Machiavel, Ze Concert

Mario Guccio, le chanteur.

Avant l'article, une mise en garde s'impose.

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Mercredi 24 au Botanique à Bruxelles il y avait Machiavel en concert acoustique.

Dois-je y aller ou pas ? Et comment en parler ?

Délicat.

Si j'en dis du bien, on va me traiter de faux cul et si j'en dis du mal, je risque de me faire virer. Pire encore, on risque de me garder… et de me forcer à retourner voir un concert de Marilyn Manson ou des Cardigans !

A force d'y réfléchir, j'ai fini par m'endormir. Dans la nuit il me semble m'être vaguement éveillé, un peu comme Keith Richards, la nuit où il a trouvé le riff de Satisfaction. Dans une vague lucidité, je crois que ma main a griffonné des trucs sur un carnet.

Le matin, il y avait ceci sur le carnet : ne pas oublier d'aller chez Carrefour et d'acheter deux kilos de riz, de la sauce tomate, du pain et un CD .

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Mais de quel CD pouvait-il bien s'agir ?

En y réfléchissant j'ai essayé de rassembler mes souvenirs du concert de la veille. Je me suis souvenu de mon voisin, animateur chez des concurrents dont le nom m'a échappé et assis comme moi sur les marches du Botanique. Il m'a donné un petit coup d'épaule pour me dire : “…des trois soirées en concert que j'ai passées cette semaine, celle-ci est vraiment la meilleure.”

Puis il s'est mis à me raconter ce qu'il voyait, je voyais la même chose.

… Cette façon qu'ils ont de plaisanter sur la scène entre musiciens est très engageante, ça donne au public l'impression de faire partie du groupe, ça crée une vraie convivialité. Il faut dire que les gars ont 30 ans de vie commune, ils connaissent le job.

Thierry Plas, guitariste.

L'exercice de l'acoustique leur plaît, ils s'amusent.

Sur le “la la la la la la” de Fly, alors que tout le monde chante, une voix venue de la scène dit ”J'espère que vous aimez les paroles parce que nous, on s'est cassé le cul à les écrire !“

Le concert a été en grande partie traversé par cet esprit. A l'exception évidemment de moments plus intimistes comme le solo au piano à queue de Hervé Borbé avec cette chevelure propre aux rockers ou aux scientifiques des films de Hollywood. Ou comme l'interprétation de Mary et Mary's dream, deux morceaux à l'histoire commune mais qui font album à part avec 22 ans d'écart.

Marc Ysaye, batteur.

Fly a été un tube, mais ça n'a jamais été mon truc. En tout cas dans la version électrique. Mais en acoustique, c'est comme découvrir un nouveau morceau dont on connaîtrait déjà la mélodie par une télépathie inconsciente. On gagne du temps.

Dans la soirée ou a eu aussi Over the hill, franchement reggae. Ma tendance à aimer le reggae comme genre majeure de la musique des quarante dernières années, était comblée. Je savais bien que Machiavel était un groupe de reggae. Clapton aussi a fait du reggae comme Monsieur Jourdain faisait de la prose.

Thierry Plas, guitariste.

Thierry Plas, le guitariste, a hésité au début du morceau “C'est un nouveau morceau, je ne le connais pas bien !”

Du coup, c'est la batterie de Marc (je l'appelle Marc pour faire croire que je le connais!) qui a lancé le morceau. J'aurai bien vu les membres du groupe en rastas avec des dreadlocks. En tout cas je comprends mieux pourquoi le concert devait initialement avoir lieu en joint…euh en juin.

Mario Guccio, le chanteur.

Les musiciens semblaient à l'aise, ils jouaient certainement comme ils le font aux répétitions, sans pression, juste en pleine décontraction et avec passion. Le public était à l'aise aussi, par contagion. Ça en fait des “ions” et que des ions positifs !

Une soirée acoustique, c'est rare, il faut en profiter, on se sent bien, tranquille, c'est une peu comme une séance de thérapie collective, rien de grave ne peut nous arriver.

L'avantage de l'acoustique est qu'on apprécie beaucoup mieux le travail de chaque musicien. Dans un concert électrique, on vient chercher du son et des watts, tout est fort, les subtilités se perdent dans la masse musicale. Pour y trouver le travail du bassiste là dedans, il faut déjà avoir les tympans bien exercés.

La veille, au concert de Queen par exemple, j'ai su qu'il y avait un bassiste lorsque j'ai vu un type s'approcher de Brian May, j'ai pu alors compter 4 cordes sur sa gratte.

Ici, c'était différent, on pouvait apprécier le groove de Roland De Greef et même presque détailler le slapping. On avait l'impression aussi d'avoir plus de temps, ça permettait d'observer l'attitude de Thierry Plas, concentré et appliqué sur son instrument.

Roland de Greef, bassiste.

Ce climat à la fois feutré et bon enfant n'était pas sans me rappeler les ambiances de certains soirs au festival de Montreux en Suisse. Et même s'il n'y avait pas de cuivre, il y avait du Miles Davis dans cette soirée. En sortant j'ai d'ailleurs voulu me baigner dans le lac, avant de me rappeler qu'à Bruxelles il n'y avait pas de Lac.

Le fond de scène.

Le décor était minimal, une toile tendue en fond de scène, une fenêtre ouverte permettait d'apercevoir des toits et au loin des intérieurs éclairés. Le temps de regarder si un intérieur laissait entrevoir un déshabillé en soie, les pans du manteau de Mario Gucci s'échappaient de la scène. C'était fini.

Mon voisin m'a alors demandé si c'était vrai qu'il y aurait le même concert dans un mois, le 22 octobre à Mons. ”Et tu crois qu'un CD acoustique va sortir ?”

C'était donc ça, le CD que j'avais instinctivement inscrit sur ma liste de courses. Pour l'acheter il faudrait me priver sur d'autres choses, d'où le riz que j'allais manger pendant des semaines…