Butch McKoy ne se prend pas la tête
Butch McKoy n’est pas son vrai nom. Il est français, chante d’une voix sombre et douce à la fois, et répond aux questions de Zikaddict à l’occasion de la sortie de son premier album solo, Welcome Home.
Dans le décor cordial du bar Mizmiz, portrait d’un musicien plutôt franc.
Question : Ta musique m’a fait penser de façon générale à l’antifolk new-yorkaise : les Modly Peaches, Adam Greene… Est-ce que c’est une de tes références ?
Butch McKoy : Je fais ce que je veux. C’est un côté qu’ils ont aussi ; on ne se pose pas de questions, on se contente de jouer.
Q : Dans ce cas, tu joues pour toi ou tu joues pour ton public ?
Butch McKoy : Je pense qu’il ne faut pas trop se voiler la face ; avant tout, n’importe quel musicien joue pour lui-même. Après, certains rentrent dans différentes dynamiques, mais moi je reste dans cette dynamique-là, que ce soit sur cet album-là ou d’autres projets que j’ai à côté. Je le fais parce que j’aime ça et que j’ai envie de le faire. Je le fais d’abord pour moi… après si les gens adhèrent, tant mieux. On ne va pas cracher dessus non plus.
Q : Parlons justement de tes autres projets : en faisant tout ça en même temps, tu n’as pas peur de t’éparpiller ?
Butch McKoy : Non, parce qu’en fait je m’ennuie si je ne fais qu’un seul truc. Et encore, comme je ne vis pas de la musique, je travaille à côté, donc j’ai moins de temps pour la musique. Mais si j’en vivais, je pense que ce serait encore pire. Ce serait du non-stop à participer à plein de trucs. C’est le truc qui me fait le plus vibrer, tout simplement.
Q : Mais là c’est quand même grave : tu as trois groupes en plus de ce projet solo. Tu les envisages tous dans la continuité ?
Butch McKoy : Ah ouais, j’aimerais bien parce que tous sont différents les uns des autres. Ce sont des rencontres avec d’autres musiciens qui m’apportent tous des choses différentes. Quand on est dans un seul groupe, on côtoie toujours les mêmes musiciens. Donc on a des habitudes, on s’influence les uns les autres, mais ça ne sort pas du studio où on répète. Quand on rencontre d’autres gens, on apprend des choses, c’est bénéfique. Chaque projet m’apprend des choses. Et comme j’ai jamais pris de cours de quoi que ce soit, je suis friand de ça, de jouer avec des gens qui peuvent être plus compétents que moi.
Q : Et du coup, ceci est le premier album que tu composes entièrement tout seul ; ça ne t’angoisse pas trop de ne pas pouvoir te reposer sur quelqu’un d’autres ?
Butch McKoy : Ah non, justement ! Dans un groupe, on est obligé de respecter certaines règles. Alors que là, je m’en fous complètement. Par exemple, en concert, je suis totalement libre : si je ne respecte pas le tempo, peu importe, je suis tout seul.
Q : C’est ton terrain de jeu rien qu’à toi alors. Et pourquoi cette fascination – qui n’est pas récente – pour les Etats-Unis ?
Butch McKoy : En fait, c’est même pas une fascination. C’est purement et simplement ma culture musicale. J’habitais en Indonésie quand j’étais adolescent, et là-bas, ils sont ultra imprégnés de la culture musicale américaine. Ils piratent tout ! Et moi, quand j’ai commencé à écouter de la musique, mes premières cassettes je les ai achetées là-bas. Sauf qu’il y avait des magasins avec peut-être plus de quinze mille références : tout piraté ! Après, quand je suis rentré en France, je n’ai rien trouvé qui m’ait excité. Voilà comment c’est arrivé.
Q : Est-ce que la musique locale en Indonésie a pu inspirer tes recherches sonores parfois à la limite du tribal ?
Butch McKoy : Peut-être, oui. Il y a ce que j’ai vu là-bas, ce que j’ai entendu. Parce que la musique, là-bas, on en entend partout. Donc forcément, ça imprègne l’oreille. Donc voilà ; c’est pas des indiens d’Amérique, mais c’est quand même une forme de musique trans.
Q : Attention, question chiante. Pourquoi ta musique est aussi sombre ?
Butch McKoy : En fait, je n’aime pas du tout la pop, qui est pour moi une musique très gaie. En l’écoutant, je m’ennuie très rapidement. Quand j’écoute de la musique, j’aime que ça me provoque une émotion vraiment forte. Donc forcément, que ce soit le noise le plus extrême, le post-rock, le funk…ce sont des musiques qui sont très forte. Je veux dire : Neil Young, c’est pas gai, quoi, même s’il a des morceaux qui sont dans un schéma un peu pop – le fond de sa musique n’a jamais été gaie. Moi, inconsciemment, quand je joue, c’est pareil : j’ai envie de faire une musique forte qui va créer des réactions de l’autre côté.
Q : Tu joues la musique que tu as envie d’écouter, en fait.
Butch McKoy : Carrément.
Q : Tu as bien raison. Et sur le plan sonore, on a l’impression, à l’écoute, qu’il a été enregistré dans des conditions particulières…
Butch McKoy : Eh ben je l’ai enregistré tout seul, sur un huit-pistes à cassette. Il y a deux morceaux que j’ai enregistrés chez un copain, mais c’est pareil, il avait un matos un peu meilleur, mais pas tant que ça.
Q : C’est fait à la maison, quoi.
Butch McKoy : Ouais, voilà, pas du tout en studio. Enfin, ça a été masterisé après, quand même.
Welcome Home (Bruit Blanc), sortie : Avril 2009