sous les regards dubitatifs des hommes patientant devant la porte, la jeune fille se faufila au milieu des manteaux et des cannes hors de prix jusqu’au planton en rouge. Son seul œil valide, surmonté d’un épais sourcil noir, s’écarquilla quand il vit immerger de l’attroupement l’adolescente maigrichonne de 16 ans vêtue d’une robe sombre de servante.

— Je dois parler à Monsieur Voltz, annonça-t-elle.

— Monsieur Voltz est occupé.

Un sourire goguenard égaya la face grêlée du Cerbère. Déjà passablement agacée par cette sortie nocturne, ses airs condescendants horripilèrent Rose. Cette dernière sentit  la moutarde lui monter au nez. D’autant que sa présence devant cette porte avait l’air de beaucoup amuser les clients qui l’entouraient de beaucoup trop près à son goût. Quelques boutades échangées entre eux en firent rire quelques uns aux éclats. Même si elle n’entendit pas leur teneur, impossible d’ignorer qu’elle en était la cible. Furibonde et les lèvres pincées, elle colla ses poings sur les hanches et se retint de laisser fuser le langage fleuri qu’elle maîtrisait à merveille.

— Eh bien, interrompez-le ! C’est urgent !

… « face de coprolithe » ajouta-t-elle mentalement. Rose n’était pas certaine du sens du mot. Elle l’avait entendu une fois de la bouche de son maître et, à la réaction de celui à qui l’expression était adressée, en avait déduit que l’insulte devait être vexante. Face à la détermination de la demi-portion, le cerbère fit un bref effort de réflexion, puis entrouvrit la porte derrière lui. Des éclats de rire exagérés et des odeurs affriolantes de nourriture et de parfums s’échappèrent de l’embrasure. L’homme appela et échangea quelques mots avec une interlocutrice que Rose ne vit pas avant de refermer la porte.

— Dégage de là et va attendre plus loin, lui ordonna-t-il d’un geste autoritaire du bras.

Rose obtempéra de bonne grâce et trouva refuge sous le porche. Après sa course folle, le froid saisissant de ce début de mois de février la tétanisa. Un courant d’air glacial s’engouffrait dans ce couloir ouvert. Trempée, la jeune fille sautilla sur place pour se réchauffer et compta machinalement les futurs clients qui passaient devant elle. Elle attendit ainsi un bon quart d’heure en pestant entre ses dents. Soudain, la porte rouge s’ouvrit en grand pour laisser passer un échalas tout juste trentenaire parlant fort et faisant de grands gestes pour saluer ses hôtesses dont les exclamations faussement énamourées étaient tout aussi peu discrètes. Gabriel Voltz fendit le groupe, gesticulant pour enfiler son manteau. Il enfonça son haut-de-forme sur sa tignasse noire en bataille. Encombré de sa canne, il faillit bien assommer sur son passage quelques clients.

— Par tous les diables, Rose ! J’espère que tu as une bonne excuse pour être venue jusqu’ici ! tempêta –t-il en lançant ses grandes jambes à l’assaut des pavés de la cour.

— Bien sûr que non ! J’ai eu une envie subite de prendre l’air et je me suis dit « Tiens si j’allais dans le lieu de débauche favori de mon maître, histoire de me geler les miches pendant qu’il finit ses petites affaires » !

Furieuse, la jeune fille se retint de lui envoyer son pied dans les tibias à défaut de pouvoir atteindre une autre partie de son anatomie. Le regard acier de Gabriel se plissa d’agacement. Il pointa le pommeau d’argent de sa canne non loin du nez arrogant de sa protégée :

— Tu es la créature la plus insupportable qu’il m’ait été donné de croiser depuis des siècles ! chuchota-t-il entre ses dents serrées pour que ses propos ne soient pas entendus.

— Vu vos fréquentations, ça m’étonnerait ! D’ailleurs, l’une d’elles vous attend à la maison. Elle vous fait demander. Ça a l’air urgent.

L’exaspération de Gabriel retomba d’un coup. Empoignant le bras de la jeune fille, il l’entraîna dans la rue, loin d’oreilles indiscrètes. Des visites nocturnes n’étaient jamais annonciatrices de bonnes nouvelles dans sa profession. Ils marchèrent d’un bon pas sur une dizaine de mètres, puis s’engouffrèrent dans le passage du Pont-Neuf. Rose peinait à suivre les longues enjambées de son protecteur. Arrivés au milieu du corridor, Gabriel lâcha son bras.

— Dis-moi tout, l’exhorta-t-il tout en poursuivant son chemin, l’adolescente sur ses talons.

— Je n’ai pas retenu son nom…

— Je t’ai déjà dit de ne faire entrer personne en mon absence !

— Ce n’est pas moi c’est cette andouille de gouvernante ! Mais il n’y a pas à s’inquiéter : c’est un prêtre…

Gabriel s’arrêta si brusquement que Rose lui entra dedans. Son visage fermé quand il se retourna ne la rassura pas le moins du monde.

— Barnabas Varga ? tenta-t-il d’une voix sourde.

Inquiète, Rose acquiesça d’un mouvement de tête. Il ne l’interrogea pas davantage. Il fit volte-face et reprit sa marche trop rapide pour la jeune fille qui fut contrainte de trottiner pour rester plus au moins à sa hauteur.

— Quel est le problème ? Ce n’est qu’un prêtre.

— Tu connais l’expression « L’habit ne fait pas le moine » ? Eh bien, jamais formule n’a collé aussi bien à un personnage qu’à Barnabas Varga.

Couverture par Erica Petit Illustrations

Toute reproduction totale ou partielle du texte est interdite sans l’autorisation de l’auteur

C’est avec plaisir (et beaucoup d’appréhension :p) que je vous présente le premier chapitre de Que ceux qui ne peuvent pas mourir lèvent la main. Vous pourrez retrouver les aventures de Gabriel et Rose tous les mardis. Bonne lecture!

Que ceux qui ne peuvent pas mourir lèvent la mainRésumé :

1887

Que faire d’une insupportable adolescente de 16 ans quand on est un immortel chargé d’éliminer des créatures maléfiques pour le compte d’une Confrérie secrète ? En épargnant la vie de Rose, Gabriel a enfreint les règles de la Saint- Vehme et celle-ci ne plaisante pas avec les entorses à son règlement. Contraint d’entraîner la jeune fille sur l’une de ses enquêtes, l’immortel va devoir découvrir quelle créature sévit aux abords d’un village isolé de Bretagne, mais aussi garder un œil sur son intrépide protégée devenue la cible de la redoutable Confrérie.

CHAPITRE 1
Paris – 1887

Depuis qu’elle était au service de Gabriel Voltz, Rose avait appris une chose essentielle, voire vitale : sortir à la nuit tombée dans Paris était la plus mauvaise idée qui soit. En s’engouffrant dans le boyau sombre et étroit du passage du Pont-neuf, la jeune fille maudit à voix haute son insupportable employeur qui l’obligeait à emprunter ce genre de coupe-gorge à minuit. Les quelques malheureux becs de gaz  parvenaient à peine à éclairer les vitrines des boutiques de part et d’autre du passage long d’une cinquantaine de mètres. La moindre ombre, le plus petit bruit suspect la faisaient accélérer malgré les semelles usées de ses bottines qui glissaient sur les dalles irrégulières et humides. A plusieurs reprises, elle manqua de se rompre les chevilles. A bout de souffle d’avoir remonté en courant la rue du Pont Neuf, elle se refusa toutefois à ralentir le pas. Au dessus de sa tête, la pluie frappait la verrière opaque. Ce martèlement lugubre lui arrachait des frissons et Rose accueillit avec un soulagement certain les rires gras qui provenaient de l’extrémité du passage. Quelques gentilshommes, vêtus de haut-de-forme et de capes sombres, convergeaient le long de la rue Mazarine vers  une seule et même adresse. A l’heure où le théâtre, l’opéra ou autres soirées mondaines prenaient fin, ces messieurs – fidèles à leurs rendez-vous hebdomadaires plus qu’à leurs épouses – avaient délaissé ces dernières pour d’autres plaisirs que leur fournissait Madame Constance, maquerelle autoritaire de La Fleur Blanche.

L’entrée de l’établissement se faisait par un large porche ouvert. Au fond d’une cour fermée, un attroupement s’était constitué devant la porte gardée par un garde chiourme imposant attifé d’une livrée rouge, assortie à la porte dont il protégeait farouchement l’accès. Rose risqua le bout du nez sous le porche et étira le cou pour observer les lieux. Une grimace fronça son nez mutin. L’envie de rebrousser chemin la prit de nouveau. Si le mystérieux visiteur qui avait fait irruption une heure plus tôt à la demeure pour requérir un entretien urgent avec Monsieur Voltz ne lui avait pas fichu une trouille monumentale, elle l’aurait sans doute fait. Mais l’homme, un ecclésiastique à la mine patibulaire, avait l’air aussi patient que compatissant. Sommée de lui ramener son maître dans l’heure, l’adolescente n’avait eu d’autre choix que d’affronter les ruelles sombres et peu avenantes qui conduisaient à La Fleur Blanche. Rose respira profondément les effluves traînantes de parfum mêlées à l’humidité de la cour qui parvenaient jusqu’à elle pour se donner du courage. Elle bomba son maigre torse, tira sur le jupon de sa robe et tenta de remettre un minimum d’ordre dans ses boucles rousses, sans cesse décoiffées, dissimulées sous la capuche de sa cape trempée. Sous les regards dubitatifs des hommes patientant devant la porte, la jeune fille se faufila au milieu des manteaux et des cannes hors de prix jusqu’au planton en rouge. Son seul œil valide, surmonté d’un épais sourcil noir, s’écarquilla quand il vit immerger de l’attroupement l’adolescente maigrichonne de 16 ans vêtue d’une robe sombre de servante.

— Je dois parler à Monsieur Voltz, annonça-t-elle.

— Monsieur Voltz est occupé.

Un sourire goguenard égaya la face grêlée du Cerbère. Déjà passablement agacée par cette sortie nocturne, ses airs condescendants horripilèrent Rose. Cette dernière sentit  la moutarde lui monter au nez. D’autant que sa présence devant cette porte avait l’air de beaucoup amuser les clients qui l’entouraient de beaucoup trop près à son goût. Quelques boutades échangées entre eux en firent rire quelques uns aux éclats. Même si elle n’entendit pas leur teneur, impossible d’ignorer qu’elle en était la cible. Furibonde et les lèvres pincées, elle colla ses poings sur les hanches et se retint de laisser fuser le langage fleuri qu’elle maîtrisait à merveille.

— Eh bien, interrompez-le ! C’est urgent !

… « face de coprolithe » ajouta-t-elle mentalement. Rose n’était pas certaine du sens du mot. Elle l’avait entendu une fois de la bouche de son maître et, à la réaction de celui à qui l’expression était adressée, en avait déduit que l’insulte devait être vexante. Face à la détermination de la demi-portion, le cerbère fit un bref effort de réflexion, puis entrouvrit la porte derrière lui. Des éclats de rire exagérés et des odeurs affriolantes de nourriture et de parfums s’échappèrent de l’embrasure. L’homme appela et échangea quelques mots avec une interlocutrice que Rose ne vit pas avant de refermer la porte.

— Dégage de là et va attendre plus loin, lui ordonna-t-il d’un geste autoritaire du bras.

Rose obtempéra de bonne grâce et trouva refuge sous le porche. Après sa course folle, le froid saisissant de ce début de mois de février la tétanisa. Un courant d’air glacial s’engouffrait dans ce couloir ouvert. Trempée, la jeune fille sautilla sur place pour se réchauffer et compta machinalement les futurs clients qui passaient devant elle. Elle attendit ainsi un bon quart d’heure en pestant entre ses dents. Soudain, la porte rouge s’ouvrit en grand pour laisser passer un échalas tout juste trentenaire parlant fort et faisant de grands gestes pour saluer ses hôtesses dont les exclamations faussement énamourées étaient tout aussi peu discrètes. Gabriel Voltz fendit le groupe, gesticulant pour enfiler son manteau. Il enfonça son haut-de-forme sur sa tignasse noire en bataille. Encombré de sa canne, il faillit bien assommer sur son passage quelques clients.

— Par tous les diables, Rose ! J’espère que tu as une bonne excuse pour être venue jusqu’ici ! tempêta –t-il en lançant ses grandes jambes à l’assaut des pavés de la cour.

— Bien sûr que non ! J’ai eu une envie subite de prendre l’air et je me suis dit « Tiens si j’allais dans le lieu de débauche favori de mon maître, histoire de me geler les miches pendant qu’il finit ses petites affaires » !

Furieuse, la jeune fille se retint de lui envoyer son pied dans les tibias à défaut de pouvoir atteindre une autre partie de son anatomie. Le regard acier de Gabriel se plissa d’agacement. Il pointa le pommeau d’argent de sa canne non loin du nez arrogant de sa protégée :

— Tu es la créature la plus insupportable qu’il m’ait été donné de croiser depuis des siècles ! chuchota-t-il entre ses dents serrées pour que ses propos ne soient pas entendus.

— Vu vos fréquentations, ça m’étonnerait ! D’ailleurs, l’une d’elles vous attend à la maison. Elle vous fait demander. Ça a l’air urgent.

L’exaspération de Gabriel retomba d’un coup. Empoignant le bras de la jeune fille, il l’entraîna dans la rue, loin d’oreilles indiscrètes. Des visites nocturnes n’étaient jamais annonciatrices de bonnes nouvelles dans sa profession. Ils marchèrent d’un bon pas sur une dizaine de mètres, puis s’engouffrèrent dans le passage du Pont-Neuf. Rose peinait à suivre les longues enjambées de son protecteur. Arrivés au milieu du corridor, Gabriel lâcha son bras.

— Dis-moi tout, l’exhorta-t-il tout en poursuivant son chemin, l’adolescente sur ses talons.

— Je n’ai pas retenu son nom…

— Je t’ai déjà dit de ne faire entrer personne en mon absence !

— Ce n’est pas moi c’est cette andouille de gouvernante ! Mais il n’y a pas à s’inquiéter : c’est un prêtre…

Gabriel s’arrêta si brusquement que Rose lui entra dedans. Son visage fermé quand il se retourna ne la rassura pas le moins du monde.

— Barnabas Varga ? tenta-t-il d’une voix sourde.

Inquiète, Rose acquiesça d’un mouvement de tête. Il ne l’interrogea pas davantage. Il fit volte-face et reprit sa marche trop rapide pour la jeune fille qui fut contrainte de trottiner pour rester plus au moins à sa hauteur.

— Quel est le problème ? Ce n’est qu’un prêtre.

— Tu connais l’expression « L’habit ne fait pas le moine » ? Eh bien, jamais formule n’a collé aussi bien à un personnage qu’à Barnabas Varga.

Couverture par Erica Petit Illustrations


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