On attendait énormément de Fernando Meirelles après le très bon La Cité de Dieu et l'exceptionnel The Constant Gardener. Présenté pour la première fois à Cannes cette année en film d'ouverture, Blindness avait quelque peu déçu ce qui a conduit Meirelles à remonter son film, à supprimer les clichés religieux ainsiq ue la plus grande partie de la voix-off by Danny Glover. Le résultat ? Une baffe remuante doublée d'une plongée inquiétante sur le comportement primaire des humains. De quoi affoler et fair réfléchir. En partant d'une épidémie incomprise aveuglant la population d'un pays entier puis à l'échelle mondiale, Meirelles nous positionne en tant que témoin d'une déconstruction visionnaire d'une société. Faisant place à l'éveil des sens tout en réduisant l'Homme à l'état d'animal, Blindness provoque cet obscur sentiment de malaise en voyant l'évolution régressive des cerveaux de ce monde. De la ciilisation à la survie il n'y a qu'un pas et cet handicap de la vue, prémice d'une apocalypse annoncée, secoue sévèrement : Fornication mécanique, rapprochement des êtres par le "mal", négociations pour survive, déshumanisation, violence physque et mentale, chantage... la bête qui sommeille en chacun de nous se réveille et la société civilisée fini par exploser en une société précaire sans foi ni loi. Spectateurs de ce cauchemar qui pourrait nous guetter sous une toute autre forme, nous nous retrouvons pris au piège sadique de voir un pan entier de notre monde se consumer. A l'aide d'une lumière jouant avec brio le thème du "clair / obscur", d'une image au fort grain, d'un montage à la fois très "cut" et esthétisant, d'une musique envoûtante sans oublier un réalisme foudroyant de sncérité et de proximité, Blindness remue et nous hypnotise Le choix des comédiens, tous impeccables, se charge de faire le reste. Qu'il s'agisse de Julianne Moore extraordinaire en bergère à responsabilités complice de notre voyeurisme, de Mark Ruffalo fantastique en homme responsable devenant esclace de ses sens ou bien encore de Danny Glover stupéfiant de simplicité en passant par Gael Garcia Bernal représentant la pire de espèces pouvant se fondre dans la masse... l'intégralité de la distribution en impose. Proche des Fils de l'Homme ou bien encore de 28 semaines plus tard dans le traitement des thèmes et de l'image, Blindness fait parfois office de déjà-vu, ce qui l'handicape quelque peu et ralentit parfois sa mécanique provoquant quelques ralentissements de parcours. Il se dégage pourtant une force narrative passionnante entièrement constituée de non-dits et de hors champs évocateurs, un climat déroutant et une violence sexuelle comme physique et mentale déstabilisante. Une richesse totale de thème pour un drame sensible et à vif qui se devra de vieillir avec le temps. Blindness soulève pourtant d'excellentes questions à l'image du dénouement où le discours final du personnage de Glover remet en question les fondations d'une humanité toute entière : l'entraide humaine et la déshumanisation barbare sont-elles distinctes ou vont-elles de paire ?
Pourquoi y aller ?
Pour la réalisation nerveuse et la photographie. Pour l'ensemble du casting tous impeccables.
Ce qui peut freiner ?
Les quelques ralentis de l'intrigue ainsi que les "quelques" moments de déjà-vu.