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C’est de la bonne

Publié le 11 janvier 2017 par Edelit @TransacEDHEC

C’est de la bonne

           Cet été, en Australie, un père a brûlé les plantations de son fils. Si nous saisissons tous le caractère bien attentionné de cette décision paternelle enflammée, le jeune homme, lui, ne la pas vu de cet oeil. Fou de rage, il sempresse alors dappeler à laide la police pour porter plainte ! Un héros. Il nest pas très brillant cest certain, en revanche il avait bien saisi la valeur de la plante qui venait de partir en fumée. Car de ladolescent australien au baron de la drogue, en passant par le gouverneur du Colorado, les gains cannabiques en charment plus dun

Combien ça coûte ?

S’il est un débat qui déchaîne les passions, c’est bien celui de la légalisation du cannabis. Qui ne s’est jamais retrouvé à débattre sans fin de ce sujet passionnant avec ses amis au cours d’une soirée dans les nuages ? Les arguments qui y sont avancés en faveur de la fameuse plante verte tiennent très régulièrement au poids financier incontestable que celle-ci pourrait générer. Comme le chantait le groupe Tryo : « Je veux fumer de l’herbe de qualité, boucher le trou de la sécu en fumant mon tarpé ». Mais pouvez-vous me dire combien pèse le marché de la marijuana ? Il vous serait en effet bien difficile de mesurer la valeur d’un marché quand aucune vente n’est archivée ou déclarée (allez trouver un dealer qui tient un service comptable).

Commençons par la France, où une possible légalisation pourrait très bien contribuer à combler plus de la moitié du trou de la Sécu (3,4 Mds €). Et oui, nous au pays des râleurs aimons nous relaxer autour d’un bon pétard. Nous sommes 17 millions d’expérimentateurs, dont 5 millions actuels et 2 millions de fumeurs réguliers. Et étant donné cette bonne base de clientèle, c’est près de 2 Mds € annuels qui seraient générés par la vente légale de cannabis à un prix majoré de 40% par rapport au prix actuel sur le marché noir. De la marijuana légale, ça se vend plus cher ! À titre de comparaison, aux Pays-Bas, où la consommation et le commerce sont totalement légalisés, c’est 1,6 Mds € qui sont générés chaque année.

C’est outre-atlantique que les choses sont devenues autrement plus sérieuses depuis que les états du Colorado et de Washington ont modifié leur législation en 2014. Cette année là, le chiffre d’affaires total est parti fort : 2,4 Mds $ pour ces 2 seuls états. Il faut dire que l’effervescence créée par ce changement de législation a fait du Colorado un parfait laboratoire de ce que serait une légalisation brutale dans un pays déjà amateur d’herbe : explosion de l’offre, effondrement de la qualité moyenne (au malheur des puristes), et ainsi une déflation honteuse qui a conduit inévitablement à un crash ! Peu importe, le chanvre plie mais ne rompt pas. Le marché s’est autorégulé, revenant au niveau de prix d’avant la légalisation avec une qualité bien supérieure. Du coup, en 2016 c’est en tout 6,2 Mds $ qui iront dans les poches des dealers 2.0 (légaux).

C’est de la bonne

Selon CNBC, si la Californie rejoignait le mouvement, ce serait 18 Mds $ annuels, triplant ainsi ce dernier chiffre à elle seule. Si l’on assistait à une légalisation à l’échelle fédérale -qui plongerait les Etats-Unis dans un remix de How High par Walking Dead- le marché américain de la marijuana pourrait peser près de 80 Mds $ avec un croissance d’environ 7% chaque année sur une décennie. Celui-ci devrait ensuite se défricher graduellement dû à un (inespéré) sursaut de valeurs morales dont certains peinent de plus en plus à trouver les expressions dans le 1er pays consommateur de drogues, toutes compétitions confondues …

Prenons enfin de la hauteur avec le 2005 United Nations World Drug Report, qui avance que le marché mondial de la vente légale et illégale de weed s’élevait alors à 141 Mds $, avec 180 millions de fumeurs réguliers en 2015. Il est très difficile de trouver des sommes exactes quant à ce marché global, sûrement car publier ces chiffres pourrait provoquer la folie des grandeurs chez certains. Les goûts restent différents selon les continents : la moitié des saisies mondiales d’herbe en 2015 s’est faite aux Etats-Unis ; quand la moitié des saisies mondiales de haschisch s’est faite en Espagne, soit la porte d’entrée de l’Europe. Il est cependant intéressant de noter que cette somme (141 Mds $ en 2005) équivaut exactement à ce que le gouvernement britannique vient d’emprunter pour faire face au coût à venir du Brexit …

La finance folle de Weed

Pour l’instant, la majorité des banques de détail (fédérales) refusent l’argent provenant de ces commerces « florissants ». Pour cause, si la législation étatique a été modifiée pour certains d’entre eux, la législation fédérale reste intransigeante en ce qui concerne les flux d’argent issus de ce commerce qui reste illégal à l’échelle fédérale. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le marché de la marijuana légale a tant de mal à produire l’explosion qu’on lui prédisait en 2014. L’incroyable envolée des prix entre Janvier et Mars 2014 s’est vite dégonflée quand on a vu la plupart des gérants de coffee shop se munir de coffre-forts et de gardes armés pour des transferts de fonds en blindés. Car les entreprises cannabiques sont dans l’incapacité d’avoir un compte bancaire et donc d’accepter les cartes de crédit.

Du coup, les entreprises développant les technologies du blockchain espèrent s’emparer de cette opportunité brûlante. Car si les dispensaires se munissent de ce mode de paiement, leurs clients devront aussi s’y convertir en téléchargeant une application mobile dédiée. Les vendeurs pourront alors y tenir un service comptable exact, le prouver, et transformer leurs gains en dollars quand ils le souhaitent. Quoi de mieux pour les entreprises de bitcoin pour élargir leur clientèle ? Surtout que si ce système est adopté et apprécié dans les états du Colorado et Washington, ces modes de paiement pourraient être adoptés par les apprentis dealers légaux en cas de légalisation fédérale … On pourrait alors parler de l’ubérisation du trafic de drogue !

C’est de la bonne

Mais en ce qui concerne les banques d’investissement, c’est une toute autre histoire. Malgré sa croissance constante, ce qui caractérise ce marché est son incroyable volatilité. Certaines entreprises ont traversé une sacré zone de turbulences après la légalisation, car les investisseurs sont maintenant en attente de voir comment évoluera la législation fédérale. Au top du palmarès se retrouve Medbox, produisant des distributeurs de chanvre automatiques (pour les insomniaques sûrement), qui, s’étant lancé à 10 millions en 2012, a été valorisée à 3 Mds $ fin 2013 pour se retrouver à 4 millions un an plus tard, on a connu des situations plus stables… Les plus grosses valorisations se retrouvent du côté pharmaceutique : concepteurs de principes actifs en tout genre, voulant décrocher le label « médicinal ». Arena Pharmaceuticals a été estimée à 2.2 Mds $ début 2014 après avoir déposé le brevet pour la norme APD371 et vaut aujourd’hui 1.1 Mds $.

Mais malgré le caractère depuis peu légal de ce commerce, force est de constater que les dirigeants de ces entreprises cotées en bourse se démarquent pour leur pratiques sulfureuses. Et c’est peut être aussi une des raisons de la volatilité extrême de leurs cours, dansant au rythme des informations médiatiques dévoilées à propos de ces dirigeants. Le PDG de CannaVest, Michael Mona Jr avait, lui, voulu commencer à asseoir sa fortune avec la construction d’un casino à Las Vegas en 2000, mais sa demande avait été refusée à cause de son passé flou dans la télé-vente, avec un associé ayant passé 5 ans en prison. Forbes nous informe que CannaVest est né d’une équipe de petits filous : Bruce Perlowin (un ancien grossiste de drogues ayant passé 9 ans en prison) et Don Steinberg (ayant aussi fait de la prison pour trafic de stupéfiants). Quand Michael Mona Jr est devenu PDG de CannaVest en 2013, c’était après avoir quitté son ancienne société, Medical Marijuana, car impliqué dans une affaire de délit d’initié dans la revente de parts de Medical Marijuana à ces deux gentils personnages. Il n’en reste pas moins que le cours de CannaVest a progressé de 1260% depuis début 2013 …

Le coin des théoriciens

Quand la plupart des amateurs, des dealers en fin de tournée, ou des incultes se contentent d’un « c’est d’la bonne bro » quelque soit même la plante qu’ils ont en face d’eux, il en est d’autres qui en ont fait une science ! Dans le Colorado, plusieurs autodidactes se sont convertis à la critique de marijuana. C’est un métier sérieux. Pas plus de deux bouffées par test, s’ensuit un classement par goûts, effets, combustion, conditions de pousse, etc… Autant dire qu’il faut avoir un certain bagage, libre à vous de vous y essayer sans trop prévoir d’activités annexes.

Dans un autre registre il y a les archéologues de la weed, qui sont très investis dans leurs recherches. On savait déjà que les premières populations humaines qui ont cultivé la terre ont eu des pratiques liées à l’inhalation de fumées cannabiques : cela remonte à près de 11 000 ans. Ils avaient retrouvé des traces de combustion de THC dans des fossiles datant de cette époque. Mais en Juillet dernier, ces archéologues (allemands) ont découvert que la propagation de la plante en Eurasie s’est faite par les déplacements du peuple Yamna, des nomades qui vivaient entre l’Ukraine et la Russie actuelle, vendeurs de weed. Ainsi le premier réseau de dealers internationaux date de plus de 5 000 ans. À noter que cette route commerciale est ensuite devenue la route de la soie (Source : Sciences&Vie). Comme quoi, tous les chemins mènent au chanvre.

Marseille : Illegal business

Marseille est connue comme capitale du crime et du trafic en tout genre, au moins en France. En 25 ans, la cité phocéenne a su asseoir son fauteuil de meilleur théâtre de règlements de comptes et de trafics de marijuana. En meneur de jeu, la Castellane. Cette énorme cité enclavée du 16ème arrondissement atteint des performances journalières de 3000 clients grâce à un réseau parfaitement huilé. Six réseaux dont notamment celui de la fameuse Tour K collaborent étroitement. Le démantèlement de l’un d’entre eux a permis de saisir des documents comptables (et oui, nous avons donc trouvé un dealer qui tient un service comptable) allant jusqu’à 50 000 € par jour. Pour surveiller le tout, une cinquantaine de guetteurs travaillent en 3-8, tournent, et ainsi assurent la protection 24h/24h, pour des salaires variant de 1500€ à 3000€ par mois (pour savoir crier « Arrrhâââââ »).

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Alors que la Castellane mène la danse, les trafics d’une dizaine d’autres cités tournent aussi à plein régime, avec 1500 à 2000 clients par jour : Font-Vert, Bassens, Air Bel, Frais-Vallon, Plan d’Aou, les Oliviers, Picon-Busserine, la Paternelle, Campagne-Levêque… Il faudra malheureusement se résoudre à accepter que Marseille est meilleure à vendre de la drogue qu’a vendre son propre club de football. Car le chiffre d’affaires d’un tel trafic se situerait entre 120 et 140 millions € selon La Provence. Ce qui équivaut à ni plus ni moins qu’un dixième du budget 2016 de la ville !

Polémiques

Il n’y a pas que les banques qui lorgnent sur de possibles gains cannabiques. Les géants de la Silicon Valley aussi. C’est plus particulièrement Microsoft qui a annoncé en Juin dernier un partenariat avec la start-up Kind Financial. Le projet est de pouvoir tracer et répertorier les achats de cannabis légal pour permettre aux états d’en vérifier la conformité. Il faut en effet concéder ce côté chill à Microsoft, firme amatrice de marijuana. En 2012, un de leurs anciens cadres, Jamen Shively, a annoncé la création de sa propre entreprise de weed «haut de gamme», non loin de Redmond dans l’état de Washington, siège de son ancien employeur. On peut facilement émettre l’hypothèse qu’il a choisi cet emplacement pour transformer son ancien réseau professionnel en clientèle. Nous gardant de toute diffamation, on mentionne qu’il voit la marijuana comme « un vieux cognac, un brandy raffiné ou un bon cigare », « quelque chose à savourer en petite quantité par des adultes responsables ». Une vision bien délicate d’un produit somme toute raffiné … Personne ne devrait alors être étonné d’apprendre qu’il a donné à son projet le nom de son arrière-grand-père, Diego Pellicer, qui était le plus grand producteur mondial de cannabis au XIXe siècle.

Il serait cependant malhonnête d’écrire un article sur le cannabis en parlant des ses possibles impacts économiques et en occultant ses bienfaits thérapeutiques. Car ceux-ci sont tels pour l’homme que l’armée italienne s’est elle-même lancée en 2014 dans la production de THC de synthèse. L’usage de cette production était à l’origine réservé aux malades et blessés de guerre, mais il pourrait être élargi au secteur civil pour des cas extrêmes. Espérons seulement qu’ils ne tentent pas de s’en servir comme moyen de motivation de leurs troupes comme il fut souvent le cas par le passé en périodes de guerre. On imagine peu un officier de la marine aux commandes d’un porte avion après un bon pétard.

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Des bienfaits thérapeutiques sur l’homme aux méfaits mentaux sur le mouton. Au Pays de Galles en mai dernier, un troupeau de moutons s’est trouvé face à une saisie de plans de marijuana qui venait de tomber du fourgon sur le bord de la route. Elle l’a donc brouté. Ayant perdu tout contrôle de leurs moyens, ce troupeau de moutons a ainsi déferlé sur le village voisin, semant la panique, détruisant jardins et clôtures, s’introduisant dans des bungalows pour en détruire la cuisine … Bref ! Le cannabis n’est pas un affaire de moutons …

   Il se pourrait cependant que tout le potentiel économique que représente le cannabis, du moins aux Etats-Unis, ne soit quun simple nuage de fumée Toujours le même, Donald Trump (sûrement un de ceux qui en auraient le plus besoin), a récemment choisi comme Procureur Général un opposant farouche aux légalisations du cannabis, Jeff Session, sénateur de lAlabama. Il avait récemment déclaré devant le sénat que « les bonnes personnes ne fument pas de marijuana » À méditer !


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