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Fernand Léger, peintre architecte

Publié le 22 juillet 2017 par Les Lettres Françaises

Fernand Léger, peintre architecteLéger et ses amis (Musée Léger à Biot) et la quasi-rétrospective du même peintre au centre Pompidou de Metz, permettent d’admirer l’œuvre d’un des principaux maîtres de l’avant-garde historique. Cubiste à ses débuts, Fernand Léger subit l’attraction cézannienne, selon laquelle les motifs peuvent se réduire à des formes géométriques. Puis, tenté un court moment par l’abstraction, l’artiste combine des fragments de réalité avec des aplats de couleur franche, cernés d’un contour net. La Noce (1910-11) ou La Femme en bleu (1912) sont des compositions kaléidoscopiques et centrifuges, une figuration éclatée et rayonnante.

Dérivée d’une interprétation très personnelle du cubisme, cette peinture tendue à l’extrême est basée simultanément sur les contrastes et l’ordonnance de ce que Léger appelle les « trois grandes qualités plastiques » : lignes, formes et couleurs. Vue sous cet angle, la figure humaine est appréhendée « non comme une valeur sentimentale mais uniquement comme une valeur plastique, soumise à l’ordre… qui régit les machines et l’environnement urbain » (Léger). Le corps présenté comme un organisme parfaitement coordonné, aux rythmes harmonieux, devient l’emblème non pas d’une société qui porte en elle l’asservissement de l’homme mais sa libération.

Par la suite, la figure, toujours massive et monumentale, devient plus souple. L’influence du surréalisme au même titre que les projets de Fernand Léger pour le théâtre et le cinéma — l’artiste s’intéresse tôt au monde du spectacle — font que les composants naguère statiques s’animent et flottent dans l’espace. Ainsi, le corps n’est qu’un élément parmi d’autres objets — de provenance végétale, animale ou minérale — souvent liés ensemble par une racine ou un ruban (Contraste d’objets, 1930). L’inexpressivité des visages stéréotypés ajoute un sentiment d’étrangeté à un univers dans un état d’apesanteur, aux accents poétiques. Simultanément, Léger débute ce qu’il considère comme sa vocation sociale essentielle, la peinture murale. Abordant cet art collectif par excellence, il décore le pavillon de l’Esprit Nouveau, conçu par Le Corbusier pour l’exposition des Arts décoratifs de 1925. Plus que des images peintes, ce sont des constructions solides et immuables, des façades de maisons faites à partir de « béton » aux tonalités éclatantes et froides à la fois. Léger explique le caractère « bâti » de ses représentations par la conception qu’il a de son métier : « Avant, l’art pictural était étroitement lié à l’architecture… L’artiste peintre subissait la contrainte architecturale. C’était le grand ordre antique, que je souhaite voir réapparaître ». Faut-il croire que l’artiste reste attaché aux principes de sa formation initiale, celle d’un architecte ?

Fernand Léger, peintre architecte
Pendant son séjour prolongé aux États-Unis (1940-45), il adopte la dissociation entre la couleur et le dessin, donnant lieu aux  « surfaces élastiques », des espaces souples dans lesquels Léger situe ses hommes. Viendront par la suite des compositions géantes, avec comme sujet les loisirs populaires, le cyclisme, le cirque ou les parties de campagne (Les Loisirs, La Grande parade, 1953), en accord parfait avec les engagements politiques du peintre, membre du parti communiste.

C’est ainsi que Fernand Léger entreprend Les Constructeurs (1950), une célébration du monde du travail, et où l’ouvrier, qui se tient fièrement en équilibre sur une poutre métallique surplombant la cité, est avant tout un hommage métaphorique à l’homme-constructeur. D’un nouveau monde ?

Itzhak Goldberg


Léger-Le beau est partout, jusqu’au 30 octobre, Centre Pompidou Metz.

Léger et ses amis, jusqu’au 30 octobre, Musée Léger, Biot.

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