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Afghanistan : nouvelle "bavure" meurtrière de l'OTAN

Publié le 25 août 2008 par Theatrum Belli @TheatrumBelli

Azizabad.jpgPlusieurs dizaines de civils auraient été tués vendredi dans le village d'Azizabad par un bombardement de l'Otan.

Hamid Karzaï n'en est pas à son premier "coup de gueule" contre les forces de l'Otan. Depuis quelques semaines, déjà, les critiques du président afghan s'étaient faites plus acerbes, dénonçant à l'envi les inadmissibles "bavures" de la coalition sous commandement américain. Depuis vendredi, il ne décolère pas. 95 civils, dont une cinquantaine d'enfants et une vingtaine de femmes, auraient été tués lors d'un bombardement américain près du village d'Azizabad, dans la province d'Hérat, à l'ouest de l'Afghanistan.

Vendredi soir, le ministère de l'Intérieur de Kaboul avait d'abord avancé le chiffre de 76 morts. Mais, après s'être rendus sur les lieux, des membres du gouvernement ont revu le chiffre à la hausse. 70 ou 95… il s'agirait d'ores et déjà de la "bavure" la plus meurtrière depuis 2001. Le mois dernier, les forces internationales avaient tué 64 personnes lors de deux incidents séparés.

Compromise depuis longtemps, la popularité des troupes occidentales en Afghanistan risque de souffrir encore davantage du drame d'Azizabad. Sur les quelque 700 civils afghans qui ont trouvé la mort au cours des six derniers mois dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler les "dommages collatéraux", 255 auraient été tués par l'armée afghane et les troupes de la coalition. Les autres auraient été fauchés par les tirs des talibans, ou auraient sauté sur les bombes artisanales que les rebelles islamistes plantent le long des routes. Destinées aux convois militaires, elles explosent souvent à l'aveuglette. "Ce dernier incident nous met dans une situation extrêmement difficile, car il apporte de l'eau au moulin des talibans", reconnaît un responsable de Kaboul qui ne veut pas dire son nom.

Après avoir démenti l'implication des forces de la coalition dans le bombardement d'Azizabad, des officiers américains ont indiqué qu'une enquête serait ouverte. S'en tenant pour l'heure à la version officielle : l'opération visait des talibans, et 30 rebelles ont été tués. Karzaï, qui vient d'annoncer qu'il sera candidat à sa propre succession lors des élections présidentielles de l'an prochain, est une fois de plus pris entre le marteau et l'enclume. Sa loyauté envers Washington ne fait aucun doute, mais elle risque, à terme, de lui coûter cher.

"Le président Hamid Karzaï condamne vigoureusement le manque de coordination de cette attaque aérienne par les forces de la coalition, dans le district de Shindand, qui a entraîné la mort de civils, dont des femmes et des enfants", indiquait dès vendredi un communiqué de la présidence à Kaboul. Annonçant dans la foulée que Karzaï avait ordonné une enquête sur ce massacre, et demandé à plusieurs ministères d'"élaborer un plan dans le but d'éviter qu'il y ait d'autres victimes civiles".

Furieux, plusieurs députés ont dénoncé un "acte cruel et barbare". Sur place, des centaines de personnes sont descendues dans la rue samedi, exigeant le retrait des Américains. "Nous continuerons de protester jusqu'à ce que la communauté internationale nous entende et que ceux qui ont bombardé vendredi soient traînés devant la justice", a déclaré Shah Nawaz, un "ancien" du district de Shindand. Un autre se lamentant : "Ils n'ont vraiment rien compris, ils ont tué des ennemis des talibans."

Dimanche matin, une petite délégation, dont les membres avaient été nommés par Hamid Karzaï, est arrivée à Azizabad. Un peu plus tard dans la journée, le président a limogé le général Jalandar Shah Behnam, chargé de la sécurité à l'ouest de l'Afghanistan. L'armée afghane participe de plus en plus souvent aux opérations de l'Otan.

Le président afghan ne s'en cache plus, ce sont en fait les officiers occidentaux reconnus coupables de «bavures» qu'il aimerait voir comparaître devant la justice afghane. "On ne peut justifier aucune victime civile (…) Les Afghans ont fait d'énormes sacrifices dans la guerre contre le terrorisme. Sept ans après, ils meurent encore dans leurs villages", expliquait Karzaï dans une interview au magazine américain Time, mardi dernier. Et de trancher : "Oui, le Sénat, qui est la voix du peuple, a raison."

Source du texte : FIGARO.FR


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