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Kazakhstan : le forum international « Digital Bridge » place l’intelligence artificielle au cœur des débats

Publié le 25 octobre 2023 par Fabrice Rault @fabrice_rault
Centré cette année sur la thématique de l'intelligence artificielle, le plus grand forum d'Asie centrale consacré au numérique positionne le Kazakhstan comme une véritable plaque tournante de l'innovation digitale dans cette région du monde.

Le " Digital Bridge " a tenu toutes ses promesses. Le forum international du numérique qui s'est tenu les 12 et 13 octobre derniers au Centre international des expositions d'Astana, la capitale du Kazakhstan, avait choisi cette année de placer l'intelligence artificielle (IA) au cœur des débats. Durant deux jours, l'événement a accueilli plus de 250 intervenants, 300 start-ups, plus d'une centaine d'investisseurs de 15 pays, ainsi qu'un public de 20.000 personnes venues de quelque 30 pays. Parmi les nombreuses personnalités présentes, on peut citer notamment le capital-risqueur Tim Draper (fondateur de Draper Fisher Jurvetson et de l'Université Draper), Zhou Shouji, PDG de TikTok, Lauren Dreyer, vice-présidente de SpaceX et responsable de Starlink, Thomas Pramotedham, PDG de Presight Ai, ou encore Antonio de Palmas, vice-président du développement du marché mondial de Microsoft.

Le plus grand forum numérique d'Asie centrale

Organisé par le ministère du Développement numérique, de l'Innovation et de l'Industrie aérospatiale, en partenariat avec Astana Hub, la pépinière de jeunes entreprises positionnées sur les nouvelles technologies de la ville, le " Digital Bridge " est devenu en cinq ans " la plus grande plateforme d'Asie centrale pour discuter des perspectives du secteur des technologies de l'information", s'est félicité le président kazakh, Kassym-Jomart Tokayev, qui a inauguré le forum.

Une trentaine de conférences et de débats ont permis aux participants de discuter des questions les plus récentes en matière d'harmonisation de l'IA avec l'intelligence humaine. Les différents espaces d'exposition balayaient des domaines allant de la robotique à l'économie créative, en passant par la fintech et la gouvernance numérique. Les entrepreneurs ont présenté leurs projets dans la zone de pitching, tandis qu'un " salon de l'emploi ", à la fois en présentiel et dans le métavers, a présenté plus de 500 offres d'emploi de 20 grandes entreprises.

Le forum a également accueilli son premier sommet " Google for Startups " avec des représentants de 15 pays partenaires. Un événement qui marque la poursuite de la coopération entre Google for Startups et Astana Hub à travers le " Silkway Accelerator ", qui a déjà permis de lancer 37 startups pour une valeur cumulée de 400 millions de dollars. Cet événement a aussi été l'occasion pour le Kazakhstan de conclure 29 partenariats sur les technologies de l'information et l'innovation. Astana Hub, en particulier, a conclu huit accords visant à nourrir l'écosystème des startups technologiques d'Asie centrale et le marché du capital-risque du Kazakhstan. Quant aux " Digital Bridge Awards 2023 ", ils ont récompensé sept start-up innovantes, sélectionnées parmi 337 candidatures soumises par l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan, la République kirghize, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan, la Mongolie, le Pakistan, la Russie, Singapour et les États-Unis.

Astana mise sur l'IA

Sur l'intelligence artificielle, thème choisi pour cette cinquième édition du forum, le chef de l'Etat kazakh, Kassym-Jomart Tokayev, a constaté que l'IA " n'est plus de la science-fiction mais une réalité ". Et comme " cette technologie révolutionnaire détient un pouvoir de transformation comparable à l'impact de l'électricité et d'Internet ", et qu'elle " a le potentiel de remodeler les modes de vie, d'automatiser les processus de travail et de générer une valeur économique substantielle ", " son adoption généralisée " sera, pour le président kazakh, " un catalyseur essentiel pour le développement progressif du Kazakhstan ". Mais pour que ce progrès technologique soit durable, il est aujourd'hui nécessaire d'adopter un document réglementant l'utilisation de l'IA, souligne également Kassym-Jomart Tokayev : " nous devons accélérer l'élaboration d'une législation qui s'aligne sur les meilleures pratiques mondiales, en tenant compte à la fois des besoins du marché et des intérêts des citoyens ". Selon lui, le Kazakhstan doit concentrer les applications de l'IA sur les secteurs majeurs de l'économie nationale : l'énergie, l'agriculture, les transports et la logistique... Tout en réfléchissant à la transformation urbaine, afin de construire des villes intelligentes dans lesquelles il fasse bon vivre et travailler.

Le président kazakh ne cache pas son ambition de faire de son pays un " hub numérique " au sens propre du terme, en particulier pour la région de l'Asie centrale. La forte participation enregistrée au " Digital Bridge " confirme la position de leader du Kazakhstan en tant que plaque tournante du numérique et de la fintech en Eurasie. Pour le PDG d'Astana Hub, Magzhan Madiyev, le forum est un élément clé pour développer l'entrepreneuriat technologique dans la région, promouvoir la culture des startups nationales et accueillir de nouveaux acteurs dans l'écosystème numérique local.

Des enjeux économiques, mais aussi géopolitiques

À l'instar d'Israël, de l'Estonie ou de Singapour, le Kazakhstan compte en effet sur les nouvelles technologies et sur l'économie de la connaissance pour trouver de nouveaux leviers de croissance et accroître son influence. Preuve de la crédibilité de cette ambition, l'incubateur californien " Google for Startups (GSF) " a décidé en mai 2022 de poser ses valises à Astana pour ouvrir des programmes d'accélération à destination de startups dûment sélectionnées. Les jeunes pousses retenues sont accompagnées par les experts de Google dans leurs processus commerciaux, leurs levées de fonds et surtout pour le fameux " passage à l'échelle " de leurs solutions. Il s'agit de start-up du Kazakhstan, mais aussi des pays voisins, comme l'Ouzbékistan, l'Azerbaïdjan, la Chine ou la Russie, attirées par le climat très favorable des affaires.

Ce partenariat doit faire d'Astana la future " Silicon Valley " d'Asie centrale. Une main-d'œuvre hautement qualifiée, des coûts du travail et de l'énergie compétitifs, une fiscalité avantageuse et des capitaux en recherche d'investissement : le Kazakhstan ne manque en effet pas d'atouts pour devenir une pépinière à start-up. Quelques mois plus tôt, l'une des plus grandes plateformes au monde d'accompagnement d'entreprises innovantes, l'américain " Plug and Play Tech Center ", a aussi ouvert de nouveaux bureaux à Astana, pour profiter du boom économique et technologique du pays et multiplier les investissements dans des start-up locales prometteuses.

Les ambitions du pays sont économiques et financières, mais aussi géopolitiques : il s'agit de s'affirmer comme un acteur influent dans les nouvelles technologies. Le Kazakhstan souhaite devenir une " smart nation " à l'instar d'autres pays, qui ont fait des entreprises du numérique le fer de lance de leur économie et de leur influence à l'international. En matière d'IA, la question centrale ne serait plus en effet tant celle du " comment " ou du " quand ", mais bien celle du " qui " : qui en détient la vision, la conception, et selon quels intérêts ? A l'heure où les Etats-Unis et la Chine se livrent à une guerre technologique sans merci dans ce domaine, l'IA est en effet, au-delà des fantasmes et des réalités, un enjeu de puissance et un vecteur de pouvoir. Car qui dominera cette technologie dessinera en partie les contours du siècle qui advient.


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