Magazine Cinéma

Une interview qui (re)lance le débat

Par Luc24

Vu que je suis tombé par hasard sur un post du blog Les nouveaux cinéphiles qui évoque une "polémique", je me suis dit qu'il était temps de rebondir. Le dimanche 14 décembre (puis le mardi 16 pour la version en ligne) a été publié dans le Journal du Dimanche un papier dans lequel paraissait des extraits d'une interview que j'ai faite par téléphone à la demande de Danièle Attali.

Elle m'a contacté car elle faisait un dossier sur le bouche-à-oreille et souhaitait en savoir plus sur l'univers des blogueurs cinéma. Bon, déjà ce qui fait débat c'est que je sois le seul à avoir été contacté. J'ai fait cette interview le jeudi avant la parution du journal. Elle était donc surement en plein rush et ne s'est pas donné la peine de recueillir plusieurs avis. C'est en effet très dommage car mon blog ne suffit pas du tout à représenter la blogosphère cinéma. Je lui avais parlé de Cinémaniac et In the mood for cinema et elle aurait très bien pu rentrer en contact avec elles par exemple...Je ne suis surement pas le blog le plus influent ou le plus lu mais voilà l'interview est tombée sur moi et c'était demandé très gentiment (et puis un peu de pub ça fait toujours plaisir aussi, il faut bien l'avouer).

Au téléphone, je lui parle des blogs qui sont de plus en plus consultés et donc qui pour la peine commencent depuis plusieurs mois à être sollicités par les distributeurs. Cela l'interpelle et elle veut plus de précisions. Je sens qu'elle connait assez mal la blogosphère, qu'elle ne s'est pas vraiment documentée sur le sujet (après tout elle n'allait faire qu'un encadré). Elle ne connait pas Wikio, ne semble pas être lectrice de blogs, ignorait que certains étaient invité à des avant-premières ou projections. Quand je lui parle du club 300, du cocktail de lancement avec Wall-E, de la projo Mesrine en présence de Cassel, elle est impressionnée. Nous nous accordons que oui, c'est certain, tout cela n'est pas organisé pour les beaux yeux des blogueurs. C'est un moyen pour les distributeurs de nous charmer, de débuter une relation privilégiée. Mais, bien sûr, cela ne suffit pas à nous influencer. Le but du blog est de rester libre, c'est son fondement même. Je lui fais part aussi de mon désir que les indépendants s'y mettent, qu'ils ne finissent pas à la traine.

La journaliste semble vraiment intriguée par ces relations distributeurs/journalistes. Elle commence alors à me demander si on gagne de l'argent avec nos blogs. Je lui dis que ce n'est pas évident, que la majorité des blogueurs ne gagne rien et que ce n'est pas forcément un problème pour eux. Je lui dis que du coup, parfois on oublie qu'on est pas journalistes et qu'on est pas dispo à plein temps pour tout voir et parler de tout. Le blogueur, selon mon avis, est un passionné qui rédige des posts pour son plaisir propre et aussi et surtout pour partager cette passion et inter agir à travers les commentaires laissés par les visiteurs. Je lui parle de cette agence, Parenthèse Cinéma, qui envoie des mails pour qu'on fasse des news sur leurs films et que je ne relaie pas les infos sauf si un film me branche vraiment.

Danièle Attali revient sur la question de l'argent, elle est surprise que face au contenu proposé nous ne touchons pas forcément quelque chose. Je lui parle alors de e buzzing et de ses articles sponsorisés. Directement elle demande : "On vous paie pour dire du bien des films ?" Je réponds que non, surement pas. Que si jamais quelqu'un faisait ça il serait logiquement discrédité. Je précise donc que ces articles sont pour des produits divers et variés, pas forcément liés au ciné. Je précise aussi que l'on évite d'en faire trop car après cela fatigue le lecteur. Pour ma part, je n'en ai fait que deux depuis la création de ce blog (donc deux en deux ans et demi, je n'ai d'ailleurs jamais été payé puisqu'il faut atteindre 100 euros pour ça...). J'évoque ensuite les pubs Ad sense et le partenariat proposé par over-blog. "Combien on peut gagner avec over-blog ?" demande-t-elle. Je dis que c'est flou, que c'est très variable surement selon les blogs. J'évoque un maximum de 70-90 euros en cas de très forte influence.

Voilà vous en savez plus sur la fameuse interview. J'ai trouvé la journaliste très sympa et je regrette qu'elle cloture son article par cette phrase : "Pourtant, tous les doutes sont permis: entre avant-premières, cocktails et autres effets paillettes, le système blog ne risque-t-il pas de se faire pervertir? Les auteurs de blogs les plus visités peuvent s'inscrire sur la plate-forme overblog (qui appartient en partie à TF1) et être parfois rémunérés "jusqu'à 90 euros par mois en droit d'auteur". " Bon déjà, rectification : C'est en etant sur over-blog qu'on peut bénéficier du partenariat droits d'auteurs. Et avec TF1 c'est un deal conclu avec la régie pub du groupe. J'ai beau eu insister sur le fait que les blogueurs ne se laissaient pas influencer, cela n'a pas empêché cette fin d'article un peu sujet à controverse. J'avoue que ça m'a un peu déçu.

Il semblerait que les blogs restent encore un mystère pour les journalistes. Laurent Delmas a d'ailleurs parlé de l'interview en disant que celle-ci lui faisait craindre le pire pour l'avenir, le 16 décembre dernier. Il tient des propos un peu dur envers les blogueurs ciné :

 "« Ce sont surtout les majors qui nous contactent, parfois au dernier moment. Elles oublient qu’on n’est pas journalistes. Qu’on a parfois un travail et un patron. On nous montre des blockbusters qui sont des films moins risqués. Mais les distributeurs français s’y mettent aussi. » Jonathan Fisher, 24 ans, a, on le voit, un sens de l’humour bien développé : évidemment personne n’oublie qu’il n’est pas journaliste notre blogueur. C’est même la raison pour laquelle les distributeurs font appel à lui et à tous ces petits camarades : ouf, enfin des non journalistes qui peuvent relayer de l’information. Le bonheur à l’état pur, même Dominique Segall n’avait pas rêvé d’une telle situation ! On apprend également que cet été, une projection de « Wall-E a été organisée juste pour les blogueurs avec un cocktail à la sortie.
Ce que je redoute dans tout ça ? Le triomphe posthume et visionnaire de François Truffaut quand il disait : « Un jour des critiques de cinéma n’auront pas vu « L’Aurore » de Murnau ». Pour m’être promené sur ces blogs, je peux affirmer que ce jour est arrivé. Il est dommage que les professionnels du cinéma que sont les distributeurs se prêtent à ces manipulations médiatiques et développent ces pratiques malsaines. Qui veut faire l’ange fait la bête.
"

Je n'ai peut-être pas parlé de l'Aurore de Murnau ici bas mais je l'ai bien vu cher Monsieur Delmas. Et ce n'est pas parce que l'on est pas journaliste qu'on est stupide, pas curieux de tous les cinémas et que l'on se laisse influencer par les opérations marketing. Je trouve ce commentaire assez blessant mais je vois que Delmas s'est ensuite excusé de faire des généralités (après que Sandra d'In the mood for cinema ait remis les pendules à l'heure).

Bref, tout cela pour dire que : non, nous ne sommes pas débiles. Les distributeurs commencent à s'intéresser aux blogs et c'est tant mieux. Ca nous permet d'avoir la chance de voir des films en avant-première et d'écrire dessus. Mais en aucun cas nous ne nous laisserons influencer (preuve en est les réactions suite à l'avant-première du film Les dents de la nuit). Certes, pour ma part, je ne prétends pas du tout avoir la même connaissance cinématographique qu'un Laurent Delmas, ni sa plume. Mais cela ne m'empêche pas d'être passionné,réaliste et de savoir profiter des chouettes opportunités qu'offre par exemple le club 300 créé par Allociné tout en gardant bien mon esprit critique. Je me permets pour la part de rappeler aux journalistes qu'ils sont eux - mêmes invités en projection presse, à des avant-premières. Qu'ils sont recus dans des palaces lors de junkets où parfois on leur offre des goodies. Qu'ils assistent à des junkets et festivals tous frais payés. Qu'ils font pour certains chaque année la fête gratos à Cannes dans des soirées relookées aux thématiques des films présentés sur la Croisette. Alors l'effet paillette risque-t-il de pervertir le système journaliste ? Je ne pense pas, car j'ai foi en la critique. Chers journalistes, merci de partager cette foi avec vos voisins blogueurs (sans jeux de mots) et de ne pas nous prendre pour des gens qui n'ont aucune passion ou culture cinéma et qui se laissent impressionner dès qu'on leur offre une invitation à une avant-première. Nous sommes, journalistes comme blogueurs, là pour défendre nos coups de coeur. Faisons-le chacun à notre manière en gardant notre intégrité et notre ouverture au 7e art et aux gens. Sans préjugés.

 

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