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A Baden-Baden, un jour d'été...

Publié le 26 août 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

Comme une horrible et douce macédoine d'Histoire...
A Baden-Baden, un jour d'été...

Par Francis Rosenstiel

Je suis une fois encore en ces belles journées de la fin d'août dans les jardins apaisés du « Brenner's Hôtel § Spa » de Baden-Baden
La BMW qui m'a menée jusqu'ici est garée, non loin de là, sans doute , tout près de ces villas où d'anciens nazis furtivement" châtiés" ont passé une retraite paisible qu'ils n'ont jamais méritée. Un doigt pointé qui perdure dans son inflexible rigidité!
Je ne sais pourquoi; je n'ai pas de réponse simple à tout cela.
"La vie reprend "ses " droits » n'en est pas une! La réconciliation pas davantage! Trop facile !
"Un peuple sans mémoire n'a pas d'avenir!" Disais-je un jour. Cela fonde mon action.
Je ne me satisferai jamais de la formule « il faut savoir tourner la page » en ce domaine précis.
Peut-être parce que j'aime trop l'Allemagne !
Tel un cristal, l'endroit immuable de douceur reflète et inspire une confusion d'images bien souvent heurtées et hurlantes de silences, malgré le piano qui égrène Schubert dans le parc. Tumultueuse histoire que celle de ces lieux où se succèdent vieux messieurs («die alten Herren") et jeunes dames, vieilles dames et jeunes gens, cosmopolites ou non, ...selon.

« Dire vrai », n'est-ce pas d'ailleurs, dans la nature impertinente d'un miroir ? Surtout savamment bizoté par l'histoire !

Pour moi l'originalité de ce "Lieu" Allemand est comparable à celle d'un Bayreuth, "stérilisé, ou "pasteurisé"...: comestible, pourrait-on dire.tout autant qu'indigeste!
Mais que l'on ne s'y trompe, il s'agit d'une indigestion qui soigne sans guérir, car elle entretient la mémoire, comme absolument tout dans ce fascinant pays, où je puise quelques fragments de mes racines. Mais gare aux engrais!

A Baden-Baden, un jour d'été...

Que n'a-t-on vu "défiler" en ce lieu magique?
L'hôtel le rappelle intelligemment dans la présentation de sa propre histoire.
" Nazi-Prominenz", ce qui ne se traduit (heureusement) dans aucune langue. ; La dynastie Oetker et ses attaches coupables au régime, dès 1933. Puis les « pairs », en version captive et en cours de re-cyclage par les Alliés: .après 1945 ; la littérature abonde à ce sujet.
Aujourd'hui, toujours un service parfait, autres hôtes; mannequins tous types de collections, en peu façon Vichy....Quelques vieilles dames juives revenues ici dépenser leurs dérisoires deniers allemands, hâtivement, dits de "réparation".
Ce lieu reflète "l'éternité palace"... Un "look" bien particulier.
S'y côtoient, en vrac, comme une horrible et douce macédoine d'Histoire : authentiques vieilles allemandes tout temps ,"permanentes" ou "indéfrisables" bleutées ,déployées,conviviales et dociles entre elles;elles paraissant heureuses de se survivre,car elles se savent "quelque part" éternelles;. Les maris ou les pères sont peut-être tombés sur le front russe", (à l'Est comme l'on dit là bas), rarement à l'Ouest, l'un des derniers tabous.
Le front de l'Ouest serait-il devenu miraculeusement "clean"? Les morts ne se réconcilient pourtant pas! Il reste toujours un Styx, et ses cerbères !
Non loin, sous la véranda, petites tablées de jeunes russes gâtés du grand recyclage doré est européen, dépensiers et jouisseurs, tous genres confondus.
Et puis, comment l'oublier, en contraste, tout près, attablé en partage de gourmandises malsaines,un Juif, porteur inguérissable de la mémoire collective,qui n'en finit décidément pas de s'interroger sur ce qui n'aura jamais de réponse:pas même,la véritable (dé)-raison de sa présence ici.
J'allais oublier le décor d'une irréprochable permissivité démocratique (un pléonasme qui peut s'avérer douloureux).Aux murs des estampes de personnages inconnus, d'une imparable innocence; cadres que l'on pourrait imaginer ouverts de côté,pour mieux pouvoir y glisser les images de circonstance ,"Konformes "aux temps.
Oserai-je regretter de n'avoir songé à consulter les livres « d'or » ?
Pour sublimer le tout,en hommage à la victoire des normalités nouvelles :au service ,attentives et courtoise, des jeunes filles adorables ,ponctuées de quelques maîtres d'hôtel à l'oeil vigilent, question de rappeler, au détour,le bon vieux temps (peut-on dire la Tradition?).
Tradition ou rappel éternel de toutes les indifférences confondues et confondantes ?
Francis Rosenstiel
ambassadeur de bonne volonté du Conseil de l'Europe et président fondateur du Forum pour l'Europe démocratique


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