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Pour en finir avec la diabolisation de l'étalement urbain

Publié le 20 octobre 2008 par Objectifliberte

Sprawl_2 Les lieux communs sont des expressions simplificatrices porteuses d'idées implicites tellement galvaudées que plus personne ne pense à s'interroger sur leur réelle pertinence.

En politique, les lieux communs sont d'usage fréquent, car ils permettent de tenir lieu d'ersatz d'intelligence aux politiciens les plus incultes. Malheureusement, leur acceptation sans examen critique par la population permet à ces mêmes politiciens, et surtout aux lobbys qui vivent des conseils qu'ils leur prodiguent, de justifier des mesures souvent coûteuses, attentatoires aux libertés individuelles, et aux résultats parfois catastrophiques.

Le lieu commun, tel que le réchauffement climatique, la folie des marchés financiers, le transport multimodal ou le développement durable, est rabâché aux populations par un matraquage politico-médiatique sans relâche. Nombre d'idiots utiles du lieu commun s'auto-intoxiquent des préjugés sous-jacents au point d'en devenir des zélotes quasi religieux. Dans les entreprises, des séminaires lieu-communards sont organisés pour lobotomiser, pardon, "sensibiliser" les troupes aux nouvelles valeurs lieu-communistes que l'entreprise adoptera dans son énième plan stratégique.

Le lieu commun est la plaie de la vie intellectuelle, sociale et politique. Or, le lieu commun y est omniprésent.

Il est donc essentiel, bien que la tâche soit souvent malaisée, de confronter les lieux communs aux faits. Pour commencer, je vais m'attaquer à un lieu commun peu connu du grand public: l'étalement urbain, dont certains voudraient nous faire croire qu'il constitue l'une des pires menaces contre la qualité de vie, l'environnement, la faim dans le monde, et la stabilité climatique.  Non, je n'exagère pas !

L'étalement Urbain, une fausse menace à démystifier d'urgence
L’étalement urbain (en Anglais, "sprawl") est un des grands lieux communs de l’urbanisme et de l'aménagement du territoire aujourd'hui. C'est un sujet dont le grand public se fiche éperdument, ce qui permet à des politiciens et des technocrates de se saisir de cette problématique pour tenter de planifier les utilisations futures de la terre.

Pourquoi s'en prendre à un lieu commun d'ordre apparemment aussi secondaire, me direz vous ? Parce qu'il n'est pas aussi secondaire que cela. Au nom de la lutte contre l'étalement urbain, ont été prises par le passé des décisions qui coûtent aux ménages Français plusieurs milliards d'Euros chaque année. 
La lutte contre l'étalement urbain est la justification principale des politiques de planification spatiale en vigueur en de nombreux endroits du monde (exemple: "smart growth policies" américaines) et qui aboutissent à rationner le foncier constructible des zones géographiques concernées, conduisant à la formation de bulles immobilières lorsque la demande de logement est très solvable. Ces bulles, non contentes d'organiser un vaste transfert de richesses des classes moyennes vers les catégories plus aisées, ont été sans aucun doute sinon les initiatrices, du moins les amplificatrices de la crise des subprimes. (pour mes nouveaux lecteurs qui ne voient pas le rapport entre lutte contre l'étalement urbain et crise des subprimes, en voici mon explication, et, si cela ne vous suffit pas, celle du récent prix Nobel d'économie Paul Krugman).

Manifestement, extrêmement rares sont ceux qui font la relation entre ces politiques et la crise actuelle, dont les causes sont si complexes et multiples que personne -- sans me vanter, peut être... moi ? -- ne semble avoir une vision intégrale de tous les mécanismes qui y ont contribué. Aussi les politiques de lutte contre l'étalement urbain, sous de multiples prétextes de nature le plus souvent environnementale, continuent d'être promues par nos gouvernements, sous des formes diverses. La Californie, pourtant touchée par la plus forte bulle immobilière jamais rencontrée de mémoire d'économiste, envisage de renforcer ses lois anti-étalement. Cela pourrait nous être indifférent, mais la situation de l'hexagone n'est guère meilleure, puisque le "Grenelle" de l'environnement a consacré la lutte contre l'étalement urbain comme une absolue nécessité, afin de réduire, soi disant, nos rejets de CO2, ce qui ne peut que .

Il est donc urgent de se demander si les problèmes imputés à l'étalement urbain constituent bel et bien les calamités que les publications d'urbanistes professionnels nous dépeignent, et si les risques environnementaux inhérents à l'étalement urbain valaient bien quelques dizaines de milliers de SDF de plus et l'effondrement du système financier international.

Avec l'aide de Christian Julienne, président du Think Tank Héritage et progrès, et ancien professionnel de l'immobilier, dont je m'inspire très largement (*), revisitons la mythologie que les professionnels de l'urbanisme bureaucratique propagent allègrement. 

Un lieu commun particulièrement spécieux

On trouve le terme à conotation péjorative "étalement urbain", préféré à "expansion urbaine" -- trop flatteur ! -- dans tous les discours sur le sujet, avec quelques synonymes qui se veulent tout aussi méprisants :

     
  • La "consommation d’espace", concept assez absurde car personne ne connaît d'ogre dissimulé dans le Massif Central ou les Monts d’Arrhée qui viendrait consommer autour de Paris la bonne terre arable de la Brie et de la Beauce. L'espace est utilisé de mille et une façons, il est inepte d'affirmer que certains de ces usages constituent une "consommation", et pas d'autres. 
     
  •  
  • L’ "artificialisation des sols", concept également spécieux car, en dehors des massifs montagneux des glaciers et de la forêt primitive, tous les sols sont artificialisés à des degrés divers. L'on peut toutefois le définir assez justement comme les sols qui ne peuvent être rendus à l'état de "pure nature" par simple abandon.   
     
  •  
  • La "destruction des sols" du fait de l’urbanisation, identifiée par l’Institut Français de l’Environnement comme une menace importante, terme également stupide car, par définition, personne n’a vu de sol disparaître pour cause de destruction. Par contre, bien sûr, les sols se sont transformés et l’on verra pourquoi.
     

Ces définitions induisent, dans l'esprit de ceux qui les utilisent, l'idée que certaines utilisations de l'espace disponible auraient moins de valeur que d'autres, la valeur n'étant ici pas jugée à l'aune d'un calcul économique ou d'une analyse scientifiquement rigoureuse, mais des préjugés environnementalistes ou naturalistes en vigueur.

La question de l’étalement urbain se pose depuis toujours car l’homme occupe l’espace depuis qu’il a construit des huttes et qu’il en a fait un habitat durable. Cet habitat a été longtemps concentré dans des villages et des villes protégés d’abord contre les invasions puis contre le brigandage qui n’a guère cessé que dans les années 1840/1850. Depuis, les hommes ont sans cesse agrandi et élargi leur espace.

De 1600 à 1945, l’occupation de l’espace par l’homme passe d’environ 1 % à 4 % du territoire national.

Avec 26 millions d’habitants (sans la Savoie, Nice et l’Alsace-Lorraine) les Français, ruraux à 84 %, occupaient déjà environ 1 % de l’espace au XVII et au XVIIIème siècle, non pas en raison des villes, enfermées dans leurs remparts, mais par l’importance des villages, châteaux, églises, cours de fermes, bâtiments agricoles, basses-cours, aires de battage, chemins ruraux, industries et artisanats agricoles divers.

Cette proportion est restée assez stable jusque dans les années 1840/1850, la France ayant pris vingt ans de retard par rapport à l’Angleterre pour son urbanisation.

C’est entre 1850 et 1920 que les Français commencent à occuper un espace plus important avec l’extension du chemin de fer (le réseau passe de 5 000 à 49 000 kilomètres), la construction des usines hors les murs, souvent accompagnée de l’habitat ouvrier, la destruction des remparts (généralisée entre 1840 et 1870). La ville du Moyen-âge disparaît progressivement. Les remparts deviennent les grands boulevards, la banlieue se développe d’autant plus que l’habitat ouvrier est presque toujours un habitat horizontal. Les Corons du Nord en sont l’exemple le plus mauvais, les ensembles de maisons individuelles accolées deux par deux, construits par les compagnies de chemins de fer ou les industriels alsaciens, l’exemple le plus sympathique.

C’est ainsi qu’avant la guerre de 1914, on passe à environ 2,50 % du territoire occupé en permanence par l’activité et l’habitat humain alors que la population n’augmente que de 33 %, passant de 29 à 39 millions.

De 1918 à 1950 le besoin d’espace augmente en fonction de deux facteurs : l’essor de la construction de maisons individuelles favorisé par une législation favorable à la propriété sociale et à la maison individuelle (lois Ribot, Loucheur…), les débuts de l’automobile – le parc de véhicules atteint 2,5 millions en 1939 – et des deux roues motorisées ou non : la population ouvrière fait facilement 4 à 6 km de trajet domicile-travail pour conserver son habitat rural. Durant cette période, la population reste stable mais s’urbanise de façon importante. L’agriculture représente moins de 30 % de la population active au lendemain de la seconde guerre mondiale. L’espace occupé par les hommes atteint alors environ 4 % du territoire.

De 1945 à aujourd’hui, l’espace occupé par les hommes double.

Les soixante années d’après guerre ont provoqué une transformation radicale de la société française dont on peine à prendre la mesure. La France a beaucoup plus changé en soixante ans qu’en cinq siècles. Et d’abord sur le plan démographique : 62 millions aujourd’hui, un peu moins de 40 en 1939 mais déjà 20 millions sous Louis XIII.

Et ces 60 millions d’habitants vivent de façon totalement différente :

> ils ont fait la révolution automobile et possèdent aujourd’hui 36 millions de voitures, contre 2 millions avant guerre. Il a fallu construire garages et parkings, et surtout développer un considérable réseau routier et autoroutier. Les espaces réservés au transport sont deux fois plus importants aujourd’hui qu’hier, bien que la France ait été déjà connue pour la qualité de ses routes sous l’ancien régime.
> le parc de logements ne dépassait guère 12 millions avant guerre ; il est passé à environ 32 millions avec quelques 10 % de résidences secondaires et 6 % de logements vacants. Ces logements sont de plus en plus grands et chaque Français dispose en moyenne d'environ 37 m².
> les bâtiments d’activité se sont profondément transformés : la création d’hypermarchés et de grands centres commerciaux en périphérie a conduit à la réalisation de vastes parkings occupant de grandes surfaces. Usines et entrepôts mettent un point d’honneur à s’entourer de petits ensembles paysagers et/ou de pelouses. Les visiteurs doivent aussi pouvoir y parquer leurs voitures.
> les équipements de loisirs se sont multipliés : stades, terrains de foot, parcs et jardins publics, espaces de jeux pour les enfants, etc.

L'étalement urbain s'opère-t-il au détriment des activités agricoles ?

Résultat de ce développement ? selon diverses sources statistiques (INSEE, DATAR), les surfaces occupées par les hommes se situent aujourd’hui entre 8 et 9 % du territoire, soit au maximum 5 millions d'hectares, contre environ 1,4 millions d'hectares lors de l'immédiat après première guerre.

Ces évolutions se sont produites sans que l’espace ne manque jamais car, dans le même temps, la productivité agricole s’est développée de façon extraordinaire. La production agricole a été multipliée par 4 entre 1920 et 2000. Pendant le même temps, la surface agricole utile, y compris les prairies, diminuait de 25 % passant de 38 à 29 millions d’hectares, soit une "perte" de 9 millions, dont ont principalement bénéficié les espaces forrestiers.

Par conséquent, l'espace "artificialisé" a augmenté en 90 ans de 3,6 millions d'hectares, mais l'espace dédié à l'agriculture a diminué presque trois fois plus rapidement, ce qui signifie que la perte d'espace agricole n'est absolument pas dûe à un grignottage de l'espace disponible par la ville mais a tout simplement résulté d'un moindre besoin de terre pour produire ce dont les marchés ont besoin.

L'argument selon lequel l'étalement urbain "mangerait" l'espace agricole disponible est donc une billevesée qu'il faut combattre avec force.

La croissance démographique et économique ralentit et avec elle l’occupation de l’espace par les hommes

Il est d’ailleurs assez curieux que les propos sur l’étalement urbain se soient multipliés depuis une dizaine d’années alors que les surfaces urbanisées tendent aujourd’hui à se développer plus lentement pour des raisons d’ailleurs bien évidentes : ce sont les trente glorieuses qui ont vu ce formidable développement économique. Il s’est encore prolongé jusqu’à la fin des années 1980, mais il se réduit malheureusement d’année en année. Les sommets de la construction neuve ont été atteints en France entre 1970 et 1975. Le réseau autoroutier est pratiquement achevé depuis une dizaine d’années. Le TGV se développe à moins de 100 kilomètres par an. Les vastes zones commerciales se développent moins que le commerce de moyenne proximité (les magasins discount de 300 à 1 000 m²).

Si l’urbanisation touchait les dernières années entre 55 et 60 000 hectares par an (0,1 % de la surface du territoire), le rythme tend plutôt aujourd’hui vers moins de 50 000 hectares par an, soit 0,1% de l’espace français par an, ou encore 1 % en dix ans si le rythme ne se ralentit pas. Or, tout porte à croire que ce ne sera pas le cas.

En effet, 60 000 hectares annuels peuvent paraître effrayant en première lecture, et les publications officielles ds bureaucraties en charge de lutter contre ce faux problème (il faut bien vivre...) ne se privent pas d'agiter ce chiffre comme un épouvantail. Mais cela ne représente guère que 600 kilomètres carrés, soit 1.1 pour mille de la surface de la France métropolitaine. Cette augmentation du besoin d'usage des sols provient essentiellement de l'augmentation de la population, et plus encore du nombre de ménages, car un ménage engendre un besoin de résidence principale.

En 2000, la part "artificialisée" du territoire représentait 43 000 km2 sur 550 000, soit 7,8% environ. Si l'on augmentait de 600km2 annuels la surface occupée pendant 50 ans, la surface artificialisée en 2050 représenterait 13,3% du territoire. Pas de quoi menacer la survie des forêts ou de l'agriculture, nous l'avons vu ! Mais en outre, toutes les tendances démographiques indiquent que l'augmentation de consommation spontanée de surface devrait se réduire dans les années à venir.

En effet, le chiffre de 60 000 hectares annuels a été calculé sur la base des années 90, décennie pendant laquelle la population de France métropolitaine a augmenté de 1,8 millions de personnes, et surtout, le nombre de ménages a augmenté de 2,5 Millions d'unités, du fait de l'abaissement  rapide du nombre de personnes par ménage, résultant à la fois du vieillissement accéléré de la population (les personnes âgées vivent à 1 ou à 2, faisant baisser la moyenne) et de l'augmentation de 50% du nombre annuel de divorces depuis 15 ans. (Source : Insee, catégorie "population" ).

Or, les prévisions de l'INSEE tablent sur un ralentissement de ces tendances. La population, qui a cru de 0,43% par an dans les années 90, ne devrait plus croître que de 0,3 à 0,35%, et la hausse du nombre de ménages, qui a explosé de 1,1% en rythme annuel, devrait revenir en moyenne à 0,7% dans les 50 prochaines années, avec un aplanissement progressif de la courbe. De surcroît, les personnes âgées tendent à privilégier des surfaces d'agrément (jardins, etc...) moindres, car leur entretien est difficile. La consommation d'espace devrait donc voir son accroissement naturel ralentir. Si les prévisions démographiques de l'INSEE se révèlent exactes (l'INSEE ne peut prévoir tous les phénomènes de façon fiable, notamment les phénomènes de rupture: variations de flux migratoires, conflits, etc...), la part du territoire "non naturel – non sylvicole - non agricole" ne devrait guère excéder 10 à 12% en 2050.

Voilà qui devrait relativiser les discours alarmistes des pseudo-experts qui ne jurent que par l'accroissement de la densité de peuplement des villes pour empêcher les humains, en nombre croissant, "d'annexer la nature". D'un point de vue quantitatif, compte tenu des évolutions démographiques prévisibles, l'étalement urbain n'est pas une menace significative.

Encore faut-il évaluer avec précision ce que l’on appelle tantôt étalement urbain, tantôt sols artificialisés, tantôt sols urbanisés. Car l’espace occupé par l’homme est très divers. L’évaluation moyenne est de :

Autoroutes, routes, parkings, chemins ruraux 38,2%

Pelouses, c’est-à-dire zones vertes entretenues non agricoles,
bordures d’autoroutes, terrains de sports,
aérodromes, jardins publics  
24,5 %

Logements et bâtiments de tous types 20,3 %

sols artificiels non bâtis :
chemins de fer, mines, carrières, terrains militaires, industries 17,0 %


On voit d’ailleurs ainsi que les territoires occupés par l’homme sont très divers et que le mot artificialisation est loin de s’appliquer toujours avec pertinence. Chemins ruraux, pelouses et terrains militaires par exemple ne nécessitent pas de travaux d’assainissement et de gestion des eaux pluviales particulière. Par contre, logements, bâtiments, rues et places exigent réseaux d’égouts et d’assainissements spécifiques.

La vanité de la lutte contre l'étalement urbain

Il est vain de vouloir s'opposer par la contrainte bureaucratique aux souhaits et aspirations des familles et des individus, surtout dans une société fondée sur la propriété. Certes les réglements contrariant le libre usage de la propriété individuelle sont innombrables et sont alourdis dans d'importantes proportions chaque année. Il existe la servitude d’utilité publique, le droit de préemption et les contraintes des SCOT (Schémas de cohérence territoriale) et des PLU (Plans locaux d’urbanismes). Sans oublier les nombreuses lois relatives à l’urbanisme, à l’environnement et à la protection de l’agriculture qu'il serait trop long d'énumérer. Mais la règle générale reste, pour l'instant encore, le droit de propriété, de même que l’immobilier reste régi encore pour une grande partie (excepté le secteur HLM) par les lois du marché.

Or que constate-t-on d’année en année et sans aucun changement depuis 60 ans ? D’abord que les Français ont une préférence très marquée pour l’accession à la propriété, ensuite qu’ils assimilent pour les 4/5 d’entre eux la propriété et la maison individuelle.

Le marché de la construction neuve s'est réparti grossièrement en quatre segments (moyenne de ces dernières années):

     
  1. > la maison individuelle  ...  200 000
  2.  
  3. > l’accession à la propriété en immeuble et maison de ville.. 60 000
  4.  
  5. > le HLM locatif... 50 000
  6.  
  7. > l’investissement immobilier en niches fiscales (Robien/Borloo)..  60 000

Les segments 2 et 3 comportant eux-mêmes une petite proportion de maisons individuelles, on voit bien que ce type d’habitat représente les 2/3 de la construction neuve et les 3/4 de l’accession à la propriété.

Limiter l’étalement urbain, c’est limiter la part de la maison individuelle dans la construction et le développement des zones commerciales, des entrepôts et des usines en périphérie. En bref, c’est s’opposer résolument à l’évolution de l’urbanisation telle qu’elle s’est produite non pas depuis 50 ans, mais depuis toujours. Pourquoi vouloir le faire ?

L’étalement urbain ne pose plus aujourd’hui de problème (quand bien même il en aurait posé par le passé).

C’est dans les cinquante dernières années que les agglomérations urbaines ont couvert leurs aires de développement actuelles :

35 km de Rayon pour la région parisienne,
15/25 km pour les agglomérations de plus de 600 000 habitants (9),
10/20 km pour la très grande majorité de l’espace urbain français qui se situe autour des villes de 100 à 400 000 habitants.

Le suivi des statistiques du Ministère de l’Equipement montre que 70 % de la construction neuve récente s'est faite en France dans les villes de moins de 20 000 habitants, c’est-à-dire principalement entre les 5 km des anciens remparts et les 10/20 km où l’on trouve encore des constructions agglomérées.

Or, ces aires urbaines, vues d’avion, montrent l'existence d'espaces vierges de constructions très importants, parfois considérables. En région parisienne par exemple, entre 25 et 35 km, il y a beaucoup plus de taches vertes que de zones construites. l'Etalement urbain se produit en priorité le long d'axes le long desquels le législateur local autorise encore quelques constructions. En deuxième phase, il tend à combler les dents creuses. Prétendre, comme le font certain, qu'au train actuel, les villes abosrberont les campagnes dans 50 ou 100 ans relève soit de la bêtise, soit de la malhonnêteté intellectuelle.

Il semble que ceux qui développent à longueur de temps le lieu commun du « déplorable étalement urbain » ignorent cette petite règle arithmétique simple indiquant que la surface d’un cercle est égale à PI*R^2. Cela signifie qu’une agglomération ayant un rayon de 15 km passera d’une surface d’environ 700 km² à 900 si elle augmente ce rayon de 2 km. La surface augmente ainsi de 30 %, alors que le rayon n’augmente que de 13 %.

Le fait d’avoir élargi les périmètres urbains sans se poser de questions inutiles a déjà fabriqué de très grandes surfaces disponibles pour construire à l’intérieur des limites actuelles. D’où ce sentiment que l’on a partout de voir de grandes étendues vertes de friches agricoles à la limite des villes.

Plutôt que de lutter contre la volonté manifeste de toute la population en prônant le collectif à outrance, des densités moyennes supérieures à 50 logements à l’hectare et de la maison de ville à 35/40 logements à l’hectare, il est beaucoup plus souhaitable de construire ce que le marché encore un peu libre, c'est à dire l'expression des préférences individuelles, demande. Soit, empiriquement:

> dans les zones rurales autour de 7 à 12 logements à l’hectare,
> dans les lotissements et groupements de maisons autour de 15 à 20 unités  à l’hectare,
> dans le périurbain bien aggloméré de 20 à 40 unités à l’hectare,
> en proche centre-ville et en ville de 50 à 100 unités à l’hectare

Naturellement, les chiffres qui précèdent peuvent évoluer si les goûts de la population changent.  Mais ce sont les mécanismes du marché qui seront les mieux à même de capter ces évolutions, pas les lubies de bureaucrates planificateurs dont les ancêtres sont ceux qui ont bâti plus de 700 "ZUP", aujourd'hui autant de ghettos qui posent d'énormes problèmes à la société française.  Voilà qui devrait inciter leurs héritiers spirituels qui ne rêvent que de densification et de ceintures vertes infranchissables à plus de modestie.

Urbanisme et libertés individuelles

Et puis, dans un pays supposé défendre la liberté, si l'on en croit la devise inscrite aux frontons des mairies, laissez-nous vivre ! Au nom de quoi, au nom de qui, obligera-t-on les hommes à habiter dans un type d’immeuble ou un type de maison déterminé par un groupe de politiques et de fonctionnaires, quelles que soient leurs (in)compétences ? Dans aucun autre domaine de la vie quotidienne et de la consommation on ne trouve à ce point cette volonté de quelques technocrates – politiques, hauts fonctionnaires, bureaucrates, urbanistes, architectes – de dicter aux hommes leurs modes de vie.

Les élus politiques doivent se poser la question: sont ils élus pour empêcher les familles de réaliser leurs aspirations ? Peuvent-ils prétendre favoriser l'intérêt général quand les politiques qu'ils promeuvent vont à l'encontre des désirs individuels largement majoritaires exprimés par la voie du marché ? L'élection leur confère-t-elle le droit de se substituer leurs choix à ceux des électeurs ? Peuvent-ils oser évoquer à ce point l'intérêt général quand la "science" sur laquelle ils s'appuient pour le définir est à ce point biaisée ?

"En urbanisme, la liberté de choix doit être la règle. Il y va tout simplement de notre liberté".

Ce qui n’exclut en aucun cas d’accorder la plus grande importance à la qualité de l’urbanisme, de l’architecture et des paysages. L'avenir n’est pas de forcer les personnes à se réinstaller à tout prix vers les centres-villes, ni même de bloquer toute construction aux limites des agglomérations. L'avenir, c'est de savoir comment permettre aux familles de réaliser leurs projets selon leurs aspirations, tout en permettant d'améliorer la qualité des nouveaux paysages urbains. 

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Naturellement, il y a encore beaucoup de mythes et de vérités cachées à évoquer sur le sujet de l'étalement urbain: coûts, environnement, CO2, etc... Cela fera l'objet d'articles ultérieurs... En préparation !
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* La plupart des éléments chiffrés et historiques cités ici sont directement reproduits de fiches issues du travail de Christian Julienne, pour la fondation Héritage et Progrès,  avec son aimable autorisation. Qu'il en soit vivement remercié ici.
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Article "cross-posté" sur mon second blog, crise publique.
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