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Mire

Publié le 25 octobre 2008 par Menear
Je ne grimpe pas dans mon four pour remonter le temps, je ne cherche pas les dinosaures à quatre pattes au fond derrière la grille. Je ne prends pas non plus place dans la De Lorean de Retour vers le futur ni ne grimpe sur les épaules de Billy Pèlerin en espérant croiser les murs. Je me contente d'attraper deux boites de CD aux jaquettes asiatiques-piratées. Je les écoutes les doigts collés aux vibrations du clavier.
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Yoko Kanno mise à part, je n'écoute plus grand chose des trucs que j'écoutais à cette époque là. Je suis en seconde et je découvre Konci comme si c'était vrai. Les modems sont encore crachotants, 56k etc., donc je me fournis là-bas quand il m'arrive de passer sur Paris. C'est là-bas que je rencontre S. Elle est il le matin puis ressort elle l'après-midi. Sacrée remontée dans le temps. Elle me glisse deux CD dans la main que je n'ai plus écoutés depuis des années et puis nous nous séparons là ; je lui demande où on est au fait, elle rigole puis s'en va, je me repère sur les cartes anonymes derrière.
Je glisse mes deux disques dans l'ordi une fois de retour à la maison, filtrés par Winamp, décodés par ces enceintes fatiguées que l'on avait alors. De ces deux disques je garde deux pistes. Instrumentales, bien sûr. Elles seules dans ma playlist. Décor tapis sous une fenêtre IRC archaïque. Ces deux musiques s'enchaînent et se recouvrent et se complètent, elles tournent l'une sur l'autre, je ne me rends pas vraiment compte de qui débute quand et finit où. Simplement : bande son factice d'un automne bref sept ans plus tôt.
On ne connaît pas les gens à qui on parle entre deux époques, coupées en deux, dispersées derrière l'épaule de Billy Pèlerin, sous l'une des portes de la De Lorean, dans le noir du fond du four tout en bas à droite. On ne les connaît pas, c'est vrai quoi. Tout ce qu'on a pu se dire a glissé depuis la faille vers n'importe où ailleurs. Ne reste que ces deux morceaux que je n'écoute plus. Je les vois quand même, de temps à autre, quand le hasard me fait penser à S. Le clavier vibre depuis ces bandes son. Au fond, je ne me souviens même pas des images auxquelles elles sont censées se raccorder. L'OAV d'Angel Sanctuary était mauvais et je n'ai jamais joué à Ocarina of time. Reste que j'y ai pensé il y a quelques jours, je ne sais plus pourquoi, peut-être parce que H. est absent pour une semaine, que l'appartement vide résonne mal, que je le remplis de musique et de rêveries histoire de. J'étais à l'abri pourtant : ces deux pistes ne figurent pas dans la mémoire fissurée de mon lecteur MP3. Le plus étrange, c'est que cette musique ne relâche derrière aucune émotion : simplement la vision imparfaite d'instants d'automne, le bureau blanc, l'ordinateur, la fenêtre IRC. Rien sur S. ni personne d'autre. Je colle mon oreille tout contre le clavier tremblant : rien que des vibrations chaudes. Cette époque là terne et morte derrière les rideaux tombés depuis longtemps. D'autres moments de cette année me manquent, mais pas ceux là. Ils restent creux. Je vois bien la page IRC mais elle reste blanche et n'affiche jamais rien. La musique tourne, c'est tout.

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