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Quand le procureur défend le préfet

Publié le 08 octobre 2008 par Letuyo

Ce n’est quand même pas tous les jours qu’un préfet est cité devant un tribunal correctionnel. C’est encore moins courant d’assister à un procès pour recel de violation du secret de l’instruction. Mais alors, voir un préfet poursuivi pour ce délit extrêmement rare (et qui frappe habituellement des journalistes), c’est carrément unique dans les annales de la justice ! Le procureur Eric de Montgolfier ne s’y est pas trompé, puisqu’il a pris sur son temps pour venir en personne prendre des réquisitions dans cette affaire qui pourrait faire encore couler beaucoup d’encre.

Mais de quoi s’agit-il au fait ? Une paille : fin 2006, un lot de cigarettes est volé dans un dépôt de la Seita. La police soupçonne un restaurateur de Saint-Laurent-du-Var d’en écouler une partie dans son établissement. En marge de l’enquête judiciaire, la préfecture demande au tribunal administratif de fermer le commerce. Pour nourrir son dossier, le préfet y glisse des PV d’audition tirés de la procédure judiciaire. Problème : ces documents sont couverts par le secret de l’instruction. Le préfet n’aurait jamais dû les détenir ; le propriétaire du restaurant saisit la justice.

« Les voyous et les préfets »

« La loi fonctionne de la même manière pour tout le monde : pour les voyous et pour les préfets » assène à la barre l’avocat du restaurateur. « Hypocrisie », rétorque le procureur. « On demande au préfet de prendre des mesures sans qu’il ne puisse s’appuyer sur rien ». Pour Eric de Montgolfier, si la violation du secret de l’instruction est réelle la condamnation du préfet pour recel de ce délit n’a rien d’évident.

Son raisonnement juridique tient du numéro d’équilibriste : le préfet a produit des documents couverts par « le secret », soit, mais il l’a fait dans le cadre d’un procès et il doit donc bénéficier de « l’immunité de juridiction ». C’est prévu par l’article 41 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse : « ne pourront donner lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni les propos tenus, ni les écrits produits, devant les tribunaux ». Il réclame l’irrecevabilité des poursuites au tribunal. Délibéré le 27 octobre… en attendant un probable procès en appel, puis en cassation.

Tags :montgolfier, préfet, secret de l'instruction

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