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Avec tes mains d'Ahmed Kalouaz

Par Rambalh @Rambalh
Après avoir découvert Ahmed Kalouaz avec son roman Une étoile aux cheveux noirs contant l’histoire de sa mère, je savais que je lirai celui racontant le parcours de son père et je n’ai pas hésité lorsque je l’ai trouvé en librairie.
Avec tes mains d'Ahmed Kalouaz

Quatrième de Couverture
« J’aurais voulu que tu me montres, un jour de connivence, une photo longtemps dissimulée, en me disant que là, quelques jours dans ta vie, tu ne fus ni miséreux, ni soldat, ni travailleur de force, mais simplement un homme avec de la douceur au bout des doigts. »
Il s’appelait Abd el-Kader, né autour de 1917 dans un douar algérien. De ce père aujourd’hui disparu, Ahmed Kalouaz a voulu reconstruire le destin. Ces lambeaux de vie, sauvés du silence, tissent le portrait d’un homme dur à la tâche comme en affection, dont le parcours singulier a été commun à des centaines de milliers d’immigrés maghrébins.
Sans enjoliver ni noircir, Avec tes mains dit l’absence de mots communs entre les deux générations, les regrets et les rendez-vous manqués. C’est un chant d’amour bouleversant, adressé à un père dont la dernière volonté fut d’être enterré au pays, loin des siens.
Né en 1952 en Algérie, Ahmed Kalouaz vit dans le Gard. Il a publié une vingtaine de livres, nouvelles, romans, théâtre. La brune a publié de lui, en 1999, un récit, Absentes. Il intervient dans des lectures publiques, en atelier d’écriture ou de parole, notamment en prison.
Mon avis
À travers ce roman, Ahmed Kalouaz nous dresse le portrait de son père, Algérien ayant combattu pour la France avant de s’y installer, travaillant pour s’offrir de jours meilleurs en Algérie, jours qu’il ne connaitra jamais car la guerre d’Algérie va s’en mêler, puis la vie va le laisser en France, avec sa femme et ses enfants. C’est le roman initiatique d’un homme à travers les décennies mais aussi celui de son fils, qui tente de déchiffrer cette vie qui ne lui a pas été racontée.
Ahmed Kalouaz a encore réussi à me toucher avec ses mots, ses émotions qu’il transmet en partageant ses souvenirs ainsi que ceux de son père. Leur relation n’est pas celle qu’il avait avec sa mère : il n’est pas proche de son père, il s’en détache énormément d’ailleurs à travers l’école, en apprenant à lire, à découvrir le monde alors que son père n’a jamais réellement réussi à apprendre correctement le français, et n’a même jamais appris à lire ou écrire. Ce clivage fait qu’ils ne se comprennent pas malgré leur respect mutuel, ils appartiennent à deux mondes : son père, l’immigré qui est rejeté par la France, ce pays pour lequel il s’est battu, et lui, le jeune qui s’intègre et se cultive, qui est Français et qui ne comprend pas réellement l’attachement de ses parents pour leur pays.
On suit l’évolution de cet Algérien qui est l’exemple de ces jeunes qui ont été tirailleurs lors de la seconde guerre mondiale, puis qui ont oscillé entre deux eaux lors de la guerre d’Algérie, qui sont restés en France mais avec toujours cette envie de retrouver un jour leur pays, en revenant riches et forts. Ces jeunes qui vieillissent trop vite et dont le rêve ne se réalisera jamais.
C’est, enfin, un moyen pour l’auteur de faire la paix avec son père, avec son histoire mais surtout de se décharger de toute cette frustration accumulée : ce manque de discussions avec ce père qui n’a jamais partagé sa vie avec lui. Ce sentiment d’abandon quand son corps a été transporté en Algérie pour y reposer alors que lui aurait aimé qu’il reste en France.
Un roman touchant à travers lequel, par ses mots forts et poignants, Ahmed Kalouaz nous permet de plonger au cœur des relations père-fils mais aussi de la vie des Algériens arrivés en France il y a plusieurs générations.
« C’est triste une main d’homme qui n’a jamais tenu un livre entre ses doigts. »
« « Travail, famille, patrie », la devise du Maréchal avait laissé des traces dans les mentalités. C’était encore le temps du travail souverain, la reconnaissance passait d’abord par le fait de manier la truelle, la pelle ou la bêche. Si tu maniais mal la langue de France, et que, contrairement aux autres, tu ne savais pas lire le journal, tu pouvais au moins, grâce à tes bras, te rallier à la valeur commune, te soumettant de bonne grâce à cette vertu collective. »
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