Magazine

Alerte aux féministes!

Publié le 21 juin 2007 par Nadia Lamlili

Mercredi 20 juin. Lieu: un hôtel à Casablanca. Les femmes politiques veulent que la presse s’intéresse plus à elles. Alors, elles organisent un séminaire pour en parler avec les professionnels des médias. Trois femmes politiques prennent la parole. Leurs interventions? Un plaidoyer suivi d’un réquisitoire sur le machisme ambiant qui régne dans la presse, le peu d’intérêt qu’on leur accorde, leur marginalisation délibérée…Et enchaînent en appelant les journalistes, sur le ton de l’obligation, à s’intéresser plus à elles et à les solliciter dans tous les sujets concernant la vie publique du pays.
Les journalistes prennent la parole à leur tour. Et c’est l’envers du décor. J’ai été convié à expliquer comment la question féminine est traitée à Tel Quel. Dès les premières idées énoncées, la salle, composée majoritairement de féministes engagées, se raidit. Et pour cause: Le magazine ne fait pas du “militantisme féministe” comme elles le souhaitent et ne dresse aucune discrimination positive à l’égard des femmes. Ce qui importe aux yeux des journalistes, c’est l’information, l’originalité, quel que soit son auteur. Homme ou femme, là n’est pas l’essentiel. La salle s’énerve. Le moment fatidique arrive: Pourquoi les journalistes ne font pas appel aux femmes politiques?
Il fallait percer l’abcès. J’ai sondé plusieurs confrères dans d’autres rédactions pour dresser ce constat. L’image que dégagent les femmes auprès de la profession est celle de la rigidité. Elles sont encore plus rigides que les hommes politiques, manquent de disponibilité et parfois leur rigueur (une qualité dans d’autres situations) ne permet pas au journaliste d’avoir une information croustillante, rapide et bien relevée par un commentaire “chaud” ou même un scoop. Les femmes politiques, à part quelques exceptions, versent souvent dans la langue de bois. Difficile de dresser une relation de confiance rapide avec elles. Et même si elles sont dans des bureaux politiques, elles sont parfois loin du centre de décision, donc elles ne constituent pas des sources d’information pérennes.
La salle s’emballe. Les femmes s’indignent, me foudroient du regard, profèrent des insultes: “Ne l’applaudissez pas. C’est une nulle!”. “Vous ne cherchez qu’ à vendre dans votre magazine. Honte à toi qui est femme de dire cela à propos de nous!”. “Nous sommes bien plus compétentes que vous!”. “Ne la laissez pas sortir. Son discours a été écrit par un homme!”. Bref: le souk. Une femme responsable de l’association qui a organisé l’évènement vient me demander gentiment de lui filer ma carte de visite après m’avoir descendu dans le dos auprès de ses copines féministes. Mais que voulez-vous? C’est le jeu de l’hypocrisie. Nos femmes sont trop dans leur discours de féministes “injustement écrasées par la société” pour pouvoir comprendre comment ça se passe de l’autre côté, comprendre que la presse a d’autres exigences de bouclage et d’originalité qui dépassent le sexe de la source. Elles ont pris ce que je leur ai révélé pour une opinion personnelle.
Il ne faut pas se voiler la face. Nos féministes se noient malheureusement dans un discours de complaisance qui les encense et les réconforte dans leur bataille contre le machisme. Elles ne sont pas prêtes à écouter les défaillances de leur propre discours, que la véritable bataille doit être menée au sein de leurs partis pour arracher de véritables responsabilités “communicatives” et non par l’imposition d’une approche “genre” dans la presse. Qu’elles montrent qu’elles sont capables de parler du Sahara comme de la Rapmania.

Tant pis, elles ont raté une bonne occasion de se rapprocher de la presse. Finalement, chacun restera dans son coin.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Nadia Lamlili 19707 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog