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Lettre au hasarD - OthellO

Par Veroniquedubois
Lettre au hasarD - OthellO
Liège, le 1er avril 1947
Saint Hugues

Ma grande chérie,


Que c'était beau hier. Comme je t'aime. Je me vois encore te tenant dans mes bras. Je t'aime Lisette. Je t'aime. Hier soir, Othello, j'ai rencontré des amis et j'aurais voulu être seul, seul, seul et penser à toi.

La représentation ne m'a pas déplu. Tu me l'a demandé hier, je vais te parler un peu des caractères.

Othello, l'homme, il contient encore tout la naïveté, la force, un terrible chef sauvage. Il ne pense pas au mal et devient fou en détectant un fait monstrueux, inimaginable pour lui. Profiter de ses faiblesses, de sa jalousie , cet homme devient encore plus jaloux. Poussé par son complexe d'infériorité qui le harcèle : il est noir. Cette jalousie monte en lui comme une maladie mortelle.

Chérie, je te rassure tout de suite, ce n'est pas comme pour nous deux.
Chérie, nous sommes tous les deux, jaloux par habitude, par caractère, ce n'est pas très beau mais le vivre me paraît moins dangereux.

Quand à Lago, le vrai personnage de la pièce, un caractère. Othello a voulu lui prendre sa femme comme un accroc dans un bas de soie,  comme une failure dans une carrosserie, une coupure dans une courroie. Aux petites causes, grand effets, Lago, pur idéaliste, atteint dans son honneur, dans sa fierté. Un homme qui n'attaque pas son voisin mais rend le mal cent contre un, dés que l'offense surgit. Sans scrupule mauvais néanmoins il m'est sympathique par la finesse de son intrigue.

Ce matin, je me suis faufilé dans son bureau et j'ai fouillé dans les affaires de papa. La lecture des prospectus des usines françaises avec de belles photographies, les délais de livraison sont énormes. Je suis installé près du radiateur à gaz, musique : Chopin, épatant. J'aime Chopin, cette musique me prend le coeur. Comme toi ma chérie, exactement.

Cette après midi, je vais au garage, puis chez un ami, ensuite en ville chez le mitrailleur - le photographe puis acheter du papier pour t'écrire, un papier rien que pour toi, ma chérie.
Je voudrais bien du papier avec entête mais c'est un peu compromettant !!
Je me réjouis d'avoir un stylographe convenable pour t'écrire une belle prose.
Je me demande si j'ai bien refermé la porte de la villa, hier. Il faudra bien y retourner. Cela me rappelle des belles heures, Chérie.

Desdémone, petit objet charmant victime de la folie des hommes, son père égoïste
ou orgueilleux, veut garder fille ou ne pas la mésallier à un "nègre". Cassio, la femme de Lago et l'amoureux délaissé, des moyens pour mener l'histoire ou l'intrique à bon port. Le Buffon est assurément inutile.

Et voilà je t'ai décrit ce que j'ai pu. La pièce est belle, bien faite. Elle suit de près le théâtre Français sans atteindre sa perfection. Certains personnages nous paraissent un peu grotesques. Notamment quand Othello se méprend de femme lorsque lui parle de Cassio. A cet instant, il croit qu'on lui parle de Desdémone. Ce subterfuge nous fait penser à Molière, un peu de discordance se mêle à tout cela.

Voilà, tout ce que j'ai retenu si ce n'est pas mieux. Dis-toi que c'est parce que je rêvais de toi. Je t'aime plus que jamais ma chérie.
Je t'aime et tu es si jolie, tes cheveux défaits et tout toi près de moi, j'en rêverai longtemps.
Chérie, tu t'es donné entièrement, je t'en remercie, à un moment, il m'est venu l'idée de faire plus, mais je déteste exploiter la situation, je t'aime ainsi quand tu mets ta confiance en moi, alors tu es naturelle, tu vis, tes yeux me regardent enfin, je t'aime. Comment veux-tu que je regarde une autre, tu hantes mon esprit.
Ton corps est merveilleux, je ne le savais pas, tout est merveilleux en toi. Dommage que ces beaux moments passés, tu redeviens brusque, méchante, blessante. Est-ce par pudeur, une réaction de nervosité ? Je ne le sais pas mais je te souffrirai comme cela. A moins que tu ne veuilles changer ? Tu me rendrais encore plus heureux.

... A suivre
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