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La dissidence ultralibérale et isolationniste de la "Trump Team" (audio)

Publié le 21 janvier 2017 par Charles Bwele @blog_e_sphere

L'émission Auditions ( ) reçoit Chibel Elsabeh, maître de conférences en macroéconomie à l'université Paris III. À contre-courant des analyses un peu trop souvent passionnées ou partisanes, ce professeur d'économie décrit clairement la cohérence des visions et ambitions de l'administration Trump en matières de politique étrangère, de défense, d'économie, d'énergie, de commerce et de finance.

La dissidence ultralibérale et isolationniste de la


Cette administration fraichement investie à la tête des Etats-Unis peut être qualifiée de "néo-reaganienne", et joue à dessein sur son imprévisibilité de façade afin de pousser ses futurs interlocuteurs à la négociation. Les élites dirigeantes en Europe, en Russie, en Chine et au Moyen-Orient feraient bien de s'abonner à Twitter...

Steve Bannon est le théoricien de l'administration Trump. Directeur exécutif du sulfureux média Breitbart News, autrefois officier de la marine et conseiller en investissement à la banque Goldman Sachs, ce " chrétien libertarien " n'a pas été nommé stratège-en-chef de la Maison Blanche par hasard. Sa mission première sera de convertir le Parti Républicain au " trumpisme " avant les de 2018.

Les généraux Jim Mattis (Département de la Défense), Michael Flynn (Conseil de Sécurité Nationale) et John Kelly (Sécurité Intérieure) sont des dissidents de l'armée - démissionés ou évincés par les administrations W. Bush/Obama - très versés dans la dissuasion nucléaire, ouvertement islamophobes et favorables à un rapprochement avec la Russie... afin que celle-ci ne mette plus de bâtons dans les roues américaines. Le "pivot chinois" de la Russie et l'axe Moscou-Pékin deviennent un véritable casse-tête. Comment dénouer ou amoindrir cette alliance russo-chinoise de tous les dangers ? L'Amérique lâchera-t-elle du lest sur la Crimée et le Donbass (Ukraine) au cours d'un échange de bons procédés avec la Russie ?

Corollairement, l'équipe Trump est persuadée que la stratégie énergétique des Etats-Unis sera déployée plus efficacement grâce à une coopération étroite avec la Russie, deuxième producteur mondial de pétrole. L'objectif consiste à améliorer l'autosuffisance énergétique de l'Amérique en augmentant la production de pétrole et de gaz de schiste, à rentabiliser cette dernière grâce à un prix plus élevé du baril... au détriment des énergies renouvelables / propres et de la protection de l'environnement.

D'où la nomination de Rex Tillerson, ancien PDG d'Exxon Mobil, comme secrétaire d'Etat. La firme américaine est étroitement associée à la firme russe Rosneft dans l'exploration et le forage du pétrole en Arctique, et pour ne pas être victime des sanctions économique contre la Russie.

En plus de Steve Bannon, la division écofinancière de l'équipe Trump de Goldman Sachs : Steve Mnuchin (Trésor), Gary Cohn (Conseil Economique National), Anthony Scarmucci (Bureau des Liaisons des Affaires Intergouvernementales de la Maison Blanche) et Dina Powell (Conseil économique à la Maison Blanche) sont des dissidents de Wall Street mus par une conception particulière du capitalisme financier.

Contrairement aux clichés trop souvent répandus, l' establishment financier aux Etats-Unis est incarné non pas par Goldman Sachs mais par les grandes commerciales et d'investissement JP Morgan et Bank of America.

Ces Chicago Boys 2.0 sont de fervents ultralibéraux sur la scène intérieure (travail, fiscalité, santé, etc) et très protectionnistes sur la scène internationale. Ils comptent récupérer des capitaux de l'étranger en sans trop investir à l'extérieur, contraindre les pays en excédent commercial avec les Etats-Unis ou détenant des obligations du Trésor américain (Allemagne, Japon, Corée du sud, Arabie Saoudite) à rapatrier des fonds aux Etats-Unis en échange de leur sécurité, et négocier âprement avec la Chine - quitte à recourir à une provocation purement rhétorique - en évitant autant que possible une confrontation directe trop risquée et trop coûteuse pour les deux parties.

Aux yeux de Washington, l'Allemagne est désormais la concierge d'une Union Européenne qui compte pour du beurre... et sera sommée de jouer dans les nouvelles règles du jeu et d'augmenter ses budgets de défense.

En réalité, la est le symptôme d'une profonde fracture au sein d'un même établissement politique et économique, et cette caractéristique explique probablement - outre autour du piratage du Parti Démocrate et des hackers russes - la crise post-électorale de l'automne 2016. Sa mission consistera-t-elle à différer autant que possible le repli (ou le déclin ?) de l'Empire et la crise systémique tant annoncée ?


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