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Citizens’views #7 “Le Post est, dans la même lignée, un média de conversation.” Benoit Raphael, rédacteur en chef du Post.fr, qui fête son premier anniversaire

Publié le 10 septembre 2008 par Lilzeon

10 septembre. Pour le premier anniversaire du Post.fr, Benoit Raphael nous fait l’honneur de répondre à ce citizens’ views. Benoit Raphael est le rédacteur en chef du post. fr, le média laboratoire lancé par le Monde Interactif. Benoit est aussi blogueur sur Demain tous journalistes depuis 3 ans. Il mène une conversation autour des médias et du journalisme. Avant ses activités dans les nouveaux médias, Benoit Raphael travaillait au Dauphiné Libéré où il était directeur adjoint de Vaucluse Matin, puis a élaboré la stratégie internet du groupe. Dans ce cadre, il a créé un média éphémère pour le Dauphiné Libéré qui avait eu un certain succès “quelcandidat.com“.

  • JC Dassier qualifie le journalisme citoyen de vaste fumisterie. Qu’en penses-tu ?

D’abord, de quoi parle-t-on ? Le journalisme citoyen est un mythe, né d’un concept qui a émergé aux Etats-Unis avec Dan Gilmoor (auteur de “we the media”) et de l’expérience pionnière d’Oh My News en Corée du Sud, mais dans un contexte très particulier  où le déficit de liberté d’expression appelait la naissance d’un média alternatif. Un blogueur n’est pas un journaliste citoyen. C’est un particulier qui produit une information: la sienne, son témoignage son analyse, ses documents, ou qui pointe l’attention des internautes vers d’autres informations en lui donnant du sens.

On évolue donc aujourd’hui autour d’une notion plus large, l’information échappe au journaliste, elle n’est plus l’apanage des médias. Elle déborde. On la voit émerger de façon brute sur Youtube, dans les forums ou sur les blogs. Je reprends la définition donnée par CNN sur son site colllaboratif “iReport”: “unedited, unfiltered, news” ! C’est de l’information non filtrée, non éditée, mais ça reste de l’information… de l’information brute. Nous avons donc devant nous une nouvelle réalité les journalistes doivent en faire quelque chose. On ne peut pas simplement lui tourner le dos, les journalistes doivent faire ce qu’ils savent déjà faire: vérifier, trier, éditer. L’information circule, il faut décrypter la validité de l’info.

Le rôle du journaliste est compliqué : cette multiplication des sources d’information pose la question d’une recomposition du paysage de l’information . Le rôle du journaliste, je l’ai dit, c’est de vérifier l’info et de l’éditer. Cela sera-t-il encore vrai demain? Quel rôle va-t-il lui rester ? L’enquête ? Ça coute cher. On ne sait pas encore comment cela va exactement s’organiser.
Ce qui est clair, c’est qu’il y a du contenu généré par des utilisateurs. ça peut être des données brutes, de l’information, une image, un témoignage, ou simplement une veille : on voit bien qu’on n’est plus dans la définition traditionnelle du média classique.

En face, on a des journalistes en ligne, et ces univers cohabitent. Le Post se situe à cette frontière et cherche des solutions en expérimentant des nouvelles pratiques de journalisme collaboratif.

L’enjeu aujourd’hui, c’est qu’on doit expérimenter, travailler sur ces mécaniques. Avec le Post, le but n’était pas de faire Le Monde pour les jeunes, mais de tester en toute liberté, de tirer des conclusions.

  • On reproche souvent un côté un peu fourre-tout quand on parle du Post…

Revenons sur une de nos pistes: le Post est un média collaboratif où une rédaction composée de journalistes professionnels travaille avec des internautes, partant du principe que chacun est expert de son propre quotidien. Le Post s’appuie sur tout ce matériel, et engage une conversation permanente avec son audience.

Le Post, c’est un site d’actualités, d’information au sens large, qui repose sur une communauté.

Il y a là, on le voit, une contradiction difficile à gérer : c’est à la fois une plateforme de contenus et en même temps une rédaction. Les journalistes y créent une interface humaine, qui travaille avec les internautes. Le Post, c’est en quelque sorte un mélange de Dailymotion et de site d’informations. On voit une cohabitation entre des infos créées par les journalistes, des infos créées par des journalistes grâce au matériel des utilisateurs, des infos créées complètement par les utilisateurs. Il y a de l’info brute, de l’info éditée et vérifiée, chacune porte un label qui garantit sa traçabilité: qui a écrit cette info? a-t-elle été vérifiée par la rédaction etc. ?

Au coeur de ce dispositif, Le Post a créé un métier :  “le coach”: c’est un journaliste qui accompagne les internautes, leur apprend la collecte et le traitement de l’info, et recueille  des témoignages.

Le Post est un site grand public, qui dans la ligne éditoriale est proche du Parisien, de RTL ou RMC. Pourquoi ? Parce que les débats posés intéressent le plus grand nombre, Le Post veut réussir à réaliser ce pari de la contribution, populaire et grand public.

D’où cet élargissement volontaire du champ de l’info à tout ce qui alimente les conversations des Français: d’où ce grand écart entre les faits divers et le people, qui cohabitent avec de l’info politique, surtout française, des témoignages, ou des grands débats de société. On essaie de se rapprocher du quotidien des lecteurs. La seule ligne éditoriale peut être résumée de la sorte : de quoi on parle en ce moment ? C’est quoi l’émotion en France ? C’est quoi le débat ? On s’intéresse aux conversations.

On nous a comparé à des sites beaucoup plus textuels. Or le Post fonctionne comme une radio. Quand on écoute RMC le matin : les gens témoignent ! RMC est LE premier média 2.0 ! C’est une info moins fouillée que Le Monde, bien sûr, mais ce n’est pas le même objectif.

Le Post est, dans la même lignée, un média de conversation.

La vraie Une du Post, on s’en est rendu compte, c’est Google. Nous nous sommes aussi rendus compte que nous n’avions plus de cible précise. Les gens arrivaient de n’importe où, en fonction de leurs équations de recherche. Donc notre réponse à ça, et c’est un défi pour le futur : c’est que Le Post doit réussir le grand pari d’une info accessible mais qui ne s’interdit aucun sujet, même les plus pointus. Nous n’y sommes pas encore. C’est le pari d’une grande communauté, d’une info qui s’appuie sur la richesse de la communauté. Et on ne lâche pas.

Un de nos axes de réflexion aujourd’hui, c’est: comment faire participer la communauté à la ligne éditoriale, à la modération ? Nous sommes en train d’avancer sur ces sujets.

Depuis janvier, le site progresse de 20% chaque mois. En Juillet nous avons dépassé les sites de l’Express et du Point. Selon l’OJD, nous sommes le 8eme média d’infos généraliste français sur Internet, juste derrière le Parisien. Et depuis début septembre la hausse s’est même accentuée.

  • Et quelle serait ton utopie réalisable grâce au web ?

On rêve tous de faire un média idéal, qui soit capable de casser toutes les barrières, d’avoir l’information la plus proche de la vérité, qu’on arrive à un média qui permette une info parfaitement concertée entre les journalistes et les lecteurs, la plus accessible, et en même temps qui soit suffisamment puissant pour faire parfois passer les choses les plus complexes, les subtilités de l’art. Un média global, généreux, qui aide les citoyens à s’épanouir dans leur quête d’informations et de sens. Un média complètement ouvert, vivant, protéiforme, sans limite, qui passe du plus léger au plus subtil. Une mécanique qui s’ouvre sur la communauté pour ne pas être un média dirigé par une élite ou par les seuls journalistes.

  • Merci Benoit. Et rendez-vous très bientôt sur Dailymotion et Le Post.fr pour un concours à l’occasion de votre premier anniversaire !

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