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Etre «pour» l’avortement ou «pour» la liberté de l’avortement : c’est loin d’être la même chose !

Publié le 09 décembre 2008 par Kamizole

les-bureaux-de-dieu-claire-simon.1228647340.jpgJ’ai reçu en fin de matinée un commentaire fort critique d’un article récent sur le film de Claire Simon : «Les Bureaux de Dieu» qui vient de défrayer la chronique, non seulement à Tassin (Rhône) où une association catholique ultra-réac entendait interdire sa diffusion dans la salle du Lem, mais dans la France entière, grâce à la presse relayée par les blogs, dont Lait d’Beu.

Ce qui a les a fait reculer : le film sera présenté dimanche et Claire Simon sera présente au débat qui suivra, comme je l’indiquais hier.

Je me bornerais à qualifier ce commentaire de resucée de la vulgate anti-avortement. Bourré de contre-vérités ineptes.

Je comptais y répondre par un autre commentaire publié à la suite mais la longueur de mes développements m’a fait préférer un nouvel article. Ecrire long est certes une manie chez mémé Kamizole mais il s’agit d’être didactique plutôt que d’asséner des prétendues vérités sans origine ancrée dans le réel et l’expérience… Or, tout ce que je peux penser sur la question s’est bâti à partir de mon vécu de femme, d’infirmière et de militante du MLAC.

Mon contradicteur y va d’emblée vachement fort : «on n’aurait pas le droit d’être contre l’avortement»… C’est un abus de langage comme de pensée !

Or, ce que je reproche aux militants anti-avortement acharnés c’est de tenter d’imposer leurs vues à l’ensemble de la population, de chercher constamment à les imposer aux pouvoirs publics (cf. les incessants recours au Conseil d’Etat contre les décrets aménageant la Loi de 1975… RU 480, etc…)..

Peut-on être «pour» l’avortement ? Objectivement : non… C’est toujours un acte – non anodin sur le plan psychologique – qui représente un échec dans la vie d’une femme et d’un couple, quelles que fussent les raisons du recours à l’IVG. Je n’ai jamais vu ou entendu une femme parler légèrement d’un avortement.

Certes, ce sentiment peut être intériorisé – refoulé diraient les psychothérapeutes et analystes – et je suis persuadée qu’ils arrivent à la même conclusion que moi. Nul doute qu’ils ont vu nombre de leurs patientes s’effondrer en larmes quand ce souvenir remontait à la surface.

Il ne connaît sans doute pas la réalité qui prévalait avant la loi de 1975. Moi si : je l’ai vécue, élève infirmière ou jeune diplômée dans la salle de chirurgie interne de l’hôpital Tenon. Salle commune d’une quarantaine de lits dont la moitié se remplissait en fin de semaine, à la suite des avortements clandestins. J’ai eu la chance de ne voir aucune femme en mourir.

Malgré les risques médicaux de ces avortements faits dans les pires conditions d’hygiène par les «faiseuses d’anges» (tel était le nom traditionnellement donné aux avorteuses clandestines qui sévissaient) et les risques judiciaires encourus au pénal du fait de la loi de 1920, force était de constater une évidence : rien n’arrête une femme qui a décidé qu’elle ne mènerait pas à terme une grossesse non désirée.

Il parle du Planning familial comme si les conseiller(e)s n’avaient qu’un but : que les femmes avortent ! C’est aussi stupide que mensonger. S’est-il déjà rendu dans un centre du Planning ? Cela m’étonnerait fort… On ne va pas chez l’ennemi” ! Il parle donc sans savoir, en reproduisant les conneries telles qu’on les lui fourre dans la tête.

C’est en tant qu’infirmière et à cause de tout ce que j’avais vu, sans oublier ce que vivaient un certain nombre de mes copines, que je me suis engagée à fond pour la liberté de l’avortement et de la contraception. Au MLAC , au niveau local à Orléans, et au niveau national.

Le Planning familial en faisait partie intégrante et j’ai donc côtoyé pas mal de leurs conseiller(e)s et militant(e)s pour qui j’éprouvais en général une vive sympathie. Jamais, au grand jamais ! je ne leur ai entendu dire qu’il fallait forcer les femmes à avorter…

Il raconte n’importe quoi ! Ne croyez pas que les personnes du Planning Familial se désintéressent du devenir des femmes qui sont passées dans leurs Centres.

Mais nous avions constaté un phénomène au MLAC : les femmes qui étaient passées dans nos permanences (la plupart du temps pour un «voyage» en Hollande) ne revenaient pas pour une raison très simple : elles voulaient oublier cet épisode de leur vie, le plus rapidement et le plus profondément possible…

Ce qui ramène à ce que je disais en introduction : le traumatisme psychologique sur fond de sentiment d’échec… Je conclurais donc en disant que l’on ne peut être «pour» l’avortement mais seulement «pour» la liberté d’avorter ou non… Ce qui est loin d’être la même chose !


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