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Sociabilité et participation : des éléments empirique pour la pratique

Publié le 31 juillet 2008 par Christophe Benavent

Sociabilité et participation : des éléments empirique pour la pratique
Chaque professionnel le sait. Fidéliser apporte moins que ce qu’on espère et pour gagner plus on est tenté de faire de nos clients fidèles les premiers agents du recrutement. Cette idée pratique, n’est pas vraiment à l’ordre du jour des académiques, qui poursuivent plutôt celle que la qualité du recrutement détermine, à raison, la fidélité des clients restants.

Et pourtant, c’est bien cette idée qui est au cœur d’un Watts que nous avons déjà évoquée dans ces pages ou pour prendre un autre auteur celle de Netpromoter. C’est une vieille idée, celle des acteurs du marketing direct, que de faire de leurs clients fidèles les parrains de nouveaux recrutements. Cette idée est si évidente.

Sa mise œuvre nécessite de savoir avec qui nos chers clients sont amis. C’est une chose que l’on connaît peu, et l’on doit aux sociologues de s’y être intéressé au travers de la notion de sociabilité. François Héran a largement contribué à ce type d’études qui ont été populaires dans les années 90 .

Nous apprendrons ainsi que plus nous sommes aisés et éduqués et plus nous avons d’amis, du seuil bas au seuil haut passant de 4 à 10. La sociabilité décrit quantitativement la nature des réseaux que nous habitons, elle s’intéresse aussi pour partie au degré d’engagement social et politique. Pour dire les choses simplement, quand dans une population de 60 000 000 de personnes, quelques millions participent à des associations, quelque centaines de milliers sont membres de partis politique, moins de trois cent mille occupent des fonctions électorales, c'est-à-dire quelque chose de l’ordre du demi pour cent. Nous devons nous interroger sur les moteurs de l’organisation sociale. Quelque soit les domaines.

Très recemment, Rue89, a publié quelques résultats d’une étude de la participation de ses lecteurs . On y retrouve les mêmes ordres de grandeur. Si 600 000 personnes chaque mois consultent le site, 45 000 y sont inscrits. 4500 ont posté des commentaires, et 1500 d’entre eux en ont produit 80% du volume. La participation est ainsi le faitde moins de 0,1% des lecteurs.

On pourrait jaser sur l’illusion participative, en politique, tout comme sur les marchés. Mais soyons prudent, les choses sont plus complexes, on connaît le phénomène des portes-voix. Et notre sujet ne porte pas sur la question participative, mais sur les structures des réseaux sociaux.

Si dans la vie quotidienne, l’horizon de la sociabilité se limite à quelques toute petites dizaines de personnes, à l’échelle de la société, un très petit nombre, communique avec un un très grand nombre.

La structure qui se dégage est assez simple. Pour un leader, il y a cent militants, les accompagnent un millier de supporters, et peut être 10 000 compagnons. Ceux-ci entraînent dans leur sillages 10% de la population concernée. Les autres attendent, sensibles aux propositions des précédents, la moitié d’entre elle est certainement inerte. Cette asymétrie structurale, qui mérite d’être mieux définie, quantifiée, nous semble fondamentale.

Parmi les fidèles, d’un parti, d’une idée, d’un produit, il en est qu’une fraction minimale qui s’engage, milite, défend et prend parti. Cette minorité a cependant une influence décisive, elle est extrêmement active. Il reste cependant à savoir comment l’employer.

La masse des fidèles ne peut être la cible. Il s’agit de la sélectionner. Deux critères nous semblent essentiels : d’une part la connectivité, d’autre part l’engagement.

La connectivité décrit simplement le nombre de personnes que ces individus sont capables d’influencer, et secondairement les caractéristiques qui leur permettent de le faire. Certains ont une sociabilité intense, dans une période de temps ils peuvent interagir avec plusieurs centaines d’individus, quand les autres, la très grande majorité n’en touche que quelques dizaines, au mieux.

L’engagement est relatif à leur volonté de défendre dans leur réseau de sociabilité, des idées qui leurs sont chères. Certains dans un domaine chercherons à convaincre tous leurs amis, d’autres se contenterons de ceux qu’ils considèrent proches du sujet.

En combinant ces deux critères ne soyons pas étonné que la capacité d’influence des plus fidèles soit inférieure à 1. Leur effort persuasif ne peut atteindre plus d’une personne. Le produit du nombre de leurs amis, et de la probabilité qu’ils les convainquent en faisant l’effort nécessaire ne dépasse certainement pas l’unité. Pour conquérir de nouvelles voix il s’agit donc de porter l’effort sur ceux qui ont beaucoup d’amis et sont prêt sur chacun à exercer une forte conviction.

L’application pratique devient alors évidente. Dans le corps des clients que l’on fidélise, inutile de les appeler tous , il s’agit de repérer ceux qui à la fois ont un large réseau et, sur la question pour laquelle ont les motive, sont prêts à faire l’effort de convaincre. Il reste à savoir comment mesurer ces deux caractéristiques, et en fonction de celles-ci à déterminer qui toucher et impliquer dans un programme de bouche à oreille.

Les méthodes sont multiples, mais le critère est simple : ceux dont la capacité à recruter est supérieure à 1. Au moins un nouveau client conquis.

Nous laissons au lecteur le soin de déterminer les techniques opérationnelles, même si nous en avons quelques idées. Nous lui recommandons juste de réfléchir à cette idée : il n’y qu’une fraction minime de leur client fidèles qui possède à la fois un réseau sociabilité assez large et une motivation assez forte pour effectivement amener à la marque de nouveaux clients. Savoir les cibler est le cœur de la réussite. C'est sans doute un objectif des nouvelles segmentation.

Voilà pour l’opérationnel. Il reste à méditer sur la nature des réseaux sociaux, à mieux comprendre leur structure et leur dynamique, et à mieux penser cette idée que la démocratie comme le marché, ne se constitue pas comme un ensemble d’atomes équivalents, mais de grumeaux de petites tailles, très nombreux et de grains très liants mais très rares. Mieux comprendre la sociabilité, mieux comprendre les influenceurs, mieux comprendre comment les deux structures interagissent sera sans doute la clé des nouvelles stratégies de communication.
Entre la théorie des leaders d’opinion, et l’utopie de la participation, se dessine un chemin finalement assez peu exploré.

Et gardons pour la fin cette question essentielle : la matérialisation des réseaux sociaux par les multiples plateformes digitales, de MySpace à FaceBook, modifient-elle profondément le phénomène? Les sujets élargissent-il le cercle de leur sociabilité? Exercent-il un effort plus intense ou plus efficace pour amener leurs proches à partager les mêmes préférences?

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