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Satori : l’open data renforce l’effet "réseau" d’Internet

Publié le 06 juin 2017 par Pnordey @latelier

Forte de son expérience dans les jeux vidéo en ligne, l’entreprise MZ a construit une plate-forme centralisant différentes sources d’information sur l’Internet et permettant aux développeurs du monde entier de construire plus facilement des applications.

On a souvent coutume de découper l’histoire de l’Internet en plusieurs périodes distinctes. A l’ère 1.0, celle des sites Web, aurait succédé l’ère 2.0, celle du Web social et collaboratif, marquée par la multiplication des blogs et réseaux sociaux. Nous serions désormais entrés dans l’ère 3.0, celle du mobile et de l’internet des objets. Quelle sera la prochaine étape ? Certains évoquent le web sémantique, facilitant le partage de données. Pour Gabriel Leydon, CEO et cofondateur de MZ, une entreprise spécialisée dans la création de jeux en ligne, l’Internet de demain sera caractérisé par une nouvelle manière d’accéder à l’information. Cette dernière sera centralisée et facilement accessible en temps réel. Une idée mûrie au cours de son expérience dans la création de jeux en ligne massivement multijoueurs sur mobile. « Avec le jeu "Game of War", nous avons conçu une technologie permettant de connecter en temps réel des dizaines de milliers d’appareils à un univers virtuel unique. Il s’agit d’un environnement cohésif : n’importe qui dans le monde peut télécharger le jeu depuis son mobile et commencer à interagir avec l’ensemble de la communauté » a-t-il expliqué lors de l’édition 2017 de la conférence « Collision », à La Nouvelle-Orléans.

« Ouvrir les yeux du Web »

Une technologie qu’il souhaite appliquer à d’autres domaines, afin de rendre l’Internet plus unifié et communicant. Dans cette optique, MZ a récemment lancé la plate-forme Satori, baptisée ainsi en référence à un terme japonais issu du bouddhisme qui signifie conscience, compréhension, éveil spirituel. Cette plate-forme de données ouvertes propose aux développeurs une source d’information centralisée, facilitant la construction d’applications. « Pour l’heure, le Web fonctionne comme une base de données. Il est excellent pour archiver, proposer un historique exhaustif, mais en revanche très mauvais en matière d’expérience directe. Lorsque nous sommes sur la toile, nous sommes connectés avec des milliards d’internautes en temps réel, mais nous n’en faisons pas l'expérience, et n’avons aucune possibilité d’interagir avec tous à la fois. » Comme l’illustre le choix du terme Satori, Gabriel Leydon entend donc ouvrir les yeux du Web, accroître la conscience que chaque internaute a des autres.

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Centraliser l’information

« Je veux créer un espace public pour l’information en temps réel, la relayer sur un seul fil d’actualité ouvert, programmable et mis à jour en continu. Pour l’heure, l’univers de l’open data est chaotique, il repose sur des milliers de sites à travers le monde fonctionnant en vase clos, ce qui rend le travail des développeurs souhaitant exploiter ces données pour le bien public très difficile » développe Gabriel Leydon. L’une des premières applications mises en œuvre sur Satori touche à la sphère médiatique. « Le monde de l’information est un écosystème très distribué, avec des millions de sites Internet relayant de l’information à travers le monde. La profusion est telle que nous ne pouvons remonter à la source de chaque information, ce qui explique par exemple le problème des fake news » ajoute-t-il.

L’équipe de Satori a donc créé un fil d’actualité, actualisé en permanence et en temps réel, rassemblant l’ensemble des flux RSS des sites d’information existants dans le monde. « Il est possible d’effectuer des recherches thématiques, et les développeurs sont libres de coder et d’appliquer de l’intelligence artificielle par-dessus. Il s’agit en somme d’une architecture réseau que n’importe qui peut exploiter pour construire des applications utiles à la collectivité » poursuit Gabriel Leydon. Quelques clics suffisent ainsi pour rassembler la totalité des articles parus au cours de la journée sur le dernier décret signé par Donald Trump, ou encore l’ensemble des publications de la presse chinoise sur le lancement de la dernière fusée Space X.

Des flux similaires ont été créés pour Twitter, les informations météorologiques, les tremblements de terre ou encore les transactions en Bitcoin. « L’Internet n’est en réalité qu’un immense flux d’information distribué aux internautes. Mais pour l’heure, cette information est fragmentée. Elle n’est donc ni filtrable ni programmable. Désormais, il est possible d’introduire de la logique dans ce flux. L’Internet va ainsi devenir plus intelligent. »

Les flux d’informations conçus sur Satori peuvent diffuser jusqu’à 200 000 contenus par seconde, soit deux fois plus que Twitter, ce qui représente, d’après Gabriel Leydon, une masse d’informations sans équivalent sur le net. Le fait que la plate-forme soit gratuite et modifiable par quiconque achève d’en faire, selon lui, un outil unique.

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De la smart city au smart country

L’une des applications les plus prometteuses de Satori concerne le domaine de la smart city. Gabriel Leydon a conclu un partenariat avec le gouvernement néo-zélandais, afin de mettre sa technologie au service de la ville de Queenstown. « Nous allons rassembler l’ensemble des infrastructures de transport de la ville - bus, ferries, taxis, avions, etc. - en un écosystème vivant, une infrastructure connectant toutes ces données en temps réel. Les différents services de transport pourront ainsi communiquer entre eux pour un fonctionnement optimal » explique-t-il. Par exemple, les compagnies de taxi locales pourront découvrir, en temps réel, combien de passagers sont sur le point d’atterrir à l’aéroport, et ajuster en flux tendu le nombre de véhicules nécessaires pour les amener à destination. La plate-forme étant en accès libre, le nombre d’applications potentielles a pour seule limite l’imagination des développeurs et des autorités publiques.  

Selon Gabriel Leydon, avec la multiplication des objets connectés, ce genre d’outil va rapidement devenir nécessaire : « Nous sommes en train d’insérer des millions d’objets connectés dans notre monde, mais comment allons-nous interagir avec eux ? Un espace public est nécessaire pour obtenir une vue d’ensemble de tous nos appareils, les faire fonctionner et communiquer de manière optimale. » Selon lui, disposer d’une plate-forme ouverte offrant cette vision est donc un aspect essentiel de la smart city, ainsi que des futurs “smart countries”. Car il serait dommage de se limiter à l’échelle d’une ville : « Dans le cadre de notre partenariat avec le gouvernement néo-zélandais, nous souhaitons participer à la création du premier pays en ligne. L’objectif étant que chaque directeur de magasin, chaque tenancier de bar, chaque acteur économique néo-zélandais puisse publier sur le fil d’information publique du pays. De même, chaque nouvel objet connecté commencera instantanément à produire de l’information sur le fil. Des développeurs du monde entier pourront ensuite construire des applications consommant ces données. » Selon Gabriel Leydon, un autre projet est également en cours pour rassembler les données publiques indiennes, depuis la santé jusqu’à la pollution de l’air, en passant par le trafic automobile et les infrastructures de transport.

Des risques de piratage

Quant aux risques de piratages, Gabriel Leydon les balaie d’un revers de la main : « Prenez les attaques par déni de service, par exemple. Elles sont aujourd’hui possibles car l’Internet n’est pas suffisamment intelligent. Des millions de bots envoient de l’information, mais le réseau n’est pas capable de voir que celle-ci provient de bots et qu’il s’agit en réalité d’une cyberattaque. A partir du moment où l’information est unifiée et structurée, ce genre d’opérations devient beaucoup plus simple à identifier et à couper à la source. » Si le risque de cyberattaque ne sera sans doute malgré tout jamais totalement dissipé, Gabriel Leydon en est convaincu : le dispositif imaginé par Satori constituera une frange importante de l’avenir du Web. « Il ne s’agit pas vraiment de cloud, ni de SaaS, c’est une nouvelle forme d’informatique, qui propose de passer de l’ère de la base de données à l’ère du réseau »  conclut-il.

 

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