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Dmitri Medvedev n'a "peur de rien", pas même d'une nouvelle "guerre froide"

Publié le 26 août 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Mardi, 26 Août 2008 16:05

LE GRAND DÉFI

Par Daniel RIOT

Et maintenant ? Jusqu'où ira l'escalade vers une nouvelle « guerre froide » ? C'est une deuxième secousse sismique géopolitique mondiale après le séisme géorgien.

Tbilissi était responsable du premier tremblement. Moscou doit assumer pleinement ce qui incontestable un coup de hache dans le droit international, une rupture des engagements de bonne conduite prise par la Russie en entrant dans la « famille » du Conseil de l'Europe. Et une provocation aux conséquences sans doute calculées mais difficiles à prévoir en détail et à maîtriser.

Un grand défi. Comme l'Europe n'en a pas connu, pas même dans les Balkans, depuis la chute du Mur...

Cette décision scandalise les dirigeants européens et américains, mais la rapidité des réactions montre que cette décision n'est pas une vraie surprise. Les optimistes avaient tort. D'autant plus que le ton utilisé par Medvedev est particulièrement cassant et brutal. Menaçant, même.

Le président russe lance haut et fort qu'il n a « peur de rien", y compris d'une nouvelle "guerre froide" avec l'Occident... C'est toutes proportions gardées, Khrouchtchev tapant avec sa chaussure sur le pupitre de l'ONU. Même si le même Medvedev assure ne pas vouloir ce qu'il dit ne pas craindre...
"Nous n'avons peur de rien, y compris d'une guerre froide. Bien sûr, nous ne la voulons pas", a-t-il dit dans une interview à la chaîne d'information russe en langue anglaise Russia Today."Dans cette situation, tout dépend de nos partenaires, de la communauté mondiale et de nos partenaires en Occident", a-t-il ajouté. "Si les Occidentaux veulent conserver de bonnes relations avec la Russie, ils comprendront les raisons de notre décision" de reconnaître l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie." (...)"Ce n'est pas un choix facile mais c'est l'unique option pour préserver les vies des gens"
Il explique, sans avoir peur de mots que Poutine avait déjà utilisés :"Tbilissi a fait son choix dans la nuit du 7 au 8 août (en lançant une offensive militaire contre l'Ossétie du Sud). Saakachvili a choisi le génocide pour atteindre ses objectifs politiques (...) Il a ainsi fait une croix sur tous les espoirs de cohabitation pacifique des Ossètes, Abkhazes et Géorgiens dans un même Etat".
A Soukhoumi et Tskhinvali, capitales d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud, les habitants sont descendus dans la rue et ont célébré en klaxonnant et en tirant en l'air à l'arme automatique l'annonce de leur reconnaissance par Moscou, rapportent les agences de presse.

Le prochain pas dans l'escalade serait que Moscou accède aussi aux demandes des deux régions séparatistes de recevoir des armes ("défensives" bien sûr) russes. Une menace déjà agitée par le Kremlin avec celle de missiles en Biélorussie voire à Kaliningrad. La course aux armements en Europe est repartie depuis les accords américano-polonais sur les Patriots. La décision russe d'aujourd'hui risque de l'accélérer et de l'aggraver.

Cette décision donne bien sûr une importance accrue au Sommet exceptionnel des 27 convoqué par Nicolas Sarkozy le 1er septembre  à Bruxelles. Elle donne logiquement des arguments à ceux qui sont, depuis de début des hostilités en Géorgie, pour une attitude dure face au Kremlin, même si la facture économique s'annonce lourde.
Si Medvedev a voulu tester encore (et un peu plus) la capacité de réaction de l'Union européenne et de l'Otan, il a pris le risque de pousser le bouchon un peu loin. Il avait au moins la possibilité de prendre acte des vœux des deux régions et des deux chambres russes et de proposer des négociations sur le statut de l'Ossétie et de l'Abhazie avec toutes les parties concernées, y compris dans des organisations qui sont faites aussi pour cela, telle le Conseil de l'Europe. Il a choisi de trancher dans le vif. Unilatéralement. En prenant sa revanche sur le Kosovo, ce qui n'a rien de rassurant ni pour les Kosovars ni pour les Serbes du Kosovo.
Reste à savoir comment le mot « inacceptable » qui apparaît dans toutes les réactions officielles européennes et américaines va se traduire en actes. « Inacceptable », c'est ce qui ne peut être « accepté », donc admis, avalisé, ...et doit être rejeté, non concrétisé. C'est un truisme, mais en diplomatie les lapalissades servent souvent de palissades. Nous en étions à la condamnation formelle du « disproportionné » : nous voici dans la phase de « l'intolérable ». Attention danger ! Il est des engrenages qui deviennent et vite fous. Ou rendent fous.
Daniel RIOT

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