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Divine Theatre : la musique sacrée de Giaches de Wert

Publié le 04 mars 2017 par Philippe Delaide

On connaît le plus italien des compositeurs flamands pour ses superbes madrigaux (cf. post du 30 janvier 2007 sur l'enregistrement de la Jérusalem Libérée par l'ensemble la Venexiana), mais beaucoup moins pour son corpus de motets.

Le disque récemment enregistré par l'ensemble vocal anglais Stile Antico (label Harmonia Mundi) nous permet de découvrir l'écriture de Giaches de Wert pour la musique sacrée. Sa polyphonie est d'une élégance rare, assez épurée, aérienne avec une belle structure souvent soutenue par les voix de sopranos.

Divine Theatre Stile Antico
L'ensemble Stile Antico, pour lequel j'avais plusieurs fois émis quelques réserves du fait de sa relative froideur (cf. le post du 10 décembre 2010 sur la Missa puer natus est de Thomas Tallis)  (décidément dans la tradition des interprétations de la musique polyphonique outre Manche), ne déroge pas à cette impression avec ce dernier enregistrement. C'est très net, propre, irréprochable techniquement mais dans un contrôle permanent qui fait qu'il manque tout de même ce "supplément d'âme" que l'on attendrait, surtout lorsqu'il s'agit d'un compositeur qui a vécu à Mantoue, sous l'influence de la lumière et des couleurs italiennes, même si je ne nie pas le travail très sérieux et d'une belle constance de cet ensemble sur les différents corpus de la musique polyphonique et qui en fait, de facto, un des ensembles de référence. A noter tout de même que, sur certains motets, Stile Antico réussit indéniablement à établir une certaine tension de la ligne tout à fait réussie (cf. cas du Peccavi super numerus sur les voix en accords)

Parmi les plus belles pièces de la sélection faite par l'ensemble Stile Antico, on notera le superbe motet Amen, amen dico vobis, où le tuilage des voix révèle une écriture plus audacieuse que les autres pièces composées par le compositeur flamand. 

Le Vox in Rama audita quant à lui, est certainement le motet dont l'écriture est la plus audacieuse, instaurant, avec l'introduction par les basses, un climat surnaturel, relayé directement par des sopranos aériennes, dont la clarté des voix nous emporte. Il est de forme pratiquement madrigale, avec, à partir du minutage 1'30", des frottements harmoniques, des dissonances dignes de Gesualdo ou Rossi.

A noter également le final du Egressus Jesus, avec la superbe envolée des sopranos.

Même si je ne suis pas toujours emporté par les interprétations de l'ensemble Stile Antico, du fait d'un certain manque de chaleur (décidément, je n'arrive pas à m'affranchir de la densité et des couleurs des interprétations de Paul Ven Nevel avec l'ensemble Huelgas) , je recommande tout de même cet enregistrement, de très belle facture, cohérent, et qui permet d'explorer cette jonction qui peut être opérée entre les motets polyphoniques, dans la lignée des compositeurs franco-flamands, avec le style madrigal italien.

Plus de détails sur le site Harmonia Mundi.

Coup de coeur du poisson rêveur

Divine Theatre - Motets de Giaches de Wert - Ensemble Stile Antico - Label Harmonia Mundi. 


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