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La difficile défense de Jean-François Copé face au « Point »

Publié le 28 février 2014 par Marie38

Au lendemain des révélations du Point sur les liens entre Jean-François Copé et la société Bygmalion qui aurait surfacturé des prestations à l’UMP, le président du parti se défend.

Invité, vendredi 28 février d’Europe 1, M. Copé s’est défendu point par point.

  • Le ministre du budget et les biens immobiliers de l’Etat

Ce qu’il a dit : « Je n’ai jamais eu à connaître des ventes organisées par France domaine de l’immobilier de l’Etat. »

Pourquoi c’est faux : Vérifier les propos des personnalités politiques n’est pas toujours chose aisée. Les frontières sont minces entre le vrai, le faux, l’exagération, l’oubli – volontaire ou non – ou encore l’imprécision… Mais il est des cas où l’on peut oublier ces nuances. Ainsi en est-il de la sortie de Jean-François Copé sur les ventes de l’immobilier de l’Etat, qu’il assure ne jamais avoir connues.

C’est totalement faux. Jean-François Copé a été, entre 2004 et 2007, ministre du budget de Jean-Pierre Raffarin, puis de Dominique de Villepin. A ce titre, il a piloté la vente d’une partie du patrimoine de l’Etat, jugé trop coûteux.

Les documents qui attestent du fait que M. Copé a eu connaissance de ces ventes sont légion. Face à l’inaction des gouvernements qui se sont succédé, un rapport parlementaire présenté par le député Georges Tron en mars 2006 enjoignait l’exécutif de « sortir de l’immobilisme » en matière de gestion immobilière.

Ce rapport détaille alors les entrées d’argent et les économies que souhaite le président Chirac et loue l’action de M. Copé en la matière :

« La politique immobilière est un chantier emblématique de l’action que le gouvernement conduit en vue de la réforme de l’Etat. L’impulsion donnée par M. Jean-François Copé est indéniable et le chemin parcouru, important. »

Quelques jours plus tôt, M. Copé, en conseil des ministres, avait présenté ses pistes en vue de cette nouvelle gestion, comme il en fait part dans une lettre adressée aux préfets quelques semaines plus tard.

En juin 2006, M. Copé a installé le Conseil immobilier de l’Etat, agence qu’il a portée officiellement sur les fonds baptismaux en signant le décret qui l’a officiellement créée quelques mois plus tard.

Etant donné les sommes en jeu – 799 millions d’euros pour la seule année 2006 – ainsi que la forte pression politique, M. Copé ne pouvait ignorer ces ventes.

  • Le rôle de Guy Alves

Ce qu’il a dit : “Guy Alves, il n’était plus mon collaborateur, il était parti dans le privé” (au moment des ventes au Qatar)

Pourquoi c’est douteux : Guy Alves, personnage clé de l’affaire Copé, fut son chef de cabinet dans plusieurs ministères, et notamment au budget, entre 2002 et septembre 2006. Il devint ensuite “managing director” de Centuria Capital, société luxembourgeoise qui travaille avec le Qatar, et avec laquelle Bygmalion a des liens financiers. M. Alves dirige à partir de 2008 la société Bygmalion.

Sur le papier, M. Copé a raison : la vente au Qatar du centre Kléber, pour un montant de 400 millions d’euros, selon divers articles de l’époque, s’est conclue en janvier 2007, quelques mois donc après le départ de M. Alves.

Mais une vente de cette importance se conclut-elle en quelques mois ? On peut en douter, d’autant qu’il n’y avait pas que ce seul hôtel en jeu. Et que, on l’a vu, M. Copé, en tant que ministre, était alors en pleine opération de ventes d’immobilier de l’Etat. Par ailleurs, M. Alves est passé du cabinet de M. Copé à la société Centuria, liée justement au Qatar, ce qui pose également question.

  •  Bygmalion et l’UMP

Ce qu’il a dit : « Ni moi ni Nicolas Sarkozy n’avons choisi Bygmalion, cette société travaille avec l’UMP depuis sa fondation en 2002. »

Pourquoi c’est de la mauvaise foi : La société Bygmalion a eu deux vies : elle était d’abord dirigée par Patrick Dray, conseiller en communication proche de la droite, qui a conseillé Roselyne Bachelot, Valérie Pécresse, François Fillon ou… Jean-François Copé. Bygmalion travaillait donc déjà avec l’UMP.

En 2008, Patrick Dray, par ailleurs proche de Bastien Millot et Guy Alves, leur revend sa société. La société continue de travailler avec l’UMP.

Mais à partir de 2010 et de l’arrivée de M. Copé à la tête du parti, celle-ci récupère de plus en plus de contrats, selon plusieurs élus UMP, le plus souvent opposés à Copé. Dès 2012, l’omniprésence de Bygmalion fait grincer des dents, notamment chez les partisans de M. Fillon.

Sur Europe 1, M. Copé suggère qu’il n’est pas à l’origine des premiers contrats entre Bygmalion et l’UMP de 2002. Mais il a bien choisi et privilégié, au moins à partir de 2010, cette société appartenant à ses amis.

  • Les comptes de campagne

Ce qu’il a dit : « En réalité, tout cela s’est fait dans une parfaite transparence, je veux rappeler que les comptes de campagne, comme les comptes de l’UMP, sont validés, certifiés par la Commission nationale des comptes de campagne. Tout cela est public, est connu. »

Pourquoi c’est une question délicate : M. Copé oublie un peu vite que les comptes de campagne de Nicolas Sarkozy n’ont pas été « validés » par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Elle les a en fait rejetés. Et ce, car des déplacements faits par le chef de l’Etat auraient dû, selon la commission, être imputés à sa campagne, et donc aux comptes de celle-ci, et ne l’avaient pas été. Mais effectivement, ni la CNCCFP ni le conseil constitutionnel n’ont jugé les prestations de Bygmalion irrégulières en soi.

  • La « cabale » du patron du Point

Ce qu’il a dit : « Il y a derrière cela, on l’a bien compris, une opération menée par Franz-Olivier Giesbert, depuis des mois… »

Pourquoi c’est douteux : L’axe de défense de M. Copé passe aussi par la mise en cause du directeur du Point, Franz-Olivier Giesbert, accusé de mener un « coup monté » contre lui, mais aussi contre Nicolas Sarkozy.

Pourtant, si les mots échangés entre le patron de l’UMP et celui de l’hebdomadaire sont de notoriété publique, M. Copé oublie que le numéro de jeudi avait pour surtitre « Copé a-t-il volé Sarkozy ? ».

Samuel Laurent et Jonathan Parienté


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