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Snowfall (2017) : une industrie bien huilée

Publié le 01 août 2017 par Jfcd @enseriestv

Snowfall est une nouvelle série de dix épisodes diffusée depuis le début juillet sur les ondes de FX aux États-Unis et au Canada. L’action se déroule en 1983 dans South Central : un quartier pauvre de Los Angeles alors que l’épidémie de crack encore naissante est en train de faire des ravages. De Franklin Saint (Damson Idris), un jeune du ghetto qui se lance dans la vente sur le terrain en remontant jusqu’à Avi Drexler (Alon Moni Aboutboul), ce parrain des temps modernes vivant dans l’opulence, la chaîne de distribution est couverte de A à Z. C’est à la fois la qualité et le défaut de Snowfall. En effet, on est rapidement hypnotisé par ce mode de narration méticuleux qui nous offre plusieurs facettes d’un même commerce. En contrepartie, on s’appuie trop sur les clichés pour faire avancer la série tandis qu’il nous est difficile d’éprouver une quelconque compassion envers les protagonistes ; trop nombreux pour qu’on s’attarde et comprenne réellement à leurs motivations.

Snowfall (2017) : une industrie bien huilée
Un mince dépaysement

Franklin a vécu toute sa jeunesse dans la misère aux côtés de Cissy (Michael Hyatt), une mère aimante tandis que son père qu’il n’a jamais vraiment connu n’est qu’un sans-abri de plus hantant la cité des anges. Le protagoniste vendait déjà de la marijuana avec son meilleur ami Leon (Isaiah John), mais par un concours de circonstances, il entre en contact avec Avi. Ce dernier, qui après s’être fait prier, lui donne plusieurs grammes de crack à trouver preneur en quelques jours seulement, question de lui prouver son efficacité. En parallèle, nous avons l’agent de la CIA Teddy McDonald (Carter Hudson) qui prend le relais dans la mission d’un ancien collègue mort d’une overdose ; ce dernier s’étant lancé dans la distribution de la poudre blanche. C’est accompagné d’Alejandro (Juan Javier Cardenas), un militaire et auparavant soldat nicaraguayen que Teddy tente d’infiltrer le réseau. Sous couverture, ils font éventuellement affaire avec Lucia (Emily Rios), la fille d’un baron de la drogue qui s’occupe du transport de la marchandise. Quant à son allié et cousin Pedro (Filipe Valle Costa), c’est lui qui s’assure de la qualité du produit. De plus, ce dernier est dévoré d’ambition alors qu’il engage Gustavo (Sergio Peris-Mencheta), un célèbre boxeur qui pour arrondir ses fins de mois accepte des petits boulots comme voler une grosse somme se trouvant dans une maison privée. Le hic est que l’opération qui ne se déroule pas aussi facilement que prévue fait un mort et plus intriguant encore, Gustavo apprend que c’est la demeure de son propre père (un autre baron), que Pedro lui a demandé de cambrioler.

Snowfall (2017) : une industrie bien huilée

Comme on peut le constater, il y a beaucoup d’acteurs en place pour une fiction qui mis à part le pilote dépasse rarement les 45 minutes par épisodes. Du coup, en accordant une importance égale à chacun d’entre eux, difficile de comprendre les motivations qui les poussent à continuer dans ce milieu certes lucratif, mais ô combien dangereux. C’est que pour pallier à ce manque de temps, la production a préféré évoquer en nous les repères que nous associons aux autres séries traitant du sujet similaire. Franklin est pauvre et de surcroît noir : prendre sa part du gâteau dans l’industrie de la criminalité semble aller de soi. Sa justification comme quoi l’argent gagné lui achètera la liberté est aussi un peu simpliste. Même chose à l’autre pôle avec le personnage d’Alon. Bagues en or, ventre proéminent, cigare au bec étalant sans gêne son opulence, il peut de surcroit se permettre de jouer aux quilles dans son salon : les cylindrés blancs étant remplacés par des bouteilles de champagne.

Du côté de la mise en scène, on n’est pas plus dépaysé. Les couleurs vives qui ne font qu’accentuer l’effet désertique de la ville où l’asphalte domine nous rappellent Animal Kingdom (TNT), Graceland (USA Network) et Kingdom (DirectTV) qui elles aussi prennent place dans les quartiers pauvres des villes de Californie.

Snowfall (2017) : une industrie bien huilée

Du réalisme aussi

À l’inverse, « l’expérience Snowfall » n’est pas dénuée de tout intérêt. S’attarder ainsi à tous les maillons de la chaîne nous fait vraiment comprendre ce que l’expression « crime organisé » signifie. C’est que Franklin, Teddy ou Gustavo sont tous des novices dans le commerce de la drogue et c’est à travers leurs regards que l’on se fait une idée plus précise de la complexité de cet ensemble économique, mais aussi de ses (nombreux) imprévus. Justement, à un moment le boxeur est sommé par Lucia de surveiller celles qui doivent remplir chaque sac d’une quantité équivalente de cocaïne. En soutien-gorge pour s’assurer qu’elles ne volent pas la marchandise, il s’agit probablement pour la plupart de mères, des immigrantes illégales qui ne peuvent que gagner de l’argent au noir pour faire vivre leur famille. Dans la même veine, les « grilles salariales » sont aussi  à l’avance, comme le mentionne Pedro : « And at $100 a gram, a better value as well. Dealers get 10%, processors $1,000 a day to buy silence and loyalty. (…) Budgeted out at $10,000 a load. There will also be breakage, free samples. Conservatively, another 50 to 100 grams per shipment. After all expenses, Oso, those 25 kilos could net us just under $2. »

La violence n’est évidemment pas exempte de Snowfall et le meilleur exemple en ce sens se déroule dans l’épisode #3. C’est qu’un soir, Franklin s’est fait tabasser et voler l’argent de ses ventes par deux voyous. Le lendemain, lui Leon et Karvel (un fier-à-bras qu’ils ont engagé) retrouvent la trace de l’un d’eux : Lenny (Craig Tate). On a beau tout casser dans sa maison et le tabasser ; rien n’y fait ; le jeune homme continue d’afficher la même arrogance et ne leur divulgue pas où il a caché leur argent.  Bien décidé à le briser, Karvel le traine de force dans sa chambre et l’agresse. Nous n’avons droit qu’au point de vue de Franklin et Leon de l’autre côté de la porte, horrifiés par les cris qu’ils entendent. C’est rarissime que l’on aborde le viol masculin en fiction et ici, le fait de ne pas voir l’acte, mais de l’imaginer donne tout autant froid dans le dos. À l’inverse, dans la finale de la première saison d’Outlander, l’agression sexuelle de Jamie ne nous épargnait aucun détail. Dans les deux cas, ce n’est pas l’effet spectacle qui prime, mais bien la sensibilisation, dans sa cruauté la plus pure à un acte abjecte pouvant totalement anéantir une victime. Et dans la série de Starz, comme dans celle de FX, on ne se contente pas seulement d’y aller avec l’agression : un suivi avec les séquelles qui en résulte est aussi assuré. On est loin des scènes de sévices commises envers les femmes, beaucoup trop fréquentes en fiction et qui à force de se multiplier sont banalisées à l’extrême…

Le premier épisode de Snowfall a rassemblé 1,36 million de téléspectateurs avec un taux de 0,58. Le second et le troisième ont attiré respectivement un auditoire de 965 000 (0,39) et 1,05 million (0,46). Avec de tels scores en haut de la moyenne de la chaîne qui semblent déjà se stabiliser, les chances sont là pour que la série obtienne une seconde saison. C’est Showtime qui pourrait s’en mordre les doigts, elle qui avait initié le projet en 2014 et qui est loin de connaître un bon été.

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