Magazine Culture

Les Maîtres potiers en terre de faïence de Montpellier (suite n° 4)

Par Elisabeth Leroy

faïence jaune.jpgAu siècle des Lumières, les fabriques de faïence furent à leur apothéose : jamais leur nombre n'a été, ni ne sera aussi important qu'à cette époque. Elles se modernisent passant ainsi du stade de l'atelier médiéval à une production pré-industrielle. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, le faïenceries furent favorisées par des Edits promulgués par Louis XIV. Pour renflouer les caisses de l'Etat vidées par un règne affreusement dispendieux, le Roi contraignit les riches du Royaume à faire fondre leur argenterie et orfèvrerie. Pour faire face à une pénurie de vaisselle somptuaire, les potiers fabriquèrent des faïences imitant les modèles des orfèvres. Ce fut le cas du service du château de Marsillargues (près de Lunel) connu par un inventaire testamentaire très détaillé qui fut livré au Comte de Calvisson par les faïenciers de Montpellier. La faïence blanche et bleue décorée de motifs conçus par Bérain, l'ornemaniste du Roy, est très en vogue, notamment celle produite par la fabrique de Jacques Ollivier qui obtint par privilège, en 1729, le titre de Manufacture Royale. Cette manufacture de Montpellier employait plus de 300 ouvriers qui fournissaient vaisselle de table, pots d'apothicaire ou même des objets usuels comme des fontaines, des encriers, des consoles ou des revêtements de cheminée. Plus tard, les peintres mirent d'autres tendances au goût du jour, en particulier celles de Moustier ou de Marseille.

Au milieu du siècle, une nouvelle technique, le Petit Feu, se généralisa. Elle permit d'enrichir la palette chromatique et fut appliquée pour les semis de fleurs au naturel inventés par les peintres allemands. A Montpellier, cette mode fit fureur : sur un émail blanc, des bouquets de fleurs champêtres entrelacent une rose cocardière peinte au violet de manganèse puis en bleu indigo. Vers 1770, André Philip, un faïencier de Marseille, travailla à la manufacture des Ollivier puis s'associa avec un autre atelier. Est-ce à lui que l'on doit l'introduction de la faïence à fond jaune passée à la postérité sous le nom de Vieux Montpellier ?

Le glas de la faïence montpelliéraine sonna au XIXème siècle : fascinés par la perfection des porcelaines, les notables boudèrent la faïence jugée alors archaïque.

Perdant cette clientèle argentée et ne sachant pas toujours rebondir lorsque les débouchés commerciaux vers les colonies furent freinés, la plupart des faïenciers firent faillite. Ce n'est qu'en 1907 que la faïencerie de Foncarade reprit le flambeau délaissé à la fin du XVIIIème siècle et remit au goût du jour les faïences à l'ancienne. Aujourd'hui, la fabrique Artus et Siffre en est la digne héritière, seule désormais à Montpellier à perpétuer un artisanat qui contribua à la prospérité de la ville pendant près de 4 siècles.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Elisabeth Leroy 1160 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines