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Ne vivez pas en suivant le mensonge !

Publié le 16 juillet 2007 par Aurialie

Dmitri Prigov vient de s'éteindre dans une clinique moscovite des suites d'un infarctus. Avant de lire l'article sur Kasparov.ru, je ne le connaissais pas, donc petit retour en arrière sur cet artiste grâce à un condensé d'articles du Centre national du livre, d'Evène, et des éditions Caractères. Né en 1940, à Moscou, ce peintre, sculpteur et poète, qui prônait le mélange des arts, était l'un des leaders du mouvement conceptualiste russe. Ses poèmes, prolongements de son œuvre picturale et critiques impitoyables de l'idéologie soviétique, étaient diffusés en samizdat et publiés à l'étranger, ce qui lui valut des ennuis avec les autorités. En 1986, il est même interné dans un asile psychiatrique pour activité provocatrice, pendant un laps de temps assez court, puisque une vague de protestation lui permet d'être libéré.

Installations, performances, happenings, photos, vidéos pour portable… les moyens d'expression de cet auteur très prolixe ne manquent pas. Dans sa poésie, Dmitri Prigov déconstruit la langue, l'idéologie et les valeurs les plus sacrées pour développer un rythme et un système de rimes marginaux, s'inspirant de l'écrivain de l'absurde Daniil Harms et de la tradition orale. Ses très nombreux poèmes (en mars 2005, il en avait déjà écrit 35.000), généralement très courts, réunis en plusieurs cycles, sont empreints d'un humour féroce qui met à nu la misère du quotidien et la mentalité de l'homme post-soviétique, sans pour autant exclure la tendresse et la compassion. Prigov s'adresse à tous ses personnages, qu'il s'agisse de la Mort, de Dieu, de Dostoïevski ou d'un modeste cafard, avec douceur et compréhension, construisant un monde de faux-semblant, à la fois effrayant et malicieux, peuplé d'archétypes rouillés et d'automates mélancoliques.

Pour finir, voilà quelques vers, en français (source : la maison de la poésie.be) et en russe (source : prigov.ru).

Réflexion banale sur la liberté

A peine ai-je fait la vaisselle
Qu'elle s'amoncelle à nouveau
A quoi bon parler de liberté
Je ne ferai pas de vieux os
Forcément je pourrais m'abstenir
De la laver, mais les gens me disent :
La vaisselle est sale : comment donc
Parler de liberté dans ces conditions

***

Je suis fatigué dès la première ligne
Du premier quatrain
Voilà je me traîne jusqu'à la troisième ligne
Puis jusqu'à la quatrième enfin

Me voici à la première ligne
mais déjà du second quatrain
Puis j'arrive à la troisième ligne
Puis, grâce au ciel, je parviens à la fin !
(Traduction de Christine Zeytounian-Beloüs)

Русский народ
1
Плывут по небу облака
Белые
Вдруг ветер нагоняет тучи
И смешивает все могучим
Порывом
И незаметная рука
Прозрачно, задом-наперед
И вверх ногами : Мой народ
Русский ! –
Начертывает
Что можно прочитать только сверху
С ее позиции

2
Нашли медведя – он уж стар
Пока его там поднимали
Из берлоги
Пока вели, предпринимали
Там разное, он сразу стал
Умирать
Но напоследок развернулся
Когтями грудь себе рванул
Ее как хляби распахнул
И хлынуло в лицо нам : Русский
Народ

(Le 1e poème n'est pas la traduction du 2e.)

Noms des œuvres :
1- Winter russische reise 1984 Duren
2-Gogol
3-Kadinsky


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