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Mon article sur Rue89-- Etudiants le jour, squatteurs le soir: la galère ordinaire

Publié le 07 décembre 2008 par Hfranchineau

Ils ont enlevé les tracts et les articles de journaux collés sur la vitrine sale de l’ancienne pharmacie, au rez-de-chaussée de l’immeuble qu’ils occupent. Tout a été nettoyé en une journée pour faire place à une exposition temporaire de peintures d’une voisine qui les soutient activement.

Au-delà du projet artistique, c’est aussi dans le but de faire connaître leur situation que Jean Marc, Adeline, Elise et les cinq autres squatteurs ont transformé, en face du Bon Marché, à Paris, l’ancienne officine inoccupée en petite galerie d’art.

Début mars, quelques étudiants repèrent cet immeuble inoccupé de 250 m2, rue de Sèvres, et s’y installent après s’être attelés aux travaux de rénovation. Plomberie, peinture, meubles et téléphone: tout était à refaire.

L’immeuble est vacant depuis dix ans; la pharmacie qui occupe le rez-de-chaussée depuis sept ans. La propriétaire, domiciliée en Belgique, refuse de vendre sans pour autant donner d’explication. A la mairie du VIe, l’affaire embarrasse depuis longtemps, car un immeuble vide, ce sont des logements en moins, surtout pour un arrondissement qui compte seulement 2% de logements sociaux.

La Ville a tenté de contacter la propriétaire, mais sans succès. Personne ne sait pourquoi elle laisse son immeuble inoccupé, ni pourquoi elle refuse obstinément de vendre ou d’accepter le loyer de 300 euros que chacun des huit squatteurs se propose de payer.

En juillet, elle assigne tout le monde en justice. Les jeunes sont condamnés à une procédure d’expulsion immédiate. Un deuxième procès les condamne à payer 150 000 euros de frais d’"immobilisation de biens" et 30 000 euros pour les "dégradations".

"Une mesure d’expulsion immédiate est assez rare, je me demande comment la propriétaire a pu obtenir une telle sentence", s’interroge Joël Retailleau, directeur adjoint du cabinet du Maire UMP, Jean-Pierre Lecoq. Leur avocate a fait appel de la mesure (audience le 10 décembre):

"C’est inadmissible qu’en France des étudiants sérieux, avec un travail à côté, mais ne venant pas de milieu aisé, en soient réduits à squatter."

En attendant, la vie s’organise. Entre les cours, les travaux et les procès, il ne reste pas beaucoup de temps libre aux squatteurs pour les recherches de logement. Sans revenu ni garant, leurs possibilités sont minces.

Et la situation risque d’empirer, puisque l’eau vient de leur être coupée. Ils ont quand même droit au "puits", sorte de robinet disgracieux qu’on leur a sorti de terre, sur le trottoir. Plusieurs fois par jour, ils se relaient et viennent remplir leurs bidons d’eau. "Le soir, on va souvent faire les poubelles dans le supermarché du coin", avoue non sans gêne Jean Marc, étudiant en journalisme à l’IPJ.

Avec la trêve hivernale, leur expulsion est repoussée au 15 mars. "Une véritable épée de Damoclès", déclare Elise, étudiante aux Beaux-Arts:

"Si l’on ne nous remet pas l’eau, ça risque de devenir difficile à vivre. Alors on a demandé aux voisins et au couvent à côté de nous aider."

Les habitants du quartier, pas mécontents que l’immeuble soit enfin occupé, soutiennent majoritairement leur cause. Mais rien ne peut se faire sans la propriétaire. Selon Joël Retailleau:

"Au départ, la Ville de Paris ne voulait pas racheter l’immeuble car les pièces sont trop petites pour faire du logement social. Mais vu la situation, si la propriétaire décide de vendre, la Ville préemptera vraisemblablement l’immeuble."

Les squatteurs ne s’avouent pas vaincus, mais dans leurs paroles transparaît une certaine lassitude:

"Le problème c’est la propriétaire. Nous passons notre temps à chercher un logement ailleurs. Notre but, c’est bien sûr de partir."

Voir article et vidéo sur Rue89 ici.

Articles parus sur le site de l'association Jeudi Noir ici.

Un reportage photo par Laurent Hazgui ici.


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