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Brantôme

Publié le 28 juillet 2008 par Argoul

Brantôme est un village serein du Périgord. Son couvent élégant du 18ème et son restaurant “de charme” installé dans un ancien moulin de la Dronne, au-delà du pont coudé du 16ème siècle, incitent les guides à y conduire le touriste. Ses quelques 2000 âmes se regroupent en un village tout petit mais prestigieux. Il fait bon se promener entre falaise et rivière, dans la verdure et la pierre. Nous sommes ici loin du monde.

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Sa renommée tient à Pierre de Bourdeille, chroniqueur sous le nom de Brantôme, qui fut aussi abbé commendataire de l’abbaye du village. Il a connu Jarnac en 1569, les guerres de religion, Charles IX. Guerrier et courtisan, il a vécu l’existence d’un cadet de Guyenne, allant jusqu’en Ecosse accompagner Marie Stuart. L’esprit, le cynisme, le pittoresque et le piquant sont le fond de ses chroniques qui se lisent encore avec plaisir. Il a chevauché en Espagne, a débarqué en Afrique, a parcouru l’Italie. Il a fréquenté les exaltés de la Ligue et négocié avec les soudards huguenots. Il a connu la vie trépidante de cour et le calme du monastère. De l’observation des comédies humaines a surgi sa verve amorale qui aime l’anecdote originale et ne juge point. Peut-être un précurseur de Flaubert. Sur le modèle romain, il écrit lui aussi sa « Vie des hommes illustres ». A laquelle il ajoute, contre la misogynie antique, une « Vie des dames galantes »…

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Un restaurant a pris ici le nom – au jeu de mot régional facile et libertaire – de Père Igor… Je n’ai pas goûté sa cuisine qui – au titre – ce saurait être que russe, n’est-ce pas ?

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Le clocher de l’église abbatiale, du 11ème siècle, isolé de l’église, est à gâbles ; il comprend quatre étages et une pyramide le coiffe. Il a été classé monument historique en 1840. Il faut dire qu’il s’élève sur une forteresse naturelle, un rocher abrupt de 12 m de haut, creusé de cavernes… Sa salle basse est voûté d’une coupole, sa salle haute se rétrécit jusqu’à la pyramide terminale. Dans l’église, des voûtes angevines du 15ème retombent sur des piles romanes ; dessous, une statue de 1901 figure un soldat bestial – musclé et le regard sans pitié – s’apprêtant à poignarder un bébé nu Innocent. Les foules mémorielles y voient aujourd’hui un Romain impéraliste et colonial trucidant un bébé juif (propos entendus sur le vif), sans aucun souci de cohérence historique. On mesure aux conversations de touristes la profondeur culturelle qui caractérise l’éducation scolaire depuis quelque temps… Charlemagne aurait rapporté ici l’une des reliques desdits Saints-Innocents de l’époque d’Hérode. Au-dessus du bénitier sous le porche, un bas-relief du 13ème siècle rappelle une fois encore le souvenir évangélique du Massacre des Innocents.

La falaise qui se dresse au-dessus du village et le protège, tamise la lumière du ciel et borne son horizon. Elle est comme une cape à l’abri de laquelle se réfugient les enfants. Elle a été occupée depuis les temps lointains. Les moines s’y sont retranchés lors des destructions sporadiques entre les 11ème et 17ème siècles - après avoir christianisé sa fontaine du rocher dont on dit païennement qu’elle féconde. Dans une grotte alimentée de son eau, on élève d’ailleurs des truites… Dommage que ‘saint Sicaire’, à qui elle est dédiée, soit un saint qui n’existe pas. Quel parent normal aurait d’ailleurs l’idée d’appeler son garçon Sicaire ? Le nom vient du latin ‘sica’, poignard, et signifie assassin !


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