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Une nuit, je ne dormais pas

Publié le 04 septembre 2008 par Unepageparjour

Une nuit, je ne dormais pas, car j’étais très malheureuse. Et pourtant, le soir, nous avions fêté avec Mathieu, mes parents et les siens, notre réussite commune au concours d’entrée d’une école prestigieuse. J’avais travaillé, travaillé, travaillé…travaillé. Toute ma famille, mes amis, mes professeurs, m’avaient félicité. J’avais fait presque aussi bien que Mathieu, c’est pour te dire ! Mais ce que je n’avais jamais ressenti jusqu’à cette nuit-là, c’était l’inutilité, le vide de cette quête. Je ne m’étais jamais posée cette question « est-ce cela que je veux ? au plus profond de moi, est-ce vraiment cela que je veux ? » Depuis cette histoire des fées, j’avais écouté tout ce que l’on me disait, j’avais suivi tout ce que l’on me disait de faire. Et la petite fille joyeuse qui aimait regarder le soleil danser avec la rivière était devenue, sans que je m’en aperçoive, une pauvre poupée de chiffon. Cette nuit-là, je recevais cette révélation terrible : une poupée de chiffon, qui a réussi le concours d’entrée d’une grande école !

Marie s’arrête de nouveau. Elle n’a plus froid, maintenant. Elle sait que le froid qui la pénétrait tout à l’heure n’était pas celui de cette douce nuit d’août, mais de cette autre nuit. En parlant à Fleur, elle s’aperçoit qu’elle a marché très vite. Elles ont dépassés le restaurant sans même s’en apercevoir. Elle fait alors demi-tour une nouvelle fois. Les lumières paraissent encore plus loin que tout à l’heure.

Alors, désespérée, je suis allé vers la rivière. J’ai marché longtemps, un peu comme ce soir, tu vois, Fleur. Sur cette petite route. On entend bien l’eau, mais j’avais peur, malgré tout, de m’en approcher d’avantage. J’avais peur et j’avais mal et j’avais froid. C’était l’été pourtant, comme aujourd’hui, mais la chaleur du jour avait laissé la place à une nuit terriblement glaciale et sombre. Après avoir longtemps marché, l’esprit empli de cette image de petite chose insignifiante que j’étais devenue, du dégoût de moi-même, de la nostalgie d’une enfance heureuse et lumineuse, perdue à tout jamais, j’étais allée sur la berge. Au plus près des eaux noires. Un passant qui m’aurait vu, aurait pu croire que mon intention était de me noyer, de disparaître à jamais dans le tumulte du courant, mais il n’y avait pas de passant. Il n’y avait personne. Personne pour oser regarder les terribles eaux noires.


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