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Dix-sept ans de mensonge, de Bessa Myftiu

Publié le 09 avril 2017 par Francisrichard @francisrichard
Dix-sept ans de mensonge, de Bessa Myftiu

Il avait cru aller vers son futur, et maintenant il découvrait son passé.

Armand, 17 ans, est l'enfant tardif de deux enseignants: sa mère avait 42 ans à sa naissance. Il n'a jamais compris pourquoi ses parents avaient quitté Korça, la ville albanaise de l'intérieur où il est né, pour s'installer à Vlora, la ville albanaise où ils vivent, au bord de l'Adriatique, et où les habitants sont grossiers.

Il ne veut pas rester à Vlora, non seulement parce qu'il ne s'y est jamais senti à l'aise, mais parce qu'il veut devenir boxeur, depuis qu'il a découvert, incidemment, lors d'une bagarre, qu'il a la boxe dans le sang, et qu'elle lui procure une plus grande popularité que sa belle voix et ses chansons, qu'il accompagne à la guitare.

La boxe est un sport violent, interdit en Albanie depuis plus de vingt ans. Il n'a donc d'autre possibilité s'il veut réaliser son rêve que de s'expatrier. Une seule chose le fait hésiter: il ne voudrait pas que ses parents restent seuls. Or Elsa, 37 ans, une cousine de sa mère, et son invitée, pourrait demeurer avec eux.

Elsa sort de prison. Elle y serait encore si les prisons ne s'étaient ouvertes après la chute du dictateur Enver Hoxha. Elle redécouvre seulement la vie extérieure et elle est ravie d'accompagner Armand à la mer le premier jour et, de nouveau, le lendemain, après son entraînement de boxe qu'il pratique à l'insu de ses parents.

Elsa lui raconte sa vie en prison: Tu ne peux imaginer ce que signifie ne pas être libre. Tout est difficile: se laver, dormir, travailler. Quelques-unes faisaient de la couture, d'autres labouraient des champs. On ne se sent pas un être humain, mais un esclave. Armand lui raconte son enfance sans amis et son impression de ne pas être à sa place.

En rentrant Armand croise sur la place centrale un jeune homme. Le départ pour l'Italie est pour le lendemain: - On se voit à cinq heures du matin, à la gare. Armand confie son secret à Elsa et lui demande de prendre soin de sa mère. A l'aube il s'éclipse de la maison et, arrivé au port de Durrës, il aperçoit Elsa parmi la foule...

Bientôt, une fois en Italie, à Bari, Armand apprend de la bouche d'Elsa, qui a quitté l'Albanie avec lui, qu'il a vécu Dix-sept ans de mensonge et que, pour le protéger d'un passé horrible, il a été emmené de Korça à Vlora. Il sait maintenant qui il est: il n'aurait dû le savoir que lorsqu'il aurait eu 18 ans révolus...

A la fin de ce micro-roman sans fard - la vraie beauté n'en a guère besoin -, Bessa Myftiu dit qu'il se met à pleurer en apprenant la vérité qui le fait renaître, comme

les enfants pleurent quand ils viennent au monde... 

Francis Richard

Dix-sept ans de mensonge, Bessa Myftiu, 64 pages BSN Press

Livre précédent:

Amours au temps du communisme, Fayard (2011)


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