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Légère et court vêtue, d'Antoine Jaquier

Publié le 11 mai 2017 par Francisrichard @francisrichard
Légère et court vêtue, d'Antoine Jaquier

La couverture illustrée de jambes de femme - renversées et renversantes -, le nom de l'auteur et le titre dessinés en rose, tout dans cet objet laisse penser que Légère et court vêtue, le roman d' Antoine Jaquier, est une extension du domaine de la fable:

Légère et court vêtue, elle allait à grands pas; Ayant mis ce jour-là, pour être plus agile, Cotillon simple, et souliers plats.

Bon, c'est vrai: Mélodie n'est pas Perrette; une blogueuse fashion avec son laptop n'est pas une laitière avec son pot au lait; et le XXI e est à des années lumière du XVII e. Mais, comme dans la fable, le début semble tenir des promesses de légèreté et de court vêtu, transposées dans l'air du temps:

Elle m'ouvre la porte en culotte, ses merveilleux petits seins pour comité d'accueil. Mélodie est une brindille aux courbes harmonieuses, sa crinière foncée tombe au creux des reins. Elle est en pleine crise. [...] Elle ne sait pas quoi mettre.

Mélodie sort depuis trois ans avec Thomas. Ils se sont rencontrés dans la boutique où elle bossait pour payer ses études en marketing de luxe. Après qu'il était venu lui donner son tel le lendemain et qu'ils s'étaient adressé quelques textos, ils s'étaient donné rendez-vous au cinéma.

Au Capitole, la mythique salle lausannoise, ils avaient fait plus ample connaissance, un bel après-midi, à la faveur du clair-obscur: L'idée que le caissier du cinéma nous surprenne rendait l'instant parfait , raconte Mélodie. Et, depuis, le désir de lui, malgré qu'elle en ait, ne l'avait plus quittée:

Trois ans ont passé depuis cet après-midi-là et rien de ce qu'a pu faire ou dire Tom n'a altéré mon envie de lui. Ni son caractère, ni ces jours et ces nuits sans nouvelles, ni sa fièvre du jeu ne m'ont fait regretter de l'aimer.

Seulement aimer un loser n'est pas de tout repos. Car son photographe de copain ne gagne pas grand chose avec son art et perd beaucoup avec son jeu. Il joue au poker dans une salle en sous-sol, au Café des Artisans, tenu par les frères Kresniqe, des proxénètes albanais qui ne plaisantent pas avec les dettes contractées à table.

Après avoir perdu beaucoup ces derniers temps, un soir, Tom croit arrivée l'occasion de se refaire. Il joue face à Blerim, le neveu des tenanciers. S'il gagne, sa vieille dette est oubliée et il ramassera la mise sur la table. S'il perd, son adversaire gagnera ce qui est sur la table et une nuit avec... Mélodie, avec laquelle Tom est venu l'autre soir...

L'issue de cette partie de cartes fait basculer toute l'histoire. L'auteur utilise alors des arguments crus et bien assenés: il convainc ainsi le lecteur que, malgré des soubresauts, la condition humaine est de chuter et - comme dans la fable où le lait tombe - de mettre fin aux rêves, avec la complicité du hasard, ou de la nécessité:

Adieu veau, vache, cochon, couvée...

Francis Richard

Légère et court vêtue, Antoine Jaquier, 240 pages La Grande Ourse

Livres précédents, à L'Âge d'Homme:

Avec les chiens (2015)


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