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"Je m’appelle Leelabem Mackwana"

Publié le 18 décembre 2008 par Annegaellerico

Je travaille pour l’ONG Bhavnagar Blood Bank depuis 5 ans. Nous luttons contre la propagation du sida dans l’Etat du Gujarat.

Je suis née dans la région d’Alang un peu après l’indépendance de l’Inde (1947). Je suis allée à l’école et c’est toute petite que j’ai appris à écrire et à lire l’Hindi mais ma langue maternelle est le Gujarati. A cette époque l’industrie du démantèlement des bateaux n’existait pas, la plupart des gens dans la région étaient, comme mon père, des pêcheurs.

Au début quand les entrepreneurs sont arrivés, ils nous ont promis que l’industrie du recyclage des bateaux allait apporter la prospérité à notre région. Ils nous ont menti, du moins en partie. La côte est désormais ravagée par la pollution. Du coup les pêcheurs sont obligés de parcourir plusieurs kilomètres pour pêcher et les conditions de travail sont telles que l’écrasante majorité des employés vient des Etats très pauvres du nord de l’Inde comme le Bihar ou l’Uttar Pradesh.

Mon mari a ouvert un petit magasin à l’entrée d’Alang, il achète tout ce qui a de la valeur dans les anciens paquebots, du shampoing au gilet de sauvetage, et il revend la marchandise, très bon marché, à des particuliers ou à des entreprises (dont beaucoup d’hôtels). Moi j’ai vu d’un mauvais œil l’arrivée de cette industrie pour les problèmes environnementaux mais aussi sociaux que la venue des travailleurs migrants a engendrés.

Les travailleurs d’Alang sont des hommes dont beaucoup sont jeunes et seuls. Certains fréquentent les prostituées une catégorie de la population qui est particulièrement touchée par le sida. Pour protéger ma communauté mais aussi les travailleurs qui, maintenant je l’ai compris, sont également des victimes, je me suis engagée dans l’ONG Bhavnagar Blood Bank qui travaillent dans tout ce qui touche à la santé.

A la grande époque de l’Hindustan, le sexe était plus libre mais avec l’invasion musulmane et la colonisation anglaise, la situation a changé et la société indienne est désormais très prude. Le sida comme tout ce qui est relatif au sexe reste tabou. Si bien que quand j’ai commencé à travailler pour Bhavnagar Blood Bank, il y a 5 ans, les gens ne voulaient pas m’écouter et mon entourage désapprouvait.

Nous distribuons des brochures dans plusieurs langues et nous parlons avec les gens. Nous leur expliquons comment se transmet le sida et nous parlons aussi des autres maladies sexuellement transmissibles. Nous répondons à toutes leurs questions. Certains sont analphabètes alors nous avons développé d’autres moyens de sensibilisation comme des jeux de cartes avec sur chacune des dessins montrant comment se transmet le sida mais aussi les pratiques qui ne sont pas dangereuses comme manger dans le même plat qu’un malade. Nous donnons également, grâce à une aide financière venant de l’Etat du Gujarat, des médicaments aux malades. Notre action a des limites mais nous faisons de notre mieux et aujourd’hui je sens que les gens m’écoutent avec intérêt et ma famille est fière de moi.


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