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La nuit d'Ulysse, de Salomé Rouiller

Publié le 31 mai 2017 par Francisrichard @francisrichard
La nuit d'Ulysse, de Salomé Rouiller

Ulysse aura inspiré bien des romanciers, tels que James Joyce, bien des poètes, tels que Joachim du Bellay, mis en chanson par Georges Brassens. Et il continue d'inspirer ceux qui lisent l'Odyssée, cette source inépuisable de vies rêvées.

Le personnage mythique, contre lequel semblent s'être conjurés les dieux et les hommes, dont quelques femmes fatales, fait rêver, par sa persévérance à vouloir retourner chez lui en dépit des éléments et des êtres, qui l'en empêchent dix ans durant.

Ulysse est intemporel. Et Salomé Rouiller invite à parcourir La nuit d'Ulysse, à New York, de nos jours, en compagnie d'un homme qui le cherche, tout en s'identifiant à lui, et qui n'est pas près de le trouver, puisqu'il ne fait que se perdre lui-même.

Au cours de ce voyage jusqu'au bout de la nuit, avec pour carburants whisky et vodka, soufflent sur le héros-narrateur le froid du sol et le chaud brûlant de son coeur en bûcher, qui se consume de douleur, et de son corps en feu, qui embrase l'univers:

La nuit est l'amie de l'homme, elle amène l'oubli, la réconciliation avec soi-même et de doux plaisirs frelatés, pense-t-il à un moment donné.

La nuit vous bouche les oreilles et bourre votre tête de paroles, lui dit Ferdinand à un autre...

Ses rencontres sont les mêmes que celles d'Ulysse. Car, partout, à travers le temps et l'espace, il est des Pénélope, des Circé et des Calypso, même si elles ne ressemblent à leurs modèles que le temps de quelques regards brumeux, qui se dissipent.

Aux lieux épiques se substituent un pub à Manhattan, un intérieur à Greenwich Village ou un cabinet de psy sur la Cinquième Avenue, témoins de sa fuite - Je fuis. J'ai toujours fui. Je suis un lâche - et de son désespoir, qui le caresse froidement.

Comme de juste le fin mot de l'errance de cet Ulysse se trouve à la fin du récit, qui est poésie homérique et avec lequel l'auteur parvient à maturité:

Le soleil ne tardera pas à se lever. Ses rayons encore tout frais de la nuit, étincèleront d'abord dans les rues ensommeillées, puis ils partiront à l'assaut des gratte-ciel avant de conquérir la ville entière. L'aube est belle. Ses doigts roses chatouillent l'océan qui, implacable, murmure une mélopée inconnue.

Francis Richard

La nuit d'Ulysse, Salomé Rouiller, 96 pages, L'Âge d'Homme  


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