Magazine Journal intime

Saloperie d'alcool....

Par Docrica

..en tout cas, quand il devient le problčme principal dans une vie.

X. est un homme,  dans la fin de sa quarantaine. Il était venu me voir pour la premičre fois il y a 3-4 ans.

Un gars qui lors du premier contact, m'avait paru "potentiellement hostile verbalement ou physiquement". Des raisons objectives pour cette impression, je n'en ai pas !

La consultation concernait des troubles digestifs et des douleurs abdominales, et il m'apprit avec confiance, qu'il avait un problčme d'alcool.

Nous avions décidé d'un bilan en milieu hospitalier, ce qu'il fit dans les jours qui suivirent.

Le résultat fut sans appel, une atteinte hépatique nette , compliquée de la présence de varices oesophagiennes. (Ces varices oesophagiennes, sont comme les varices des jambes... mais dans l'oesophage. Le principal défaut étant que si elles rompent... le patient peut se vider en vomissant son sang... situation hautement urgente et grave.. ! ).

Un traitement par bétabloquant fut institué, l'hopital préconisant un arret de l'intoxication alcoolique en milieu spécialisé.

X. vint me voir dans les semaines qui suivent, en m'annonçant qu'il avait spontannément et complčtement arręter de boire.

Ca a marché ! Quelques mois...

Son épouse m'a appellé il y a quelques mois, une reprise alcoolique semblait avoir eu lieu. Mais elle était nié par X.

Il vint en consultation, nous faisons le point.

Lui: "Non, je n'ai pas repris. Je me sens un peu nerveux lŕ. Je ne retomberais pas dans la bouteille".

Moi: "Il faut quand męme qu'on contrôle , l'état de votre foie, les varices oesophagiennes, et le reste..."

Lui: "Pas de problčmes. Pas toute de suite, car le travail est trčs prenant. Dans un mois ou deux".

Et c'est ce qu'il s'est passé. Peut-ętre le temps qu'il s'est donné pour que sa reprise alcoolique ne se voit pas "sur les examens". Ou peut-ętre que son travail était vraiment prenant. Peu importe.

Toujours est-il que le bilan montrait une évolution des différentes lésions, le foie toujours aussi flinguée. Ces varices, légčrement moins grosses, donc peut ętre moins menaçantes".

Quelques semaines plus tard, son épouse me rappela m'indiquant que ca devenait difficilement supportable ŕ la maison. Alcoolisation de plus en plus visible, troubles du comportement, tendance ŕ la "nervosité menaçante".

Il admit sa rechűte et nous décidions d'une hospitalisation en cure.

Moi: "Ils vont vous perfuser les premiers jours, essentiellement pour vous faire pisser le maximum possible. C'est le sevrage proprement dit. Ils risquent de vous ensuquer pour vous faire passer le cap"

Lui: "Ok. Ca me va."

Dčs mon retour du panama, son épouse m'appelle :

Elle : "Il est sorti il y a 2 jours, au bout de 10 jours. Il me dit que c'est le médecin de la clinique qui lui a dit de sortir mais je le trouve 'fragile'."

Moi: "Je n'étais pas au courant. J'ai ouvert tout les courriers, aucune lettre ne me signale sa sortie"

Trois jours plus tard, je suis en pleine consultation, qui vient d'etre interrompue ŕ 3 reprises par des coups de téléphones , je vois et sens l'exaspération de la patiente en face de moi.

Elle : "Je ne sais plus comment faire. C'est invivable. Mes enfants en ont peur maintenant. Il a dormi sur un banc cette nuit."

Moi : "Je n'ai toujours rien reçu de la clinique. "

Il s'ensuit un dialogue de 5 ŕ 10 minutes, oů X. intervient de loin, ŕ priori plus moins décidé ŕ venir me voir.

Moi: "Je suis en pleine consultation. Venez si vous voulez, mais je ne peux pas gérer ce problčme par téléphone."

Quelques dizaines de minutes plus tard je voix X. et son épouse assis sur le banc de la salle d'attente. X. rentre seul.

La discussion part dans tout les sens, parfois agressive, parfois au bord des pleurs, et du désespoir, tantôt culpabilisante, tantôt fataliste.

Lui : "Ils ne m'ont pas soigné. Car ils ne m'ont pas fais de prise de sang"

Je lui explique que ce n'est pas important dans le sevrage , la prise de sang.

Lui : "De toute maničre il n'y a pas de suivi."

Son épouse demande ŕ entrer, il accepte. Ca entraine un changement de comportement franchement plus agressif que la période précédente. Je sens qu'il arrivait ŕ se controler tant qu'on était que tout les deux. Lŕ, son épouse commence ŕ en prendre.. pleins les feuilles.

Je lui explique alors, que la premičre semaine de sevrage, est une phase physique, et que l'aide vient aprčs, mais qu'il n'a pas pu en profiter puisqu'il est parti trop vite, au bout d'ŕ peine 10 jours.

Ca le met en colčre, et je le sens devenir "proche ŕ me sauter dessus".

Pas de solution évidente. Il semble vouloir s'en sortir, reconnait son alcoolisme, mais est coincé dans une toile d'araignée alcoolique.

(Documentaire sur l'effet des drogues sur l'araignée)

Il veut etre pris en charge mais ne veut pas etre hospitalisé.

Il veut etre respecté et libre de ses mouvements dans la clinique, mais souhaite qu'on l'enferme.

Il veut qu'on le "booste" en lui donnant de la pčche, mais regrette qu'on ne l'ai pas mis dans le coma la premičre semaine.

Il exige qu'on s'occupe de lui de suite (un vendredi soir a 20h...) mais ne veut voir personne avant la semaine prochaine.

Que de frustrations, de déception, de stress, et quel manque de solutions.. La consultation doit lui laisser un gout amer autant ŕ lui , qu'ŕ moi.

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