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Caracolade

Par Deathpoe
Je quitte la salle à manger, un verre de whisky à la main. Je m'en suis servi un triple, ou mettons un double bien tassé. Cela me permet de ne pas avoir à me lever à nouveau, en plus de pouvoir me dire "Je n'ai bu qu'un seul verre aujourd'hui". Dans la cuisine, je le pose sur la nappe en toile cirée, juste à côté d'une dose de codéine prête à être consommée. Dire que je n'y pensais même plus. A cet instant, j'ai terriblement envie d'un verre d'absinthe, d'un joint d'herbe et de sexe sans un mot. Alors je fais avec ce que j'ai à disposition.
Il m'arrive de plus en plus fréquemment de boire mon whisky pur, comme un homme, un vrai. Mais le fait est que je l'apprécie beaucoup plus avec des glaçons, trois, précisément. Je regarde le liquide couleur or et ne peux m'empêcher de me dire "Cette merde va finir par te tuer". Et je suis sûr et certain que ce n'est pas le moment d'y rester. Rien que sa personne et tout ce qu'il nous reste à accomplir me pousse à ne pas crever inutilement, comme un chien qui n'aurait pas eu le temps de parcourir l'intégralité de la rue. Car je ne vaux, sur beaucoup de points, guère plus qu'un chien en chaleur. Seuls mes excès seront la cause de ma mort, et il me semble que c'est jusqu'à cette relation que je vis dans toute son intensité. Chaque sentiment distinguable, je le pousse à son extrémité, la plus sincère et la plus naturelle puisse-t-elle être. Me vient parfois à l'esprit le sentiment que j'en fais trop, que cela aurait pu ne pas ressembler. Alors en voiture, j'écrasais l'embrayage afin de produire le craquement sonore de mon genou, ce qui me délivrait d'une gêne particulière.
Voilà, d'un coup, tous les mots qui me venaient naturellement il y a encore quelques minutes, de manière précise et ordonnée, ne sont plus que de vagues échos. Alors je peux balancer cela sans un bruit, cendre que l'on tape au-dessus d'un cendrier déjà trop plein. Je me souviens du réveil morose et ennuyeux, de ma voix rauque creusée par la cigarette, et de ma gorge aussi irritée que l'anus d'une star du porno. Je me souviens de ce feu rouge où je me disais "Je n'ai pas peur d'être fatigué le lendemain, quoi que je fasse, pourvu que ça en ait valu la peine.".
Présentement, je pourrai leur en vouloir à tous de parvenir à trouver aisément le sommeil, et ce alors que je me trouve assis au bord d'une canapé, à terminer mon verre d'une lampée tandis que ma cigarette se consume. Je me sers un kaluha-lait, pour ne pas avoir soif pendant que je continue d'essayer d'aligner les mots. Je revois cette conne, la voisine du rez-de-chaussée, installée à l'intérieur de la voiture de son mec, adossée à la portière, me souriant en me disant bonsoir alors que je venais d'éternuer bruyamment, pensant que la rue m'appartenait. Je n'ai pas vu la tête du type en question, et il n'est par conséquent pas difficile de deviner ce qu'il se passait.
En grimpant les quatre étages, je songeais à ce qui m'est apparu il y a quelques jours comme une révélation. Je ne vis qu'à travers les possibles, sans en réaliser vraiment. Cela m'avait profondément ébranlé, tellement c'était tuant de vérité. Alors je cherche un moyen pour pouvoir en faire encore plus. Ne plus me dire "La prochaine fois, je ferai cela, et je serai totalement maître de moi-même, et aucune pensée ne viendra me troubler." Aucune retenue, voilà, et ce quel que soit le point de vue adopté. Ne penser à rien, et se contenter d'exploser de la manière la plus bruyante, infernale, qui soit.Ce que l'on a pu faire dans un autre contexte n'a plus aucune importance. Pas plus que les projets et intentions à venir.
L'on m'a un jour dit que j'étais un personnage qui ne faisait pas semblant. A croire que ce n'est pas faux.

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