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Le pouvoir et l'argent aiment le pouvoir et l'argent

Publié le 30 octobre 2008 par Omelette Seizeoeufs

Vous ne trouvez pas que je radote ? Depuis quelques mois, j'ai l'impression de bloguer par séries, essayant dans chaque billet de dire ce que je n'ai pas réussi à dire dans le précédent. Et ainsi de suite.

Dernier exemple : les fonds souverains que nous propose notre Très Grand Souverain. Voici le paragraphe que j'ai dans la tête depuis deux ou trois jours :

"Il s'agira d'investir dans l'avenir. Il ne s'agira pas de subventionner des entreprises à fonds perdus mais de stabiliser des entreprises qui pourraient être des proies pour les prédateurs", indique Nicolas Sarkozy en dénonçant au passage "l'action délétère des hedge funds". Volontariste, le président de la République "ne veut pas être celui qui se réveillera dans six mois avec les grands groupes industriels français passés dans d'autres mains". Selon lui, un tel fonds peut également "rendre beaucoup de services à des petites entreprises innovantes".

L'autre jour j'ai voulu suggérer que "nos" groupes ne sont déjà plus français. Nous sommes déjà réveillés, pas besoin d'attendre six mois. De la même manière qu'une partie des grands groupes "étrangers" appartient à des actionnaires français, seule une partie des groupes "français" appartient véritablement à des Français. C'est ainsi. Talonnettes et gesticulations n'y feront rien.

Hedge funds. Avant cette crise, je ne savais pas grand-chose sur les hedge funds, sauf que, vaguement, ils protégeaient les investisseurs contre les chutes des marchés en pariant contre des valeurs en bourse. (Je ne comprends toujours pas comment on peut avancer en pariant à la fois pour et contre les mêmes valeurs, mais ce n'est pas mon affaire.) L'intérêt des hedge funds pour des spectateurs (non spéculateurs), et leur façon d'acheter à découverte, c'est que nos supers investisseurs peuvent se prendre des énormes gamelles de temps en temps, comme l'autre jour, quand Porsche a décidé d'acheter un peu plus de Volkswagen, alors que les hedgeurs avaient parié contre Volkswagen. Vent de panique, l'action VW monte en flèche, les hedgeurs ne trouvent plus de titres VW à acheter. Lisez l'explication, c'est du plus grand comique. Des milliards perdus pour les hedge funds, des milliards gagnés pour les actionnaires VW...

Je n'ai pas vraiment compris pourquoi les hedge funds sont si dangereux, mais j'admire malgré tout leur pessimisme mélangé de cynisme. Lisez aussi, chez Betapolitque, cette lettre d'un gestionnaire de hedge fund qui jette l'éponge après avoir plumé des riches pigeons, profitant de leur optimisme stupide. (La lettre elle-même est ici, en anglais. Elle se termine par un appel à cultiver le chanvre...)

Revenons quand même à notre paragraphe.

"Il ne s'agira pas de subventionner des entreprises à fonds perdus mais de stabiliser des entreprises qui pourraient être des proies pour les prédateurs",

Ceci n'est donc pas un cadeau aux entreprises, même si, bien sûr, le risque des prédateurs est minime, ou encore totalement fantasmatique. Pas de subvention, juste une façon de protéger les fortunes de ces Français qui ont investi d'abord dans des entreprises "françaises".

Le plus franchement cynique, dans ce paragraphe, c'est sans doute la fin :

Selon lui, un tel fonds peut également "rendre beaucoup de services à des petites entreprises innovantes".

On va sauver les petites entreprises en sauvant les grosses. La théorie du ruissellement appliquée à l'aide aux entreprises. C'est cohérent au moins : puisque la même approche a si bien marché avec le Paquet, il serait absurde de changer.

L'ironie, c'est que ce sont justement les PME qui ont le plus de mal en ce moment, qui sont le plus menacées non pas par l'absence de crédit mais par la méfiance grandissante des banques (bénéficiaires de leurs propres milliards...). PSA et Lagardère ne vont pas disparaître demain. Le petit fabricant de tire-bouchons traditionnels, si. Et ce sont les PME qui sont authentiquement françaises. S'il fallait vraiment faire du patriotisme économique, ce sont eux qu'il faudrait sauver d'abord.

Mais non. L'étatisme, la consolidation du pouvoir, le copinage : toutes ces forces contribuent à favoriser tout ce qui est déjà Grand.


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